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Décadence de l'Empire Romain,

Dix fiècles s'étoient déjà écoulés de→ puis que Romulus avoit raffemblé, fur quelques collines près du Tybre, une petite bande de pafteurs & de brigands (1). Durant les quatre premiers fiècles, les Romains, endurcis à l'école de la pauvreté, avoient acquis les vertus de la guerre & du gouvernement. Le développement de ces vertus leur avoit procuré, avec le fecours de la fortune, dans le cours des trois fiècles fuivans, un empire abfolu fur d'immenfes contrées en Europe, en Aliè & en Afrique. Pendant les trois cens dernières années, fous le voile d'une profpérité apparente, la décadence attaqua les principes de la conftitution. Les trente-cinq Tribus du Peuple Romain, compofées de Guerriers, de Magistrats & de Législateurs,

(1) Selon le calcul reçu de Varron, Rome fut fondée 754 ans avant Jefus Chrift. Mais la Chronologie de ces temps reculés eft fi incertaine, que le Chevalier Newton place le même événement dans l'année 627 avant Jésus-Chrift.

avoient entièrement difparu dans la maffe commune du genre humain. Elles étoient confondues avec des millions d'efclaves habitans des Provinces, & qui avoient reçu le nom de Romain, fans adopter le génie de cette Nation fi célèbre. Les fentimens de liberté ne fe trouvoient plus que dans des troupes mercenaires, levées parmi les fujets & les Barbares des frontières, qui fouvent abufoient de leur indépendance. Un Syrien, un Goth, un Arabe, accou rurent à leurs voix tumultueuses, mon tèrent fur le Trône de Rome, & exercèrent un pouvoir defpotique fur les conquêtes & fur la patrie des Scipions.

Les domaines de l'Empire s'étendoient toujours depuis le Tygre jufqu'à l'Océan occidental, & depuis le Mont Atlas jufqu'aux rives du Rhin & du Danube. Le vulgaire aveugle comparoit la puiffance de Philippe à celle d'Adrien ou d'Augufte. La forme étoit encore la même ; mais le principe vivifiant n'exiftoit plus:

tout annonçoit un dépérissement univerfel. Une longue fuite d'oppreffions avoit épuifé & découragé l'induftrie du peuple. La difcipline militaire, qui feule, après l'extinction de toute autre vertu auroit été capable de foutenir l'Etat étoit corrompue par l'ambition, ou relâchée la foibleffe des Empereurs. par La force des frontières, qui avoit toujours confifté dans les armes plutôt que dans les fortifications, s'écrouloit infenfiblement ; enfin, les provinces fans défense, étoient expofées aux ravages, & alloient bientôt devenir la proie des Barbares, qui ne tardèrent pas à s'appercevoir de la décadence de la grandeur Romaine.

Fin du Tome premier.

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