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Pendant qu'il avoit été occupé à ce fiége, des brigands L'an 1400. d'Ableftain (a) ayant enlevé quelques foldats Tartares, il Tamerlan. réfolut d'en tirer vengeance, & envoya à cet effet le Mirza Scherfeddin Schah rokh avec un corps de troupes dans ce pays. Les Turkomans fe retirerent dans les montagnes, où on les pourfuivit, & les Tartares revinrent au camp chargés de dépouilles. Tamerlan alla enfuite attaquer Malathie qui avoit refufé de fe rendre ; il s'en empara, & fit faire des ravages dans tous les environs jufqu'au château de Kakhta. Après cette expédition il entra en Syrie qui. appartenoit alors à Faradge, Sulthan d'Egypte. Barkok, pere & prédécefseur de ce Prince, avoit fait mourir un Ambaffadeur que Tamerlan lui envoyoit. Faradge lui-même avoit traité de la même façon de nouveaux Ambassadeurs Tartares. En conféquence Tamerlan, à la tête d'une armée nombreuse, alla prendre (6) Bahasna (‹), Aïntab, Alep, Hemesse, Hama, Baalbek; il remporta une grande victoire auprès de Damas, & s'empara de cette ville. Il quitta enfuite ce pays, entra dans celui des Ortokides, & fit le fiége de Maredin. Le Prince qui y régnoit, avoit refufé de venir au devant de lui, quoique Tamerlan l'eût rétabli autrefois dans cette ville. Le Conquérant Tartare se borna à brûler toutes les maisons de la baffe ville, & ne put prendre le château qui étoit fitué fur un roc inacceffible, au haut duquel il y avoit une plaine qui produifoit des grains, & fourniffoit de l'eau autant qu'il en étoit néceffaire pour entretenir la garnison. Il détacha de-là quelques troupes qui allerent faire de nouvelles courfes en Géorgie, pendant qu'il alla prendre la ville de L'an 1401. Bagdad (d).

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Tamerlan fe rendit enfuite à Tauriz, & fut inquiété en chepar les Kurdes qui enlevoient tous les foldats qui ofoient s'écarter du gros de l'armée. La nouvelle qu'il apprit alors que Bajazet avoit pris Arzendgiane, & qu'il s'avançoit du côté de l'Orient, l'obligea d'envoyer en diligence le Mirza

(a) On le nomme encore le pays de Zoulcaderia.

(b) Il faut voir ces détails dans l'Hif toire des Mameluks.

(c) Le 7 de Sepher de l'an 803 de l'Hegire.

(d) Le 27 de Dzoulcaada de l'an 803 de l'Hegire.

Schah

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Schah rokh pour aller au fecours de ce pays; mais Schah
rokh ayant rencontré en chemin le neveu de Taharten qui L'an 1401.
venoit faire des propofitions de paix de la part de Bajazet, Tamerlan.
il n'alla pas plus loin ; & Taharten fe rendit auprès de Ta-
merlan pour l'engager à y confentir. Il le trouva en route
pour une nouvelle expédition en Géorgie. Tamerlan, à la
priere de Taharten, voulut bien oublier ce que Bajazet avoit
fait, & entra dans la Géorgie. Le Roi Giorgi envoya au-
devant de lui fon frere chargé de préfens, & fauva par-là
fon pays des nouveaux malheurs dont il étoit menacé. Ta-
merlan revint paffer l'hyver à Carabagh (a), d'où il en-
voya des partis qui ravagerent les Etats du Sulthan de Bag-
dad & le Kurdistan.

Informé alors que Bajazet avoit donné retraite à Cara-
jofeph, Prince des Turkomans, il envoya un Ambaffadeur
vers ce Prince pour lui reprocher fa conduite, & s'occupa
pendant ce tems-là à faire creufer un ancien canal, dans le-
quel les eaux de l'Araxe fe déchargeoient; il s'étoit comblé
depuis long-tems, & la plupart des levées étoient détruites.
Ce qui en reftoit le détermina à le faire rétablir. Dans l'ef-
pace d'un mois on conduifit le canal jusqu'à dix lieues, &
on lui donna affez de profondeur pour qu'un batteau pût y
naviger (b). Il le fit appeller Nahar berlas, ou la riviere de
Berlas. Il étoit alors fort inquiet fur la guerre qu'il alloit
entreprendre: la puiffance des Ottomans & les fatigues que
fes troupes avoient fouffertes depuis long-tems, l'éloignement
où il étoit de fon pays, lui faifoient craindre que fes foldats ne
s'oppofaffent à fes deffeins. En effet fes Officiers qui n'étoient
pas d'avis qu'on entreprît cette nouvelle guerre, chargerent
un d'entre eux qui lui parloit avec liberté de l'en détourner, &
de lui repréfenter que les aftres même annonçoient qu'elle
ne feroit pas heureuse pour les Tartares. Tamerlan leur ré-
pondit en apoftant un Aftrologue qui foutint le contraire,
& il partit enfuite de fes quartiers d'hyver (c). Il fit cependant L'an 1402.

