$ me 304. virs dépofitaires de leur autorité s'en étoient prévalus:leur objet étoit de fe perpetuer dans le gouvernement. Et comme on venoit de leur déferer le commandement des Armées,ils méprifoient des mécontens qu'ils ne craignoient plus. Le peuple deftitué de fes Tribuns, fe vit obligé de fe faire enrôler. Les Legions furent bien-tôt complettes: on en An de Ro- fit trois corps. Q. Fabius Vibulanus marcha contre les Sabins à la tête d'une Armée, & on lui donna pour Collegue & pour confeil, Q. Petilius & M. Rábuleius. M. Cornelius fut nommé General des troupes qu'on devoit oppofer aux Eques & l'on envoya avec lui L. Minutius M. Sergius, T. Antonius & C.Duellius tous Decemvirs. Appius leur Chef demeura à Rome avec Oppius, & il retint un corps de troupes qu'il mit comme en garnifon dans le Capitole pour maintenir fon autorité contre des ennemis domeftiques qui lui étoient encore plus redoutables que les étrangers. C'eft ainfi que de fimples particuliers fous le titre de Decemvirs, s'emparerent de toutes les forces de l'Etat, qui pendant leur domination n'avoit On difoit hautement dans la ville qu'il ne falloit pas s'étonner que les armes de la République n'euffent pas été heureufes fous des Chefsqui avoient ufurpé le commandement. Les uns demandoient des C 3 Confuls, d'autres propofoient d'élire un Dictateur comme dans une calamité publique, & le peuple foupiroit après le rétablissement de fes Tribuns. Siccius Dentatus, ce fameux Plebeïen qui s'étoit trouvé à six-vingt combats, n'entretenoit la multitude que des fautes qu'il prétendoit que les Decemvirs avoient faites dans la conduite de cette guerre. Son fentiment, & le mépris qu'il faifoit de ces Generaux, paffa dans les deux Armées. A peine le foldat vouloit-il déférer à leurs ordres : les uns demandoient des vivres d'autres des armes; & un mécontentement general fembloit annoncer une revolte prochaine. Appius attentif aux évenemens, envoye à fes Collegues des recrues & des vivres. Il leur mande de tenir le foldat en refpect par la crainte du châtiment; & que fi la voye des fupplices leur paroiffoit dangereufe dans la conjoncture ils ne manqueroient pas d'occafion pendant le reste de la campagne, pour faire perir fecretement les plus mutins. Il leur en donna l'exemple. , Siccius lui étoit odieux par fes dif- Siccius fans défiance, & avec la C4 On n'entreprend plus rien fans fes avis; mais cette déference apparente cachoit le deffein fecret de le faire perir. L'occafion s'en prefenId. ibid. ta bientôt. Siccius avec fa franchise ordinaire, n'ayant pas diffimulé aux Decemvirs qu'il ne les trouvoit pas campez affez avantageufement, ils le chargerent de marquer lui-même un nouveau camp, & on lui donna une escorte pour aller reconnoître la fituation du païs. Mais cette escorte n'étoit compofée que des fatellites des Decemvirs, & qui avoient des ordres fecrets de s'en défaire. Siccius s'étant avancé à leur tête jufques dans les détroits de quelques montagnes,ils prirent cette Occafion pour le charger.Siccius ne fe fut pas plûtôt apperçu de leur mauvais deffein, que s'adoffant contre un rocher pour ne pouvoir être pris par derriere, il les reçut avec un courage qui fit trembler les plus hardis. Če genereux Romain rappellant fon ancienne valeur, en tua plufieurs & en bleffa d'autres, aucun n'ofoit plus l'approcher : ils fe contenterent de lui lancer des traits de loin. Mais comme ils n'en |