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Sénateurs rempliffoient les fonctions auguftes du Sacerdoce, & les Souverains furent conftamment revêtus de la dignité de grand Pontife. Cette union de la Religion avec le Gouvernement civil, entretenoit l'harmonie dans tous les ordres de l'Empire: les fêtes publiques avoient été inftituées pour adoucir les mœurs des peuples: l'art des Augures étoit un inftrument utile dans les mains de la Politique, fi intéreffée à établir la croyance d'une vie à venir. Le parjure devoit être puni tôt ou tard par les Dieux vengeurs, & il trembloit fans ceffe à la vue des fupplices cruels qui lui étoient réfervés : cette conviction intime formoit le lien le plus ferme de la fociété (1). Perfuadés de tous ces avantages, les Romains croyoient auffi que toutes les différentes espèces de cultes ne contribuoient pas moins au bonheur

(1) Polybe, l. vi, c. 53, 54. Juvénal se plaint (fat. XIII) que, de fon temps, cette appréhenfion étoit devenue prefque fans effet,

1.

vinces,

de l'Empire: des institutions confacrées dans chaque pays par le temps & par l'expérience, leur paroiffoient pouvoir feules convenir au climat & aux habitans. Il est vrai que les ftatues des Dieux & les ornemens des temples devenoient fouvent la proie de l'avarice & de la cupidité (1). Mais les Nations vaincues Dans les Prog éprouvoient, dans l'exercice de la religion de leurs ancêtres, l'indulgence & même la protection des vainqueurs ; la Gaule feule femble avoir été exceptée de cette tolérance univerfelle. Sous le prétexte fpécieux d'abolir les facrifices humains, Tibère & Claude détruifirent l'autorité dangereufe des Druïdes (2) : cependant ces Prêtres échappèrent à la profcription; ils fubfiftèrent en paix dans

(1) Voyez le fort de Syracufe, de Tarente, d'Ambracie, de Corinthe, &c., la conduite de Verrès, dans Cicéron (act. 11, or. 4), & la pratique ordinaire des Gouverneurs, dans la VIIIe fatyre de Juvénal.

(2) Suétone, Vie de Claude; Pline, Hift. nate XXX, Į,

?

A Rome.

l'obfcurité, avec leurs Dieux & leurs autels, jufqu'à la deftruction du Paganisme (1).

Rome étoit fans ceffe remplie d'étrangers qui fe rendoient en foule de toutes les parties du monde dans cette capitale de l'Empire (2), & qui tous y introduifoient les fuperftitions de leur patrie (3). Chaque ville avoit le droit de maintenir fon ancien culte dans fa pureté : le Sénat Romain ufoit quelquefois de ce privilége commun, pour oppofer une digue à l'inondation de tant de cérémonies ridicules. De toutes les religions, celle des Egyptiens étoit la plus vile & la plus méprifable; auffi l'exercice en fut-il fouvent défendu: on démoliffoit les temples d'Ifis & de Sérapis, & leurs adorateurs

(1) Pelloutier, Hift. des Celtes, tom. VI, p. 230252.

(2) Sénèque, confolat. ad Helviam, p. 74, édit. de Jufte-Lipfe.

(3) Denis d'Halicarnaffe, Antiquités Romaines,

étoient bannis de Rome & de l'Italie (1). Mais que peuvent les foibles efforts de la politique contre le zèle ardent du fanatifme? Bientôt les exilés reparoiffoient; on voyoit s'augmenter en mêmetemps le nombre des profélytes; les temples étoient rebâtis avec encore plus de magnificence: enfin Ifis & Sérapis prirent place parmi les Divinités Romaines (2). Cette indulgence n'avoit rien

(1) Dans l'année de Rome 701, le temple d'Ifis & de Sérapis fut démoli en vertu d'un ordre du Sénat (Dion, 1. XL, p. 252), & même par les mains du Conful (Valère - Maxime, 1, 3). Après la mort de Céfar, il fut rebâti aux dépens du Public (Dion, XLVII, p. 581). Augufte, dans fon féjour én Egypte, refpecta la majefté de Sérapis (1. LI, p. 647), mais il défendit le culte des Dieux Égyptiens dans le pomarium de Rome, & à un mille aux environs (Dion, 1. LIII, p. 679'; l. LIV, p.735). Ces Divinités furent cependant adorées fous fon règne (Ovid. de art. aman. 1. 1) & fous celui de fon fuccef-feur, jufqu'à ce que la juftice de Tibère eût porté ce Prince à quelques actes de févérité (Voyez Tacite, annal. 11, 85; Jofephe, antiquit. 1. XVIII, c. 3).

(2) Tertullien, apolog. c. 6, p. 74, édit. Haverc. Il me femble que l'on peut attribuer cet établiffement à la piété de la famille Flavienne,

Rome.

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de contraire aux anciennes maximes du Gouvernement. Dans les plus beaux fiècies de la République, Cybèle & Efculape avoient été invités, par des ambaffades folemnelles (1), à venir prendre féance dans le Capitole ; & l'on avoit coutume de féduire les Divinités tutélaires des villes affiégées, en leur promettant des honneurs plus diftingués & un rang plus illuftre (2). Infenfiblement Rome devint le temple de ses fujets, & tous les Dieux de l'Univers eurent la liberté de réfider dans cette fuperbe ville (3).

Liberté de II. Les anciennes Républiques de la Grèce crurent devoir conferver fans aucun mélange le fang de leurs premiers citoyens. Cette fauffe politique renverfa la fortune, & hâta la ruine

(1) Voyez Tite Live, 1. XI & XXIX.

(2) Macrobe, Saturnales, l. 111, c. 9. Cet Auteur nous donne une formule d'évocation.

(3) Minutius Felix, in Octavio, page 54; Arnobe, 1. VI, p. IIS.

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