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AN. 1513.

CV. L'Alviane &

battus par l'ar

jusqu'à la Marghera, petit bourg fur le bord des Lagunes, d'où l'on découvre la ville de Venife, fur laquelle le viceroi fit tirer quelques volées de canon qui porterent jufqu'à un couvent de Dominiquains qui n'eft qu'à un quart de lieuë de la ville. Les troupes fe partagerent par quartiers, & firent un butià confiderable: après avoir pillé plusieurs bourgs, elles penferent à fe retirer; mais la retraite n'étoit pas aifee, le fénat irrité d'une conduite fi barbare, où le pillage fut le moindre mal que les peuples éprouverent, manda à l'Alviane de tirer les garnifons des trois places qu'il s'étoit réfervées, & de venir fondre fur les ennemis. Ce general toujours impatient de combattre, affembla fes troupes, & fe mit aux trouffes de l'armée des confedérez, qui fentit de quelle importance il lui étoit d'avoir fait provifion de vivres, en ce que d'un côté, elle n'en trouvoit pas fur la marche, & que de l'autre fes troupes étoient fi refferées par celles des ennemis, & par les païfans, qu'aucun foldat ne s'en détachoit fans être tué ou fait prifonnier.

Le parti que prit Cardonne fut de gagner les montaBaglioné font gnes pour prendre par le chemin de Roveredo le haut mée Espagnole, de l'Adige & defcendre enfuite àVerone. Il délogea donc Mariana, 1.30. dès la pointe du jour; & l'Alviane ne s'en apperçut que

2.98.

quelque tems après, à cause d'un broüillard fort épais. Dès qu'il en fut affuré, il fe mit en marche, & atteignit les ennemis avant qu'ils euffent fait deux milles, & les deux armées en vinrent aux mains, fans qu'on fache laquelle des deux commença l'attaque; ce fut le feptiéme d'Octobre, la cavalerie des Venitiens rompit d'abord celle qui lui étoit oppofée; mais elle la poursuivit trop Join, & ce fut la caufe de fon malheur. Les deux infan

teries ne furent pas plûtôt en présence, que les fantalins Venitiens ne voyant point de cavalerie pour les foûtenir, lâcherent le pied, & quoiqu'il y eût apparence que la bataille feroit long-tems difputée, elle dégénera bien-tôt en une déroute. La défaite fut si generale qu'il y eut très peu de Venitiens qui en échapperent;le bagage & l'artillerie demeurerent au pouvoir des Efpagnols. Quatre cens hommes d'armes & quatre mille hommes de pied refterent fur la place. Baglioné demeura prifonnier avec le provediteur Loredano. L'Alviane eut bien de la peine à se sauver à Padouë, & Gritti ne fe crut point en fureté qu'il ne fût à couvert des murailles de Trevife.

La confternation ne fut pas fi grande à Venife qu'on l'auroit pensé à la nouvelle de la perte de cette bataille. La république bien-loin de blâmer l'Alviane, lui députa deux des plus confiderables de fon corps pour lui faire compliment fur fa bonne conduite, qui dans une occafion où fon armée devoit perir toute entiere, en avoit fauvé une partie : cette journée ne laiffa pas toutefois d'être auffi funefte aux Venitiens qu'elle fut avantageufe aux Efpagnols; car depuis ce tems-là tout plia, rout fe foumit aux victorieux. Vicence leur ouvrit fes portes, & le viceroi y laiffa repofer & rafraîchir fes troupes pendant quelques jours. Le château de Bergame, qui jufques-là étoit demeuré fidele à la république, fut forcé par les Espagnols qui s'en rendirent maîtres. Ils remirent en liberté Paul Baglioné, à condition qu'il s'obligeroit par ferment de revenir dans fa prison, fi les Venitiens en échange pour lui, ne relâchoient Alphonfe de Carvajal pris par l'Albanois, Mercurin au siege de Padouë; mais Carvajal mourut dans sa prison ;

AN. 1513.

CVI. Progrès des

Espagnols après le gain de Mariana, lib.

cette bataille.

30. n. 99.

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& Baglioné ne revint pas dans la fienne,fe croyant par la mort de l'autre difpenfé de fon ferment. Enfin le château de Milan,après un fiege long & opiniâtre, fut contraint de fe rendre par compofition le vingtième de Novembre. Celui de Cremone fuivit le même exemple. Ainsi les François obligez de fortir du Milanez, & d'abandonner toute la Lombardie, ne conferverent que le fort de la Lanterne, qui tenoit la ville de Genes en refpect, & qui incommodoit fort les Genois.

