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de fon pere. Si en fon abfence on « entreprend de lui faire violence, j'implorerai pour mon époufe le « fecours du peuple Romain; Virgi- « nius demandera l'affiftance de tous " les foldats pour fa fille; les Dieux ce & les hommes nous feront favora- сс bles. Mais quand je ferois tout feul, « la juftice & un amour legitime, me « donneront affez de force pour m'o-" pofer à l'execution de ton injufte Arrêt.

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Le peuple également touché de fon malheur, & du courage qu'il faifoit paroître, repouffe & écarte Claudius qui fe réfugie aux pieds d'Appius. L'affemblée étoit remplie de troubles & d'agitation. Le tumulte augmentoit par l'arrivée de ceux qui fe rendoient dans la place, des différens quartiers de la Ville. Le Decemvir craignant une révolte ouverte & déclarée, prit le parti de fufpendre lui-même l'execution de fon Arrêt; & ayant fait faire filence: On fçait affez, dit-il, qu'Icilius ne « cherche que Poccafion de pouvoir «

rétablir le Tribunat à la faveur d'une « fedition. Mais pour lui en ôter tout «< prétexte, je veux bien attendre le «

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» retour de Virginius jufqu'à demain. Que fes amis ayent foin de l'en » avertir. Il ne faut gueres plus de » quatre heures pour fe rendre d'ici "au camp. J'obtiendrai de Claudius qu'en confideration de la paix & de » la tranquilité publique, il relâche quelque chofe de fon droit, & qu'il » confente que cette fille demeure en "liberté jufqu'au retour de celui » qu'elle croit être fon pere.

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Claudius feignant d'accorder avec peine ce délai, demanda qu'au moinsIcilius donnât des cautions de reprefenter le lendemain Virginie. Le peuple de tous côtez leva auffitôt les mains, & chacun s'offroit avec empreffement pour caution. Icilius touché de l'affection de fes concitoyens, après leur en avoir marqué fa reconnoiffance:,, Nous "nous fervirons demain de votre fe» cours, leur dit-il, fi Claudius ne » fe défifte pas de fon injufte pour» fuite. Mais pour aujourd'hui, j'ef"pere qu'on fe contentera de ma » caution, & de celle de tous les paра>> rens de Virginie.

Appius quoiqu'emporté par fa paffion, n'ofa refufer une telle

caution: mais craignant le retour de Virginius,il dépêcha fecretement un exprès à fes Collegues qui commandoient l'Armée, pour les prier de faire arrêter Virginius fous quelque prétexte; & du moins de ne lui point donner congé de revenir à Rome. Il fe flatoit que faute de comparoître dans le tems marqué, il feroit alors autorifé à remettre fa fille entre les mains de Claudius; mais fon courier arriva trop tard au camp. Il avoit été prévenu par le fils de Numitorius, & par un frere d'Icilius, qui avoient déja averti Virginius du peril que couroit fa fille. Et ce Romain voyant que le falut de fa fille dépendoit de fon retour à Rome, avoit obtenu fon congé, & étoit parti avant l'arrivée du courier d'Appius. Les Decemvirs n'eurent pas plutôt reçu fa lettre, qu'ils envoyerent quelques Cavaliers après lui pour l'arrêter. Appius de fon côté en avoit mis auffi dans la même vûë fur le chemin qui conduifoit au camp. Mais toutes ces précautions furent inutiles, & Virginius qui les avoit prévûës, s'écarta de la route ordinaire, & ren

tra dans Rome par une porte oppofée à celle de la Ville qui regar doit camp des Romains.

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Il parut le lendemain dans la place, penetré de douleur, & tenant par la main fa fille qui fondoit en larmes. Elle étoit accompagnée de

fes

parentes, qui repréfentoient au peuple dans les termes les plus touchans, s'il étoit jufte que pendant qu'un fi bon citoyen s'expofoit pour la défense de fa patrie, fes enfans fuffent expofez à des outrages encore plus cruels que fi la Ville étoit tombée entre les mains des ennemis. Virginius difoit à peu près les mêmes chofes à tous ceux qu'il rencontroit, & les conjuroit de prendre fa fille fous leur protection. Icilius emporté par fa paffion & par fon reffentiment, déclamoit tout haut contre la lubricité d'Appius. Mais les larmes feules de Virginie, fa jeuneffe, fes graces & fa beauté, touchoient encore plus la multitude, que les plaintes & les prieres de fa famille.

Appius n'apprit qu'avec une extrême furprife, que Virginius étoit dans la place avec fes amis & toute

fa famille. Son retour déconcertoit toutes fes mesures; & il craignoit que foutenu du peuple, il ne s'oppofât à l'execution de l'Arrêt qu'il avoit prémedité. Pour prévenir D.H. 1. 11. toute résistance, il fit defcendre du Capitole les troupes qui y étoient à fes ordres, & qui s'emparerent de la place. Il s'y rendit enfuite, & après avoir monté dans fon Tribunal avec cette émotion que lui donnoit le défir d'achever fon crime, il dit qu'il n'ignoroit pas tous les mouvemens qu'Icilius s'étoit donnez pour foulever le peuple; mais qu'il vouloit bien qu'on fçût qu'il ne manqueroit ni de forces, ni de fermeté pour châtier ceux qui entreprendroient de troubler la tranquilité publique : & là - deffus il commanda à Claudius d'expofer fa demande, & de poursuivre fon action. Claudius dit que perfonne n'ignoroit que les enfans des efclaves appartenoient à leurs maîtres; que c'étoit en cette qualité qu'il revendiquoit Virginie. Il produifit en même-tems la femme efclave qu'il avoit féduite, & qui par crainte de fon maître déclara qu'elle avoit

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