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d'Athènes & de Lacédémone; mais le génie entreprenant de Rome facrifia l'orgueil à l'ambition. Ia prudence & la gloire firent difparoître devant lui toute distinction d'esclaves, d'étrangers, d'ennemis & de barbares (1). Par-tout où il put découvrir le mérite & la vertu, il s'empreffa de les adopter. Dans l'époque la plus floriffante de la République d'Athènes, trente mille (2) citoyens furent infenfiblement réduits au nombre de vingt-un mille (3). Rome nous présente dans fes accroiffemens un tableau bien différent le premier cens de Servius Tullius ne se montoit qu'à quatre-vingt

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(1) Tacite, annal. xI, 24. Le Monde Romain du favant Spanheim eft une hiftoire complette de l'admif fion progreffive du Latium, de l'Italie & des Provinces, à la liberté de Rome.

(2) Hérodote, v. 97. Ce nombre paroît confidérable; con feroit tenté de croire que l'Auteur s'en eft rapporté à des bruits populaires.

(3) Athénée, Deipnofophift. 1. v1, p. 272. édit. de Cafaubon; Meurfius, de fortuna Attica, c. 4.

trois mille hommes ; ce nombre s'augmenta rapidement malgré des guerres perpétuelles, & les colonies que l'on envoyoit souvent au - dehors: enfin, avant la guerre fociale, on comptoit. quatre cent foixante-trois mille citoyens en état de porter les armes (1). Les alliés demandèrent avec hauteur à être compris dans la distribution des honneurs & des priviléges; mais le Sénat aima mieux recourir aux armes que de fe déshonorer par une conceffion forcée. Les Samnites & les Lucaniens, furent punis févèrement de leur témérité. La République ouvrit fon fein aux autres Etats d'Italie, à mesure qu'ils rentrèrent dans feur devoir (2), & bientôt la liberté publique fut anéantie. Dans un Gouvernement démocratique, les citoyens

(1) Voyez, dans M. de Beaufort (Rép. Rom. I. IV, c. 4, le nombre exact des citoyens que renfermoit chaque cens.

(2) Appien, de bell. civil, l. 1; Velleius Paterculus, 1. 11, c. 15, 16, 170,

exercent l'autorité fouveraine : entre les mains d'une multitude immense, incapable de fuivre la même direction, cette autorité est une source d'abus, & finit par s'évanouir. Mais lorsque les Empereurs eurent fupprimé les affemblées populaires les vainqueurs fe

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trouvèrent confondus avec les autres Nations feulement ils tenoient le premier rang parmi les fujets. Leur accroissement, quoique rapide, n'étoit plus accompagné des mêmes dangers. Cependant les Princes qui adoptèrent les fages maximes d'Augufte, maintinrent avec le plus grand foin la dignité du nom Romain, & ils furent très-réfervés à accorder le titre de Citoyen (1). Italic. Avant que les priviléges des Romains fe fuffent étendus à tous les habitans de

(1) Mecène lui confeilla de donner, par un édit, à tous fes fujets, le titre de citoyens; mais nous foupçonnons, à jufte titre, Dion Caffius d'être l'auteur d'un confeil fi bien adapté à l'esprit de fon fiècle, & fi peu à la politique d'Augufte.

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l'Empire, l'Italie, bien différente des autres Provinces, étoit le centre du Gouvernement & la bafe la plus folide de la constitution; elle se vantoit d'être le berceau, ou du moins la résidence des Sénateurs & des Céfars (1). Les terres des Italiens étoient exemptes d'impofitions, & leurs perfonnes, de la jurisdiction arbitraire des Gouverneurs. Formées d'après le modèle parfait de la Capitale, leurs villes jouiffoient de la puiffance exécutrice, fous l'infpection immédiate de l'autorité fouveraine. Depuis les Alpes jufqu'à l'extrémité de la Calabre, les naturels du pays naiffoient tous Citoyens de Rome. Ils avoient oublié leurs anciennes haines, & infenfiblement ils étoient parvenus à former une grande Nation, réunie par la langue, les mœurs

(1) Les Sénateurs étoient obligés d'avoir le tiers de leurs biens en Italie (Voyez Pline, 1. VI, ép. 19 ); Marc-Aurèle leur permit de n'en avoir que le quart. Depuis le règne de Trajan, l'Italie commença à n'être plus diftinguée des autres provinces.

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& les inftitutions civiles, & digne de foutenir le poids d'un puiffant Empire. La République fe glorifioit de cette noble politique; elle en étoit fouvent récompenfée par le mérite & par les fervices des enfans qu'elle avoit adoptés. Si la diftinction du nom Romain, renfermée dans les murs de la ville, n'eût été le partage que des anciennes familles, ce nom immortel auroit été privé de fes plus riches ornemens. Mantoue eft devenue célèbre par la naiffance de Virgile. Horace ne fait s'il doit être appellé Lucanien ou citoyen d'Apulie. Ce fut à Padoue que le Peuple Romain trouva un peintre digne de faire paffer à la postérité l'hiftoire majeftueufe de fes triomphes. Les Catons étoient venus de Tufcule déployer dans la Capitale toutes les vertus du patriotisme; & la petite ville d'Arpinum eut l'honneur d'avoir produit deux illuftres citoyens : Marius, qui mérita, après Romulus & Camille, le titre glorieux de fondateur

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