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chambre voisine, a entendu tout ce dialogue, et au bruit que les auteurs faisaient en se battant, il a jugé qu'ils étaient aux prises. Il s'est levé, et par compassion pour ces Fran

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çais, quoique Italien, il a appelé du monde. Un Flamand et deux Allemands, qui sont ces personnes que vous voyez en robes de chambre, viennent avec l'Italien séparer les combattants.

Ce démêlé me paraît plaisant, dit don Cleophas. Mais, à ce que je vois, les auteurs tragiques, en France, s'imaginent être des personnages plus importants que ceux qui ne font que des comédies. Sans doute, répondit Asmodée. Les premiers se croient autant au-dessus des autres, que les héros des tragédies sont au-dessus des valets des pièces comiques. Eh! sur quoi fondent-ils leur orgueil? répliqua l'écolier. Est-ce qu'il serait en effet plus difficile de faire une tragédie qu'une comédie? La question que vous me faites, repartit le Diable, a cent fois été agitée, et l'est encore tous les jours. Pour moi, voici comment je la décide, n'en déplaise aux hommes qui ne sont pas de mon sentiment : je dis qu'il n'est pas plus facile de composer une pièce comique qu'une tragique; car si la dernière était plus difficile que l'autre, il faudrait conclure de là qu'un faiseur de tragédies serait plus capable de faire une comédie que le meilleur auteur comique; ce qui ne s'accorderait pas avec l'ex périence. Ces deux sortes de poëmes demandent donc deux génies d'un caractère différent, mais d'une égale habileté. Il est temps, ajouta le boiteux, de finir la digression : je vais reprendre le fil de l'histoire que vous avez interrompue.

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I les valets de dona Theodora n'avaient pu empêcher son enlèvement, ils s'y étaient du moins opposés avec Acourage, et leur résistance avait été fatale à une partie des gens d'Alvaro Ponce. Ils en avaient entre autres blessé un si dangereusement, que ses blessures ne lui ayant pas permis de suivre ses camarades, il était demeuré presque sans vie étendu sur le sable.

On reconnut ce malheureux pour un valet de don Alvaro; et comme on s'aperçut qu'il respirait encore, on le porta au château, où l'on n'épargna rien pour lui faire reprendre

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ses esprits. On en vint à bout, quoique le sang qu'il avait perdu l'eût laissé dans une extrême faiblesse. Pour l'engager à parler, on lui promit d'avoir soin de ses jours, et de ne point le livrer à la rigueur de la justice, pourvu qu'il voulût dire où son maître emmenait dona Theodora.

Il fut flatté de cette promesse, bien qu'en l'état où il était il dût avoir peu d'espérance d'en profiter. Il rappela le peu de force qui lui restait, et, d'une voix faible, confirma l'avis que don Fadrique avait reçu. Il ajouta ensuite que don Alvaro avait dessein de conduire la veuve de Cifuentes à Sassari, dans l'île de Sardaigne, où il avait un parent dont la protection et l'autorité lui promettaient un sûr asile.

Cette déposition soulagea le désespoir de Mendoce et du Tolédan: ils laissèrent le blessé dans le château, où il mourut quelques heures après, et ils s'en retournèrent à Valence, en songeant au parti qu'ils avaient à prendre. Ils résolurent d'aller chercher leur ennemi commun dans sa retraite : ils s'embarquèrent bientôt tous deux sans suite, à Dénia, pour passer au Port-Mahon, ne doutant pas qu'ils n'y trouvassent une commodité pour aller à l'île de Sardaigne. Effectivement, ils ne furent pas plutôt arrivés au Port-Mahon qu'ils apprirent qu'un vaisseau frété pour Cagliari devait incessamment mettre à la voile : ils profitèrent de l'occasion.

Le vaisseau partit avec un vent tel qu'ils le pouvaient souhaiter; mais cinq ou six heures après leur départ, il survint un calme; et la nuit, le vent étant devenu contraire, ils furent obligés de louvoyer, dans l'espérance qu'il changerait. Ils naviguèrent de cette sorte pendant trois jours; le quatrième, sur les deux heures après midi, ils découvrirent un vaisseau qui venait droit à eux les voiles tendues. Ils le prirent d'abord pour un vaisseau marchand; mais voyant qu'il s'avançait presque sous leur canon, sans arborer aucun pavillon, ils ne doutèrent plus que ce ne fût un corsaire.

Ils ne se trompaient pas : c'était un pirate de Tunis qui croyait que les chrétiens allaient se rendre sans combattre; mais lorsqu'il s'aperçut qu'ils brouillaient les voiles et préparaient leur canon, il jugea que l'affaire serait plus sérieuse qu'il n'avait pensé : c'est pourquoi il s'arrêta, brouilla aussi ses voiles, et se disposa au combat.

Ils commencèrent de part et d'autre à se canonner, et les chrétiens semblaient avoir quelque avantage; mais un corsaire d'Alger, avec un vaisseau plus grand et mieux armé que les autres, arrivant au milieu de l'action, prit le parti du pirate de Tunis. Il s'approcha du bâtiment espagnol à pleines voiles, et le mit entre deux feux.

Les chrétiens perdirent courage à cette vue; et ne voulant pas continuer un combat qui devenait trop inégal, ils

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