(a) Le 22 de Rabi elakher de l'an 804 de l'Hegire.

(6) Le lieu où il commence eft appellé Surcapile, & celui où il rentre Tome IV.

dans l'Araxe, Kiofchke tchengischi.
(c) Le 13 de Redgheb de l'an 804 de
l'Hegire.

I

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L'an 1402.

écrire à Bajazet, pour l'engager à remettre à fes Lieutenans la fortereffe de Kemac, promettant de ne point enTamerlan. treprendre la guerre s'il y confentoit. Il prit en route une place nommée Tartoum, d'où plufieurs Géorgiens qui s'y étoient retirés, faifoient des courses dans tout le voisinage. Il alla enfuite vers le château de Kemac, à peu de distance d'Arzendgiane, fitué fur un rocher escarpé. Il en forma auffi-tôt le fiége. On y grimpa avec des échelles de corde, & cette place fut forcée, malgré la réfiftance des ennemis. On reçut alors la réponse de Bajazet qui étoit, comme les précédentes, pleine de fierté & de hauteur. Tamerlan fit la revue de fes troupes dans la plaine de Siouas, où il s'occupa à prendre la fortereffe de Harouc fituée dans le voisinage.

Pendant que l'armée Tartare étoit campée dans les environs de Siouas, on apprit que Bajazet étoit arrivé à Tocat avec des troupes nombreuses, & qu'il s'étoit faifi du paffage de la riviere Kizil-irmac. Cette nouvelle obligea Tamerlan de prendre par le Midi de l'Anatolie, & d'aller à Céfarée de Cappadoce, où il féjourna pendant quelque tems. Il fit quartier à tous les habitans, mais il s'empara de toutes les moiffons qui étoient encore fur pied pour l'approvifionnement de fon armée. Il fe mit enfuite en marche pour aller à Ancora. Lorfqu'il fut arrivé à Kirfcheher, on lui annonça que l'on commençoit à découvrir l'armée de Bajazet. Il fit faire autour de fon camp un foffé qu'il fortifia de boucliers & de paliffades. Il détacha enfuite fes coureurs qui furpri rent ceux de Bajazet, & les taillerent en piéces. Il s'approcha d'Ancora, devant laquelle il campa avec fon armée il étoit fur le point de s'en rendre maître, lorfque fes coureurs vinrent lui apprendre que Bajazet s'avançoit à grands pas pour furprendre fon arriere-garde. Il leva le fiége à la hâte, & fe retira après avoir fait corrompre les eaux d'une fontaine, près de laquelle les Ottomans devoient paffer. Son deffein étoit de les fatiguer ainfi par une longue marche. 11 fe prépara enfin au combat, fe mit à la tête du corps de réferve, & fortifia fon front avec plufieurs éléphans qu'il avoit amenés des Indes ; ils portoient des tours, dans lefquelles étoient des archers & des gens qui jettoient des feux Gré

