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maniere qu'elles fe voyent & qu'elles couvrent le front, les flancs, & même les derrieres du camp. Leur diftance de l'armée doit être plus ou moins grande felon le pays où l'on eft, ordinairement à la portée du canon, ou à un bon quart de lieue du camp, & un peu plus si le pays eft bien ouvert.

Si on n'a à craindre l'ennemi que d'un côté, on y pourra pofter la moitié ou les deux tiers de la cavalerie de garde, dont celui qui la commande détachera la huitième partie fept ou huit cens pas en avant du côté de l'ennemi, fur quelque éminence s'il s'en trouve, d'où l'on pouffera encore en avant des vedettes, de maniere cependant quelles ne puiffent pas être coupées entr'elles & le corps de garde avancé (a), ni le corps de garde avancé entre lui & le grand, ni le grand corps de garde entre lui & le camp.

(a) Après la prife de Damiette, les Croifés ne pouvant agir que le débordement du Nil ne fûr paffé, négligerent fi fort de fe retrancher, que les Arabes venoient la nuit couper la tête aux foldats chrétiens jufques dans leurs tentes; on y remédia en postant des gardes avancées autour du camp.

De là certains Auteurs prétendent tirer l'origine de ces fortes de gardes, vraisemblablement de beaucoup plus anciennes.

Le Maréchal de camp ou le Maréchal des logis de l'armée fépare & difpofe le refte de la cavalerie de garde autour du camp, en autant de corps, plus ou moins forts, qu'il le juge à propos, qui détachent auffi en avant des petits corps de garde pour plus grande sûreté, avec des vedettes vers l'ennemi, pour avertir & prévenir les furprifes.

En pays couvert le grand corps de garde de cavalerie fera placé fi près du camp, qu'il ne puiffe être coupé, mais auffi affez éloigné pour lui donner le temps de prendre les armes fi l'ennemi paroît. Il jettera auffi d'autres petits corps de garde de cinq ou fix maîtres fur la droite & fur la gauche, qui poufferont encore devant eux des vedettes; ces petits corps de gardes avancés ne mettront point pied à terre, à moins qu'ils ne foient en lieu fort ouvert, mais ils ne débrideront jamais; il vaut mieux les faire relever deux ou trois fois dans les vingt-quatre heures.

Quant au grand corps de garde, le Commandant, pour faire repofer & repaître les hommes & les chevaux, laiffera mettre pied à terre pendant deux heures au premier ou au dernier rang de fa troupe, qu'il fera enfuite remonter à

cheval pour donner le même repos de deux heures au rang qui fuit, & ainfi alternativement de l'un à l'autre jufqu'à fa garde finie.

Dans un pofte important, le Commandant du corps de garde avancé a l'attention de doubler les vedettes, avec ordre de s'avancer, l'un vers la troupe qu'ils voyent ou entendent venir, pour la reconnoître, & l'autre vingt ou trente pas vers le corps de garde, afin que fi le premier vedette n'arrêtoit pas ce monde qui vient, & qu'au contraire il en fût pouffé, l'autre puiffeavoir le temps d'avertir le petit corps de garde, & celuici le grand, tirant même fa carabine ou fon piftolet en courant pour le faire entendre plutôt & donner l'alarme.

Si ces vedettes avancés voyent la nuit du feu, & le jour de la fumée ou de la pouffiere; fi elles entendent aboyer des chiens plus qu'à l'ordinaire, ou tirer des coups de fufils, ou quelque bruit de tambour ou de trompette,&c.elles en doivent fur le champ donner avis au Commandant du petit corps de garde avancé, qui envoie des batteurs d'eftrade de ce côté-là pour reconnoître ce que c'eft, & un cavalier au grand corps de garde l'en avertir.

Le Commandant en chef d'une garde

ne doit pas s'écarter un feul inftant de fon pofte, parce que l'ennemi pourroit venir pouffer brufquement les vedettes, furprendre le petit corps de garde avancé, le forcer lui-même & fa garde, & entrer pêle-mêle dans le quartier ou camp, principalement s'il fe rencontroit que les avenues n'en fuffent ni coupées ni gardées par l'infanterie; ce qui n'arrivera jamais à celui qui aura foin d'envoyer de temps en temps des coureurs en avant du côté des ennemis, & fur les flancs, pour traverfer d'un corps de garde à l'autre, & découvrir fi l'ennemi ne fe couleroit pas entre deux : voici la maniere de les envoyer.

Le Commandant de la garde détache des cavaliers des mieux montés & des plus judicieux, leur donne un mot ou un fignal pour fe reconnoître, en cas qu'ils viennent à fe rencontrer. Car ils ont ordre de fe féparer un à un ou deux à deux, fuivant les différens chemins qu'ils trouveront à leur droite ou à leur gauche, marchant en grand filence, & s'arrêtant de temps en temps pour écouter s'ils n'entendroient pas des gens marcher à eux; ils s'avancent jufqu'à un quart & demi- lieue plus ou moins, felon qu'il eft utile & néceffaire, & que le pays eft ouvert ou mêlé.

S'ils apperçoivent ou entendent les ennemis, ils font enforte fans en être vûs > s'il fe peut, d'en connoître le nombre, pour, fans perdre de temps, s'en revenir en avertir la garde, dont le Commandant en envoie donner avis aux Généraux.

S'ils étoient fi loin lorfqu'ils découvrent l'ennemi qu'ils ne puffent arriver de quelque temps au corps de garde, ou que les ennemis y puffent arriver auffitôt qu'eux par la diligence qu'ils font, ils doivent pour lors s'écarter du chemin où les ennemis font en marche, par & aller en diligence mettre le feu à quel que maifon ou endroit qui puiffe être vu des vedettes, & pour amufer les ennemis qui n'auront garde de paffer outre fans l'avoir reconnu; ou ils fe hâteront de gagner quelque hauteur ou endroit, d'où le bruit de leurs armes puiffe être entendu des vedettes & du corps de garde, la nuit principalement que le moindre bruit s'entend de loin.

Par ce moyen le Commandant de la garde averti de l'approche des ennemis, ordonnera à fon Maréchal des logis de s'avancer avec une partie ou tout le petit. corps de garde jufqu'au pofte des vedettes, ou plus avant s'il le juge à propos,

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