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dent de l'Affemblée où fe devoit faire la feconde élection. Mais il se propofe lui-même pour premier Decemvir, & le Peuple en reçoit la propofition, avec de grands éloges fuivis de la plupart des fuffrages. Ces nouveaux Magiftrats veulent rendre leur domination perpetuelle. Malgré Poppofition des principaux Senateurs, ils viennent à bout de fe faire donner le commandement des Armées pour marcher contre les Eques & les Sabins. Les Romains refufent de vaincre de peur d'augmenter leur puiffance. La dureté de leur domination, leur orgueil, leurs injuftices, mais fur-tout la paffion d'Appius pour la jeune Virginie, font caufe de leur ruine. Virginius pere de cette fille infortunée, s'étant vû réduit à la trifte neceffité de lui enfoncer un poignard dans le fein pour la dérober à la brutalité du Decemvir, les Ar mées fe foulevent & reviennent à Rome, où elles obtiennent la caffation du Decemvirat, & la punition des Decemvirs. On rétablit le Confulat &le Tribunat, & on rend au Peuple tous fes privileges.

'Ous avons vû dans le Volume précedent, Rome jaloufe de fa liberté, e défaire de fes Rois; le Gouvernement Monarchique fe tourner en Républicain fous l'autorité de deux Confuls; la Nobleffe & le Peuple qui compofoient cette République naiffante, par le même amour de la liberté. depuis divifez & prêts à fe féparer; le Tribunat qui n'avoit été établi que comme le gage de leur réunion devenir le fondement de `nouvelles divifions; & ces Magiftrats Plebeïens, artifans perpetuels. de difcorde, pourfuivre tout ce que le Senat avoit de plus grand & de plus illuftre, & s'attacher fur-tout avec opiniâtreté à la ruine des Confuls dès qu'ils fortoient de Charge: en forte qu'un Confulaire devoit fe, regarder comme la victime du peuple, & l'objet de la fureur des Tribuns. Tel étoit l'état de Rome, où l'on faifoit alors un crime aux fouverains Magiftrats de gouverner felon les anciennes Loix. Cependant la difgrace de Romilius & de Veturius dont nous venons de

par

ler, n'épouvanta point leurs fucceffeurs. Sp. Tarpius & A. Haterius, n'en montrerent pas moins de fermeté. Ces genereux Confuls décla rerent hautement au peuple qu'il pourroit bien les condamner à leur tour quand ils feroient fortis de Charge, ou à une amende, ou à des peines encore plus injuftes; mais que ces vexations, & la perte même de leurs vies, ne les obligeroient jamais à confentir à la publi cation de la Loi Agraria. Tant de fermeté, & ce concert unanime de tous les Senateurs, ébranla les Tribuns. Les deux partis également fatiguez de ces divifions continuelles, femblerent fe raprocher. On fut quelque tems fans entendre parler du partage des terres. L'animofité parut ceffée, ou du moins fufpendue. Mais le peuple toujours inquiet, ne fit que changer de vûe & d'objet : il revint à la Loi Terentilla, & demanda au Senat qu'à la place de ces Jugemens arbitraires que rendoient les Magiftrats, on établit enfin un corps de Loix connuës de tous les Citoyens, & qui ferviffent de regle dans la Républi

que,tant à l'égard du gouvernement & des affaires publiques, que par raport aux differends qui naiffoient tous les jours entre les particuliers. Le Senat ne s'éloignoit pas de cette propofition: mais quand il fut queftion de nommer les Légiflateurs, il prétendit qu'ils devoient être tous tirez de fon Corps: & le peuple au contraire demandoit qu'ayant un égal interêt dans une affaire auffi importante, il fût admis par fes députez à partager un fi noble emploi. Il envoya au Senat le Tribun Siccius & fes Collegues pour foûtenir fes prétentions. L'af faire y fut agitée avec beaucoup de chaleur; les avis fe trouverent partagez. Mais rien ne furprit tant que celui de Romilius, ce Confulaire que le peuple venoit de condamner à une groffe amende. Au lieu de s'oppofer comme on le croyoit aux prétentions du peuple, il déclara que fans vouloir inventer de nouvelles Loix, il étoit d'avis qu'on envoyât feulement des députez à Athenes pour y recueillir celles de Solon qu'on fçavoit être les plus populaires de la Grece ; que ces

députez priffent foin en même-tems de s'inftruire de la forme du gouvernement des Républiques voifines, & qu'à leur retour on éliroit des Commiffaires qui feroient choix de celles qui paroîtroient les plus convenables à la conftitution prefente de la République Romaine : Et faffent les Dieux, ajoûta ce Confulaire, que ces Commiffaires nous propofent des Loix également fa»vorables à la liberté du peuple, & à l'autorité du Senat.

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Cet avis fut également bien reçû des deux partis. Le Senat auquel on ne difputoit point le droit de nommer ces Ambaffadeurs, étoit bien perfuadé que ceux qu'il choifiroit pour faire cette recherche, ne rapporteroient rien qui fût contraire à fes interêts & les Tribuns féduits par l'efperance de voir le gouvernement de Rome reformé fur celui d'une République où toute l'autorité réfidoit dans l'Affemblée du peuple, ne pouvoient fe laffer de donner de grandes louanges à Ro-. milius. Siccius même, quoique fon ennemi, déclara qu'il lui remettoit de la part du peuple l'amende à la

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