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Les terres qu'on acquéroit par de nouvelles conquêtes e les peuples voisins étoient ou vendues au profit du tréct public, ou distribuées aux pauvres citoyens, qui é payoient une légère redevance à l'état. J'ai déjà rema qué auparavant que ces habitans de la campagne venoie à la ville les jours de marché, qu'on tenoit de neuf jou en neuf jours, tant pour leurs affaires particulières qu pour assister aux assemblées. C'étoit là la plus nobl partie du peuple. Jusqu'à la fin de la république, les tri bus de la campagne ont toujours été regardées comme pla honorables que celles de la ville. C'étoit cette même parti qui faisoit la principale force de l'état, qui fournissoit de soldats et remplissoit les armées, et qui toujours conserv même des sentimens plus relevés et plus nobles multitude qui habitoit dans la ville.

que

II. Les citoyens habitant dans la ville étoient occupés divers emplois, les uns plus honnêtes, les autres moins On en trouve le dénombrement presque entier dans l Num. 15 et quatrième Catilinaire de Cicéron.

16.

1. Les caissiers du trésor : tribuni ærarii. C'étoit pa leurs mains que passoit la paie de l'armée. Ils la rece voient du questeur, et la distribuoient aux soldats.

2. Les greffiers: scribæ. La plupart des magistrats comme les questeurs, les édiles, les préteurs, en avoien toujours auprès d'eux, pour écrire les actes publics qu demeuroient en dépôt entre leurs mains. Ces deux pro fessions étoient plus honorables que les suivantes.

3. Les marchands, les négocians. Il y en avoit de deux sortes les uns qui vendoient en détail, les autres qui ffic. 1, 151. faisoient un gros trafic. Cicéron met entre eux une grande différence. «< Quant à la marchandise, dit-il, celle qui « se fait en détail, et qui n'a pas grande étendue, est sor« dide. Mais pour celle qui roule sur un grand négoce, « et qui apportant de toutes parts une grande abondance « des choses utiles à la vie, donne moyen à chacun de <«<se fournir de ce qu'il lui faut, on ne sauroit la blâmer lorsqu'elle s'exerce sans fraude et sans mensonge. Elle « n'a rien même que d'honnête et de louable, si ceux

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qui s'y appliquent ne sont pas insatiables, mais se conentent d'un gain honnête et raisonnable. >>

Il paroît que le trafic, même par mer, s'étoit déjà éta- Polyb. l. 3, à Rome sous les rois, puisque, la première année après pag. 176. r expulsion, les Romains firent un traité avec les Caraginois (que je rapporterai dans la suite), par lequel voit que le commerce des Romains s'étendoit jusque ns l'Afrique.

4. Les banquiers, soit publics, mensarii; soit particuers, argentarii.

5. Les artisans et ouvriers. Il en a été parlé.

6. Les affranchis, liberti.

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Les bas-officiers des magistrats, accensi, interpretes, ræcones, lictores, viatores. Ils étoient la plupart affranchis. On verra dans la suite de l'histoire que c'est la basse opulace de Rome qui donna bien de l'exercice aux sages êtes de la république, qui eut le plus de part aux séditions, t qui enfin dans les derniers temps, se mettant aux gages les citoyens les plus mauvais et les plus entreprenans, orrompit d'abord l'état, et ensuite contribua même beaucoup à son renversement.

Je n'ai point fait mention des chevaliers romains, qui dans la suite feront un corps séparé et très-considérable, et dont un des principaux emplois sera de lever les deniers publics sous le nom de publicani. J'aurai occasion d'en parler. Je reviens à Romulus.

§. II. Enlèvement des Sabines, et d'autres filles des peuples voisins. Romulus défait les Céniniens, et remporte les dépouilles opines. Il soumet aussi les Antemnates et les Crustuminiens. Rude guerre contre les Sabins terminée par un traité de paix. Tatius et Romulus règnent ensemble. Mort de Tatius. Romulus défait les Fidénates, les Camériens, les Veiens. Mort de Romulus. Il est honoré comme un dieu.

Rome s'étoit fort accrue en assez peu de temps, et se Enlèvement trouvoit en état de le disputer aux villes voisines les plus des Sabines.

TOM. I. HIST, ROM.

3

cap. 9-13.

Dion. P.99

111.

31.

Liv. lib. 1, puissantes. Mais comme le nombre des femmes qui s'y étoient établies étoit très-petit en comparaison de celui des hommes, sa grandeur ne pouvoit pas être d'une longue Plut. p. 25- durée. Cette ville étoit environnée de plusieurs nations d'une ancienne origine et très-belliqueuses, avec lesquelles Romulus songea à faire des alliances par des mariages, qui ont toujours été regardés comme le lien le plus capable d'unir étroitement ensemble et les familles et les peuples. Il se doutoit bien que sa proposition ne seroit pas fort bien reçue de ces nations, dont aucune n'étoit amie de Rome. Cependant, pour n'avoir rien à se reprocher, il crut devoir employer d'abord les voies de la douceur. Il envoya donc, selon l'avis du sénat, des ambassadeurs à ces peuples leur demander leurs filles en mariage pour ses sujets. Il leur fit représenter « que les villes, «< comme toutes les choses humaines, avoient de foibles « commencemens; qu'ensuite celles qui étoient soutenues « par le courage de leurs habitans, et aidées de la protec«<tion divine, se faisoient un grand nom, et s'acquéroient « une grande puissance. Qu'il étoit clair que les dieux «< avoient présidé à l'établissement des Romains; et qu'il « n'étoit guère moins évident que le courage ne leur «manqueroit point. Qu'il les prioit de se rendre favorables « à sa demande, et de ne pas dédaigner, puisqu'ils étoient << tous de même nature, de s'allier à leurs semblables.

