bres de la Société, un Chef vaincu fe trouvoit immédiatement après fa défaite entouré de nouveaux partisans prêts à répandre leur fang dans la même cause: mais les Romains, après la chûte de la République, ne combattoient que pour le choix de leur maître. Quand les vœux du peuple appeloient un Candidat à l'Empire, de tous ceux qui s'enrôloient fous fes étendards, les uns le fervoient par affection, d'autres par crainte, le plus grand nombre par intérêt, aucun par principe. Les légions, infenfibles à la voix de l'honneur, prenoient indifféremment parti dans les guerres civiles. Des préfens magnifiques & des promeffes exceflives pouvoient feuls les déterminer; un échec qui ôtoit au Cénéral les moyens de remplir fes engagemens, les relevoit en même-temps de leur ferment de fidélité. Ces mercenaires, empreffés d'abandonner une cause malheureuse, ne trouvoient de fûreté que dans une prompte désertion. Au milieu de tous ces troubles, il importoit peu aux Provinces au nom de qui elles fuffent gouvernées ou opprimées. Entraînées par l'impulfion d'une Puiffance directe, dès que ce mouve Siége de BiPARCE ment venoit fe brifer contre une force fupérieure, elles fe hâtoient de recourir à la clémence du vainqueur, qui, pour acquitter des dettes exorbitantes, facrifioit les provinces les plus coupables à l'avarice des foldats. Dans l'immense étendue de l'Empire, les villes fans défenfe pour la plupart, n'offroient point d'afyle aux débris d'une armée en déroute. Enfin il n'exiftoit aucun homme, aucune famille, aucun ordre de Citoyens, dont le crédit particulier eût été capable de rétablir la caufe d'un parti expirant, fans être foutenu de l'influence puiffante du Gouvernement (1). Il ne faut cependant pas oublier une (1) Montefquieu, Confidérations fur la grandeur & la décadence des Romains, C. 12. 7 ville dont les habitans méritent, par leur attachement à l'infortuné Niger, une exception honorable. Comme Bizance fervoit de principale communication entre l'Europe & l'Afie, l'on avoit eu foin de pourvoir à fa défenfe par une forte garnifon & par une flotte de cinq cens voiles qui mouilloit dans fon port (1). De pareils obftacles n'arrêtèrent point l'impétuofité de Sévère. Ce Prince laiffe fes Généraux autour des murailles de la Place, force le paffage moins gardé de l'Hélefpont; & impatient de voler à des conquêtes plus faciles, il marche au-devant de fon rival. Bizance, attaquée par une armée nombreuse & par toutes les forces navales de l'Empire, foutint un fiége de trois ans, & demeura fidèle au nom & à la mémoire du Gauverneur de Syrie. Les Soldats & les (1) La plupart de ces vaiffeaux étoient, comme on peut bien le penfer, de très-petits bâtimens ; on voyoit cependant dans leur nombre quelques galères de deux & de trois rangs de rames. Citoyens animés d'une ardeur dont nous ignorons la cause, se battoient en furieux plusieurs même des principaux Officiers de Niger, qui désespèroient d'obtenir leur pardon, ou qui dédaignoient de le demander, s'étoient jetés dans ce dernier afyle. Les fortifications paffoient pour imprenables; un célèbre Ingénieur, renfermé dans la Place, avoit employé, pour la défendre, toutes les reffources de la mécanique connue aux Anciens (1). Enfin Bizance, preffée par la famine, ouvrit fes portes: la garnifon & les Magiftrats furent paffés au fil de l'épée, les murailles démolies, les priviléges fupprimés; & cette ville, qui devoit être un jour la Capitale de l'Orient, ne furp'us qu'une fimple (1) Cet Ingénieur fe nommoit Prifcus. Le vainqueur lui fauva la vie en confidération de fes talens, & il le prit à fon fervice. Pour les détails particuliers de ce fiége, voyez Dion (1. LXXV, p. 1251), & Hérodien (1. 111, p. 95). Le chevalier Folard en a donné la defcription d'après fon imagination. Voyez Polybe, tom. 1, p. 76. bourgade ouverte de tous côtés, & get & d'Albi cruelles des ci Albinus & Niger éprouvèrent le Mort de Nimême fort; vaincus tous les deux, ils aus. Suites furent pris dans leur fuite & condam- guerres nés à perdre la vie. Leur mort n'excita ni furprise ni compaffion : ils avoient (1) Malgré l'autorité de Spartien & de quelques Grecs modernes, Hérodien & Dion ne nous permettent pas de douter que Bizance, plufieurs années après la mort de Sévère, ne fût en ruine. viles. |