Je te le dis tout net, & le déclare, J'ai réfolu d'effayer de la mare, Dis fur cela tout ce que tu voudras,
Que l'on le fçache, ou ne le fçache pas, Ce m'eft tout un; il iroit de ma vie,
Que je voudrois en passer mon envie. Vraiment, Madame, eft-ce donc fi grand cas, Dit Janneton ? Pourquoi tant de myftere ? Je m'en doutois; vous êtes bonne auffi De vous troubler & prendre du fouci : Vous le voulez ? Et bien il faut le faire. Premierement Monfieur n'eft
Qui vous verra? Perfonne, je l'affure : Quitte, après tout, à perdre la gageure;
Le grand malheur ! en mourrez-vous de faim? Contentement paffe richeffe enfin.
Mais non, fi bien nous ourdirons la trame Que vous aurez le plaifir & le gain. Vas Janneton, tu vaux trop, dit la Dame ; Ne mettons point la partie à demain.
Sur ce propos on s'ajufte, on s'agence, Et vers la mare on marche en diligence, A beaux pieds nuds, & pantoufles en main. La Dame alloit la premiere & bon train,
Et Janneton faifoit l'arriere garde. Chemin faifant, l'on obferve avec foln, S'il n'eft point là de mouchard qui regarde, Nul ne paroît, & Monsieur est bien loin. Les pieds brûloient, d'abord on en hazar de Un dans le lac, pour fonder le terrain; On le retire, & l'autre prend sa place, Que tout de même on retire soudain. Pour faire court, après quelque grimace, Tous deux de fuite, on vous les plonge à plein Jufqu'à la vafe, où gîtoit la grenouille. Dieu fçait la joye! On s'en donne à loifir; On est à même, on tripote, on patroüille Et jamais bain ne fit tant de plaisir.
Durant cela l'Epoux, ne vous déplaise, De fon reduit voyoit le tout à l'aise, Et fe fçavoit très-bon gré dans le cœur, De n'avoir point mis à plus forte épreuve Une vertu fi fragile & fi neuve : Il en pouvoit arriver du malheur.
Il en frémit, & fur cette pensée,
Croyant l'affaire affez avant pouffée,
Sort vers la Dame, avec un ris mocqueur. Un revenant eût fait moins de frayeur,
Et vîte & vîte, on fe fauve, on detalle,
Mais à pieds nuds, l'on ne court pas fi fort, Le mari joint la Dame dans la falle; Hé bien, dit-il, dès le premier abord, Que pensez-vous de la pomme fatale ? Eve, à prefent, a-t'elle fi grand tort ?
VIII. O DE A MARS
SUR LA NAISSANCE DE MONSEIGNEUR LE DU C
DE BRETAGNE*.
Oi que tout le monde déteste,
Cruel Dieu des fanglans combats,
Qui te fais un plaifir funefte Du renversement des Etats; Dans le fouci qui m'intereffe, Mars, c'eft à toi que je m'adresse, Sufpens ton courroux rigoureux; Quand devant toi tout fuit, tout tremble, Il doit t'être affez doux, ce femble, Que j'ofe t'adreffer des vœux.
Je fçai qu'à ceux que je vais faire Ton cœur d'abord va s'allarmer; Peut-on efperer de te plaire, En tâchant de te défarmer? Garde-toi de m'en faire un crime, C'est ton intérêt qui m'anime Mon zele cherche à te fervir; Et fi tu confens à m'entendre, Tu t'emprefferas de nous rendre Les armes qu'on te veut ravir.
ODE GALLICE AD MARTEM IN NATALIBUS
SERENISSIMI
BRITANNIA DUCIS
INTERPRETATIO.
Nvifum populis atque exitiabile Numen, Bellorum dire inventor, quem funditùs alta Dejeciffe juvat fatali turbine regna;
Hic ego te fupplex, nec curâ preffus inani Armipotens compello ! atros fufpende furores, Et profit quod dum gladios flammafque ferentem Attonitæ fugiunt gentes, ego pronus ad aras Te venerer, votifque vocare haud territus aufim.
Illa quidem vultu primum indignatus acerbo
Excipies reor; ecquis enim te fperet amicum,
Dum tibi de manibus tentat convellere tela? Ne tamen hoc habeas fufpectum nomine vatem Infidiafve tibi blandâ fub voce parari
Credideris, decus ipfe tuum, tua commoda curo: Tantùm audi, quodque invito pia cura laborat Extorfiffe manu ferrum, fponte ipfe remittes.
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