Pendant que ces chofes fe paffoient en Italie, Henri VIII, roi d'Angleterre fe préparoit à venir en France avec une nombreuse armee. C'étoit en confequence de la ligue faite à Malines entre les alliez & ce prince, qui fut conclue le cinquième d'Avril par Marguerite d'Autriche gouvernante des Pais-bas, autorifce de l'empereur fon pere, & les ambaffadeurs d'Angleterre,laquelle ligue devoit être enfuite approuvée & ratifiée par le pape, par l'empereur & par le roi Catholique. Les conditions étoient I. que dans trente jours après la fignature du traité, chacun des confederez déclareroit la guerre au roi de France, & la lui feroit hors de l'Italie ; le pape en Provence, ou en Dauphiné; l'empereur en quelque autre endroit ; le roi d'Arragon en Bearn, ou en Guïenne; le roi d'Angleterre en Normandie ou en Picardie, II. Que le pape publieroit des cenfures contre tous ceux qui s'opposeroient à cette ligue. III. Que pour les frais de la guerre Henri VIII, feroit compter à l'empereur cent mille écus d'or en trois termes, au moment de la déclaration de la guerre, quand elle feroit commencée & trois mois après. IV. Que l'empereur & le roi d'Angleterre ratifieroient le traité dans un mois ; le pape & Le roi d'Arragon dans deux mois, avec cette claufe,

que

fi ces deux derniers ne le faifoient pas dans le tems marqué, le traité subsisteroit toûjours entre l'empereur & AN. 1513. le roi d'Angleterre. V. Enfin, que les confederez renonceroient à toute exception, quelle qu'elle pût être, & particulierement à celle qu'on pourroit former fur ce qu'un autre auroit ftipulé pour eux. Ce traité ayant

été porté à Londres, Louis de Carroz de Villaragud ambaffadeur de Ferdinand, le ratifia par des lettres patentes du dix-huitiéme d'Avril, & le vingt-cinquiéme du même mois en jura l'obfervation au nom de Ferdinand roi d'Arragon, & de Jeanne reine de Caftille.

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Action entre les deux flottes

Angloire & Françoife, l'amiral Anglois

Mem.du Bellai

1.1.

D'Argentré, hift.de Bretagne.

Avant que le roi d'Angleterre fût prêt à passer en France, il y eut fur mer une action affez importante. Dès le mois d'Avril l'amiral Howard s'étoit embarqué avec trente-deux vaisseaux de guerre, pendant que y périt la flotte Françoise se tenoit à Breft, où elle attendoit le commandeur Prégean de Bidoux gentilhomme de Guienne, qui avoit ordre de paffer de la méditerranée dans l'ocean avec fix galeres. L'amiral Anglois s'étant approché de Brest, étoit résolu d'attaquer les vaiffeaux François qui étoient à l'ancre; mais l'avis qu'il reçut que Prégean étoit arrivé au conquêt, le fir tourner de ce côté-là, pour tâcher de fe rendre maître des fix galeres. Il les attaqua en effet; Prégean se défendit vaillamment, nonobstant l'inégalité de ses forces; la galere qu'il montoit fut accrochée par le vaiffeau de l'amiral, qui y entra l'épée à la main, & y caufa beaucoup de défordre; mais la galere s'étant dégagée, il y de demeura peu accompagné, & comme il n'etoit pas con- in nu, il fut jetté dans la mer à coups de fponton : il reçut pendant le choc une bleffure dont il mourut peu de jours aprés. La flotte Angloife n'ofa continuer le comTome XXV.

Qq

Price

Daniel, hifi.

fol. p. 1900.

Vie de Louis XI'

bat, & fe retira dans un port d'Angleterre en attendant AN. 1513• un autre amiral, qui fut Thomas Howard frere du deffunt. Prégean alla tenter une defcente en Angleterre dans la province de Surrei, d'où il emporta quelque butin, il fut poursuivi à son retour par cinq vaiffeaux. Anglois, qui furent obligez de prendre le large, & vinrent faire une descente en Bretagne, où ils brûlerent plufieurs villages. A la hauteur de faint Mahé, la flotte Angloife de quatre-vingt vaisseaux vint attaquer celle de France, qui n'étoit que de vingt, le dixième d'Août;, on fe canonna long-tems de part & d'autre. Après quel que tems d'un cruel combat, le feu ayant pris aux poudres de l'amiral François, il fauta en l'air, & creva en fautant l'amiral Anglois, qui coula à fond. Après cet accident les deux flottes fe féparerent..

CIX.

rolianne par les

* Mariana, l.

ce fiege au com

mencement du. mois d'Août. Belcarius, l. 14.

Bafel addit. ad Naucler. Guicciard. l. 12.

Le roi d'Angleterre commença à faire paffer une parSiege de Ter- tie de fon armée à Calais dès le mois de May, & fes, Anglois. troupes eurent ordre d'en partir le dix-feptiéme de Juin 30. n. 94. place fous le commandement du comte de Shrewsbury & du Lord Herbert, pour aller faire le fiége de Teroüanne. L'empereur avoit perfuadé à Henry de commencer Polyd.Virg. 127. par ce fiége, parce qu'il trouveroit dans ces villes les clefs des autres que fes prédeceffeurs avoient poffedées deçà de la mer, & que les François n'ayant plus d'armée à lui oppofer, il n'auroit qu'à paffer avec la fienne de laPicardie dans la Normandie pour en recevoir l'hommage. Ce prince n'arriva à Calais que le trentiéme de Juin accompagné de Thomas Volfey fon premier miniftre, de Charles Brandon fon favori & d'autres fei-gneurs. Pendant que ses troupes continuoient le fiége de Terouanne, il fe tenoit à Calais avec un corps de Heuf mille hommes, prêts à marcher au premier befoin;

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