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applaudiffoit hautement au deffein généreux qu'il avoit formé de venger la mort de Pertinax. Il étoit du devoir de tout Général Romain de punir un vil Ufurpateur ce qui pourroit le rendre criminel (1), feroit de continuer à porter les armes, & de fe révolter contre un Empereur légitime, reconnu folemnellement par le Sénat. On retenoit à Rome les enfans de tous les Commandans de provinces, comme des gages de la fidélité de leurs parens (2). Maître de la Capitale, Sévère fit élever avec le plus grand foin les fils du Gouverneur de Syrie, qui étoient entre fes mains ; &

tromper tous deux. Sévère porta cependant l'hypocrifie fi loin, que, dans les Mémoires de fa vie, il affure avoir eu réellement l'intention de les défigner pour les fucceffeurs.

(1) Hiftoire, Augufte, p. 65.

(2) Cette pratique, imaginée par Commode, fut très-utile à Sévère, qui trouva dans la Capitale les enfans des principaux partifans de fes rivaux, & qui s'en fervit plus d'une fois pour intimider fes ennemis, ou pour les féduire.

il leur fit donner la même éducation
qu'à fes propres enfans, tant que la puif-
fance de Niger inspira de la terreur ou
même du respect; mais ces infortunés
furent bientôt enveloppés dans la ruine
de leur père, & soustraits à la compaf-
fion publique par l'exil,
l'exil, enfuite par la

mort (1).

& ne

nus.

Tandis que Sévère portoit la guerre Envers Albien Orient, il avoit raison de craindre que le Gouverneur de Bretagne, après avoir paffé la mer & franchi les Alpes, ne vînt occuper le Trône vacant, lui opposât l'autorité du Sénat foutenue des forces redoutables de l'Occident. La conduite équivoque d'Albinus, qui n'avoit point voulu prendre le titre d'Empereur, ouvroit un champ libre à la négociation. Ce Général confentit à partager l'autorité fouveraine ; &, malgré les fentimens de patriotifme qu'il affectoit, il accepta le rang précaire de

(1) Hérodien, l. 1, p. 96; Hift. Aug. p. 67, 68. :

Céfar, comme une récompenfe de la neutralité fatale qu'il promettoit d'obferver. Tant qu'Albinus parut redoutable, Sévère traita toujours avec les plus grandes marques d'estime & d'affection un homme dont il avoit juré la perte; & même dans la lettre où il lui apprend la défaite de Niger, il l'appelle fon frère & fon collègue; c'eft au nom de fa femme Julie & de fes enfans qu'il le falue; & il le conjure de maintenir les Armées & la République dans la fidélité nécessaire à leurs intérêts communs. Les messagers chargés de remettre cette lettre, avoient ordre d'aborder le Céfar avec respect, de lui demander une audience particulière, & de lui plonger le poignard dans le fein(1). Le complot fut découvert. Enfin le trop crédule Albinus paffa fur le continent, réfolu de combattre contre un rival fupérieur qui

(1) Hift. Aug. p. 84. Spartien, dans fa narration, a inféré en entier cette lettre curieuse.

fondit fur lui à la tête d'une armée invincible, & compofée des plus braves

vétérans.

des guerres ci

Les combats que Sévère eut à livrer Evénement ne répondirent point à l'importance de viles. fes conquêtes. Deux actions, l'une près de l'Hélespont, l'autre dans les défilés étroits de la Cilicie, décidèrent du fort de Niger; & les Troupes Européennes confervèrent leur afcendant ordinaire fur les foldats efféminés de l'Afie (1). La bataille de Lyon, où l'on vit cómbattre cent-cinquante mille Romains(2), fut également fatale à Clodius Albinus. D'un côté, le courage de l'Armée Britannique; de l'autre, la difcipline des légions de la Pannonie, tinrent longtemps la victoire incertaine, & firent plus d'une fois pencher la balance. Sévère même étoit fur le point de perdre à-la-fois fa réputation & fa vie,

(1) Voyez le troifième livre d'Hérodien, & le foixante-quatorzième de Dion Caffius.

(2) Dion, I. LXXV, p. 1260.

Décidées par deux ou trois

lorfque ce Prince belliqueux rallia fes troupes, ranima leur valeur, & vainquit enfin fon rival (1). La guerre fut terminée par cette journée mémorable. Les difcordes civiles qui ont déchiré batailles. le fein de l'Europe dans les derniers fiècles, furent caractérisées non feulement par une cruelle animofité, mais encore par une conftance opiniâtre. Ces guerres fanglantes ont été généralement justifiées par quelque principe, ou du moins colorées par quelque prétexte de religion, de liberté ou de devoirs. Les Chefs étoient des Nobles indépendans, à qui la naissance & les biens donnoient une grande influence. Les foldats combattoient en hommes intéreffés à la décifion de la querelle. Comme l'efprit militaire & le zèle de parti enflammoient au même degré tous les Mem

(1) Dion, 1. LXXV l. 111, 1261. Hérodien . p... p. 110. Hift. Aug. p. 68. La bataille fe donna dans la plaine de Trévoux, à trois ou quatre lieues de Lyon. Voyez Tillemont, tom. III, p. 406, note 18.

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