I

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Ce que Romulus avoit prévu arriva. Sa proposition ne fut nulle part reçue favorablement : soit par mépris pour cet amas confus d'aventuriers d'une origine basse et honteuse; ou plutôt parce que ces peuples voyoient d'un œil jaloux et inquiet s'élever au milieu d'eux une puissance qui commençoit déjà à leur faire ombrage, et qui pouvoit devenir formidable à leurs descendans. Ils ajoutèrent l'insulte au refus en demandant aux ambassadeurs « pourquoi leur maître n'avoit pas ouvert aussi un asile

Urbes quoque,
ut cætera, ex in-
fimo nasci: deindè, quas sua virtus
ac dii juvent, magnas opes sibi ma-
gnumque nomen facere. Satis scire,

et

origini romanæ et deos affuisse,
non defuturam virtutem. Proindè ne
gravarentur homines cum hominibus
sanguinem et genus mis cere. Liv.

« aux femmes? que c'étoit-là le moyen de faire des mariages sortables, où de part et d'autre on n'auroit rien « à se reprocher. »>

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Get outrage piqua Romulus jusqu'au vif: mais il dissimula son ressentiment. Il fit publier qu'il avoit dessein de célébrer une fête et des jeux solennels en l'honneur de Neptune équestre, appelé autrement Consus, et il fit inviter les villes voisines à cette cérémonie, qui fut accompagnée de toute la magnificence dont ces temps-là étoient capables. La curiosité et le désir de voir la nouvelle ville y attirèrent une multitude extraordinaire de spectateurs. Les Céniniens, les Crustuminiens, et les Antemnates, qui étoient les peuples les plus voisins, s'y rendirent des premiers. Les Sabins de Cures y vinrent en foule avec leurs femmes et leurs enfans. Ils furent généralement reçus avec toutes les démonstrations possibles de bonté et d'amitié. Chaque citoyen se chargea de son hôte, et le régala le mieux qu'il put. En considérant les édifices tant particuliers que publics, et les murailles de la ville, à peine pouvoient-ils comprendre comment elle avoit pu, en si peu de temps, prendre de si considérables accroissemens. Quand l'heure du spectacle fut venue, et que les esprits aussi-bien que les yeux en étoient totalement occupés, la jeunesse romaine, au signal dont on étoit convenu, se répandit de tous côtés, et enleva toutes les filles des étrangers sans choix et sans distinction. Une d'entre elles, étoit d'une rare beauté, ayant attiré sur elle tous les regards, on cria qu'elle étoit destinée à Talassius, jeune Romain d'une des premières familles de Rome; et le nom de Talassius, répété alors plusieurs fois, devint dans la suite une acclamation usitée pour la cérémonie des noces. Les pères des filles enlevées, pleins de colère et de menaces, sortent de la ville implorant les dieux vengeurs des droits sacrés de l'hospitalité, et Neptune surtout, dont on avoit fait servir la fête à l'exécution d'une si noire et si

a Romulus, quelque temps auparavant,avoit fait courir le bruit qu'il avoit trouvé sous terre l'autel d'un certain

qui

dicu surnommé Consus, ou dieu des conseils. Plut. in Rom. p. 25.

AN. DE R. 4.
Av. J.C. 748.

Guerre de Romulus contre

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criminelle perfidie. La douleur et l'indignation des filles n'étoient pas moins vives, ni moins justes. Romulus tâchoit de les consoler en leur représentant « que son des<< sein n'avoit pas été de leur faire violence: 'qu'elles ne pouvoient raisonnablement s'en prendre qu'à leurs pères, qui avoient rejeté ses propositions avec hauteur et du« reté que souvent une injure passagère donnoit lieu à « une plus tendre et plus durable amitié: qu'il les prioit « de se calmer, et de vouloir bien donner leurs coeurs à <<< ceux que la fortune avoit rendus maîtres de leurs per<< sonnes. » Les jeunes Romains de leur côté, s'excusant de ce qui étoit arrivé sur leur passion et leur amour, s'efforçoient de les gagner par leurs caresses et par toutes sortes de bons traitemens.

Le nombre des filles qui furent ainsi enlevées montoit à près de sept cents. On croit que cet enlèvement arriva la quatrième année du règne de Romulus. Afin d'éloigner toute image de rapt et de violence, Romulus voulut qu'on observât pour ces mariages les cérémonies qui se pratiquoient dans les villes d'où étoient ces jeunes personnes, mais surtout celles de la société pour le feu et l'eau; cette dernière subsista à Rome pendant plusieurs siècles.

Déjà les nouvelles épouses, gagnées par les bons traitemens et les complaisances de leurs maris, commençoient à s'adoucir, et à s'accoutumer à leur changement d'état. Mais le ressentiment de leurs pères augmentoit de jour en jour. Ils ne respiroient que guerre et que vengeance. Outrés de dépit, et pénétrés de douleur, ils alloient de ville en ville, les larmes aux yeux, implorer l'assistance de leurs voisins.

Les Céniniens trouvèrent que ce secours venoit avec les peuples trop de lenteur; et pendant que les autres perdoient, à leur

voisins.

Patrum id superbia factum, qui connubium finitimis negassent. Mollirent modò iras ; et quibus fors corpora dedisset, darent animos. Sæpè ex injuriá postmodùm gratiam or

tam.

a Dans les traités et dans les ma

riages on se mettoit en société de feu et d'eau pour marquer une parfaite union. Par la raison des contraires, pour exclure quelqu'un de la société publique, on lui interdisoit le feu et l'eau.

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