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geois. Les Ottomans fe rangerent également en bataille. On fçait quel fut le fort de cette grande journée, Bajazet L'an 1402. fut vaincu & fait prifonnier; il parut devant le Conquérant Tamerlan, les mains liées, Tamerlan les lui fit délier, lui donna une vefte magnifique, & le fit mettre dans une tente particuliere. Après cette grande victoire, Tamerlan fe rendit maître d'Ancora, envoya des partis de tous côtés vers Brusse Iconium, Akscheher, Carahifar, Olaya, Satalie, & fit dreffer une relation de cette conquête, que l'on diftribua dans toutes les provinces de fon Empire. En fix jours il alla à Souri-hiffar, enfuite à Kouthaïa ou Cothiée, où il demeura pendant un mois. Il y donna de grandes fêtes à toute fa Cour à l'occafion de fes victoires. Le Mirza Mohammed fulthan avec trente mille cavaliers avoit fait une diligence incroyable pour fe rendre à Bruffe, mais Mufulman tchelibi, fils de Bajazet, l'avoit prévenu, & avoit enlevé tous les tréfors de cette capitale de l'Empire Ottoman. Les habitans s'étoient auffi retirés avec tous leurs effets dans le mont Olympe; cependant on en arrêta plufieurs : on prit la femme & les deux filles de Bajazet avec la fille d'Ahmed, Sulthan de Bagdad, qui s'étoient cachées dans une maifon d'Yegni fcheher; le Turkoman Carajoseph s'étoit fauvé à Hella, & de-là dans le defert d'Arabie. On ne laiffa pas de trouver encore dans Bruffe beaucoup de richesses dont on s'empara, & on mit le feu aux maifons. Les Tartares s'avancerent jufqu'à Nicée, & au bord de la Mer, tuant & pillant tout ce qu'ils rencontroient. On vouloit prendre Mufulman tchelibi, mais il s'étoit fauvé en Europe. Le Mirza Sulthan houssain fit des courses d'un autre côté vers les parties méridionales de l'Anatolie, & s'empara d'Akschcher, de Carahifar, exigea par tout des contributions, & s'arrêta à Iconium, pendant que fes détachemens allerent ravager le pays d'Aïdin.

Tamerlan traita avec beaucoup de bonté Bajazet, & lui donna, pour le confoler, l'inveftiture du Royaume de l'Anatolie, fans cependant lui rendre la liberté. Enfuite il fit fommer (a) le Sulthan d'Egypte de fe foumettre, & de faire

(a) L'Ambaffadeur chargé de cette commiffion, partit le 1 de Rabi elaoual de l'an 805...

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L'an 1402.

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faire la priere publique en fon nom dans tous fes Etats. Il fit demander un tribut à l'Empereur de Conftantinople qui Tamerlan. lui envoya des Ambaffadeurs, & parut confentir à cette impofition. Le Sulthan Mahmoud khan qui portoit le titre d'Empereur du Zagatai, & qui étoit allé faire des courses, mourut dans cette expédition. Pendant que Tamerlan noit fes quartiers d'hyver dans ces provinces, il fut informé des richeffles & de la force de la ville de Smyrne, dans laquelle un grand nombre d'Européens fe rendoient pour y exercer le commerce. Il ne tarda pas de prendre la réfolution de s'emparer d'une ville dans laquelle il espéroit de faire un grand butin, & qui étoit encore entre les mains des Grecs. Il fit raffembler tous fes corps de troupes, avec lefquels il arriva devant Smyrne (a). Il l'attaqua du côté de la terre ferme, éleva plufieurs machines, avec lesquelles on jettoit des marmites pleines de feux Grégeois. Schah melik, un de ses Généraux, fit conftruire dans l'eau plufieurs échafauts, fur lefquels il mit des planches, & ferma par ce moyen, la communication par mer avec le château. Les affiégés de leur côté ne ceffoient de jetter des fleches en roue, des marmites de nafte, du feu Grégeois, des fleches en fufées & des pierres. Mais les machines des affiégeans ayant fait une breche confidérable, les Tartares entrerent dans Smyrne : tous ceux des habitans que l'on rencontra furent tués, les maisons & le château furent rafés, & les décombres jettés à la mer. Des vaiffeaux qui venoient d'Europe pour secourir cette place, apprirent ce malheur par plufieurs des têtes des Grecs qu'on leur lança, & par les ruines qu'ils apperçurent. Tamerlan n'avoit employé à cette expédition que quinze jours, quoique Bajazet l'eût tenue affiégée pendant sept ans.

Après que Tamerlan fe fût rendu maître de Smyrne Mufulman tchelibi, fils de Bajazet, lui envoya des Ambaffadeurs, pour l'affurer qu'il fe foumettoit entiérement à lui, & obtint, par cette démarche, d'être confirmé dans la fouveraineté du pays d'Ifra-yaca ou de la Turquie en Europe.

(4) Un famedi 6 de Dgioumadi elaoual de l'an 805 de l'Hegire.

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