Imágenes de páginas
PDF
EPUB

nuleius autre Tribun du peuple, à une amende de quinze mille fols. Leur fureur ne fe borna pas à la honte qu'ils vouloient attacher au corps du Senat par cette condamnation d'un Confulaire. Ils remplirent An. de Rode nouveau la ville de trouble & de me 334. divifions, tantôt en empêchant l'élection des Confuls, ou en faifant revivre d'anciennes prétentions qui étoient autant de femences de nouvelles féditions.

Quelque tems après, Sp. Mecilius Tribun du peuple pour la quatriéme fois, & Metilius autre Tribun du peuple pour la troifiéme, voulant fe perpetuer dans le Tribunat, & s'en faire une efpece d'empire & de domination perpetuelle, renouvellerent la propofition du partage des terres conquifes fur les voifins & les ennemis de Rome. C'étoit l'appas ordinaire dont les Tribuns les plus féditieux leuroient le peuple. Rome, comme nous l'avons déja dit, bâtie fur un fond étranger, & qui dépendoit originairement de la ville d'Albe, n'avoit prefque point de territoire qui n'eût été conquis l'épée à la main. Les Patriciens & ceux HS

1

me 335.

qui avoient eu le plus de part au gouvernement, fous prétexte d'en prendre quelques cantons à cens & à rente, s'étoient appropriez le refte & ce qui étoit le plus à leur bienféance, & ils s'en étoient fait une efpece de patrimoine. Une longue prefcription avoit couvert ces ufurpations, & il eut été bien difficile de démêler les anciennes bornes qui féparoient ce qui appartenoit au public, du domaine qu'on avoit fieffé An de Ro- à chaque particulier. Cependant les Tribuns prétendoient dépoffeder de ces fonds les anciens proprietaires, & qui avoient même élevé des bâtimens fur ces terres. Une recherche fi odieufe confternoit les premieres Maifons de la République. Le Senat s'affembla plufieurs fois pour trouver les moyens de faire échouer des propofitions fi dangereufes. On dit qu'Appius Claudius quoique le plus jeune & le dernier du Senat, ouvrit un avis qui ne fut pas defagreable à fa compagnie : il An de Ro- dit que ce n'étoit que dans le Tribunat même qu'il falloit chercher des reffources contre la tyrannie des. Tribuns ; qu'il n'étoit queftion pour

me 336.

cela que de gagner un feul de ces MagiftratsPlebeiens qui voulût bien par fon oppofition empêcher les mauvais deffeins de fes Collegues. Qu'il falloit s'adreffer aux derniers de ce College; que ces hommes nouveaux dans les affaires, & jaloux de l'autorité que Mecilius & Metilius s'attribuoient, ne feroient pas infenfibles aux careffes du Senat, & que peut-être ils fourniroient volontiers leur oppofition, feulement pour se faire valoir, & pour faire quelque figure dans le gouver

nement.

Cet avis fut approuvé tout d'une voix, & on loua hautement Appius de n'avoir pas dégeneré de la vertu de fes ancêtres. Ceux des Senateurs qui avoient quelque liaison avec les Tribuns du peuple, s'infinuent dans leur confiance, & leur repréfentent la confufion où ils vont jetter l'Etat, . & chaque famille en particulier, s'il faut entrer dans la difcuffion des terres concedées par Romulus, de celles qui depuis près de quatre cens ans ont été conquifes fur les Voifins de la République, & que des particufiers ont acquifes en differens fiecles.

Que le projet d'une Loi qui établiroit une égalité parfaite dans la fortune de tous les citoyens, ruineroit la fubordination fi neceffaire dans un Etat, & que les riches, foit Patriciens, foit Plebeïens ne fe laifferoient pas dépouiller fi aifément du bien qu'ils avoient herité de leurs Ancêtres, ou qu'ils avoient achetté de bonne foi des legitimes poffeffeurs; & qu'infailliblement une recherche fi injufte exciteroit une guerre civile, & couteroit peutêtre le plus pur fang de la République. Enfin à force de prieres & d'inftances ils agirent fi heureufement, que des dix Tribuns ils en gagnerent fix qui s'oppoferent à la publication de la Loi.

Mecilius & fon Collegue, outrez de voir fortir l'oppofition de leur propre Tribunal,& de leur College, traiterent leurs Collegues de traitres, d'ennemis du peuple, & d'efclaves du Senat. Mais malgré toutes ces injures, comme il ne falloit que l'oppofition d'un feul Tribun pour arrêter la pourfuite & l'action des neuf autres, & qu'il s'en trouva fix qui s'oppoferent à la reception

.

de la Loi, Mecilius & fon Collegue
furent obligez de fe défifter de leur An de Ro
entreprise.

[ocr errors]

me 337.

Le Senat à la faveur de cette intelligence avec le plus grand nombre des Tribuns, demeura encore maître des affaires l'année suivante. L. Sextius un de ces Tribuns ayant propofé pour flater le peuple, d'envoyer une Colonie à Voles petite ville dont on venoit de s'emparer; les autres Tribuns s'y oppoferent hautement, & ils déclarerent qu'ils ne fouffriroient point pendant leur Tribunat, qu'on proposât aucune An. deRoLoi nouvelle dont le projet n'eût me 338. été autorifé par le Senat.

Mais ce concert du Senat avec les Tribuns ne dura pas long-tems: les fucceffeurs de ces derniers Magistrats du peuple, reprirent peu après la pourfuite du partage des terres avec encore plus de fureur que n'avoient fait Mecilius & fonCollegue.

Les Eques ayant furpris Voles, on donna la conduite de cette guerre à M. Pofthumius Regilenfis, qui étoit actuellement Trib,

e:

ce General fçavoit faire la guerr fa un militair mais il étoit dur, hautain, fier de*

« AnteriorContinuar »