Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Laïc et même Moine; l'un et l'autre médiocrement instruit des dogmes de l'Eglise; et qu'enfin le style de cette letre et de celle qu'Hilaire le Gaulois écrivit dans la suite à S. Augustin conjointement avec S. Prosper, est entierement semblable. C'est aujourd'hui l'opinion la plus communément reçûë parmi les Sçavants, qui mettent cette letre en 414.

a S. Augustin répondit par articles avec sa suffisance et son érudition ordinaire, à tous les points de la letre d'Hilaire; et sa réponse qui mériteroit le nom de Traité, est un de ses premiers écrits contre les erreurs de Pélage. A la fin S. Augustin prie Hilaire de lui faire sçavoir ce que les bons Catholiques du païs où il se trouvoit, disoient de ces mêmes erreurs, qu'il lui avoit dénoncées dans sa letre, et sur lesquelles il lui répond.

[merged small][merged small][ocr errors][merged small]

2o. Nous avons une autre letre d'Hilaire, beaucoup plus ep. 226. considérable que la premiere. Elle est aussi adressée à S. Augustin, pour l'instruire de ce qui se passoit à Marseille, n. 2. et en d'autres endroits des Gaules, touchant la naissance et le progrès de l'hérésie Semipélagienne. Elle fut écrite en n. 10 même temps que celle de S. Prosper sur le même sujet, vers

l'an 428 ou 429. 'La postérité a fait tant d'estime de ces deux Merc. pr. p. 2. letres, dit le P. Garnier Jésuite, qu'elle a cru devoir les joindre à celles du grand Docteur de la Grace, comme ne leur étant guéres inférieures. Elles en sont aujourd'hui la 225o, et la 226; et le dernier éditeur de S. Prosper a jugé nécessaire 'd'insérer celle d'Hilaire parmi les ouvrages de ce Saint à la Pros. p. 13-20 suite de la sienne. En effet ces deux letres ont entre elles une connexion si naturelle, qu'elles ne devroient jamais être séparées. Comme elles traitent des mêmes matieres, on supplée par l'une à ce qui manque à l'autre.

Celle d'Hilaire a été, ce me semble, connue dans le public avant celle de S. Prosper;' puisqu'elle fut imprimée à Co- Bibl. Angel. logne dès l'an 1503, avec le traité d'Honoré d'Autun sur le

libre arbitre. Mais on lui fit porter mal à propos le nom de

S. Hilaire d'Arles Paradoxe qu'on a tâché de soutenir Aug. ep. 226. not dans la suite, quoique sans succès. Ce que nous avons déja p. 826 dit contre cette opinion, seroit plus que suffisant pour la dé

truire. Si néanmoins l'on veut être plus pleinement convaincu

de sa fausseté, il n'y a qu'à rapprocher ce que S. Prosper ep. 225. n. 9. dit de S. Hilaire d'Arles au nombre 9e, de sa letre' et le con- ep. 226. n. 9. 10. férer avec les endroits où Hilaire compagnon de S. Pros

V SIECLE.

ep. 223. n. 9.

n. 9.

præd. c. 3.

p. 919.

per parle de lui-même. Ici l'on verra que cet Hilaire étoit un simple Moine laïc, fort attaché à la personne et aux sentiments de S. Augustin. Là on verra au contraire que S. Hilaire d'Arles y est qualifié Evêque, et dépeint comme ne pouvant entrer dans tous les sentiments du grand Docteur de la Grace. Après un tel éclaircissement on n'hésitera pas un moment à convenir que S. Hilaire d'Arles, et Hilaire Collegue de S. Prosper, sont deux personnes tout-à-fait différentes. De-là il s'ensuit nécessairement que la letre dont il s'agit, est d'Hilaire qui fait le sujet de cet article, et nullement de S. Hilaire d'Arles, dont le style est beaucoup plus poli, plus doux, et plus coulant, comme on le peut voir par les écrits qui nous en restent.

3o. Hilaire avoit écrit à S. Augustin une premiere letre sur la même matiere, et différente de celle dont nous venons de parler. 'Il paroît aussi qu'il lui avoit adressé quelque autre ouvrage de plus longue haleine, que S. Augustin semble distinguer de ses letres. Mais nous n'avons rien aujourTill. H. E. t. 13. d'hui de tout cela, seulement on regarde comme certain que cette premiere letre d'Hilaire étoit pour apprendre à S. Augustin les dogmes des Semipélagiens; et l'on croit que Aug. pers. c. 22. ce Saint en avoit pû tirer' cette maniere si odieuse, dont ils disoient par ironie qu'il falloit prêcher la prédestination. a Hilaire dans sa letre qu'il joignit à celle de S. Prosper, dit lui même qu'il y rapporte les choses un peu autrement qu'il n'avoit fait dans la précédente, parce que les adversaires qu'il combattoit, avoient varié dans leurs sentiments.

n. 1-5.

a ep. 226. n. 9.

Pros. p. 825.826.

a

4. Vossius et quelques autres ont attribué à Hilaire le traité de la vocation des Gentils. Mais c'est en le confondant avec S. Hilaire d'Arles; en quoi ils nous fournissent une preuve pour détruire leur opinion. Car ce Saint, comme nous venons de dire fondés sur la letre de S. Prosper à S. Augustin, ne goûtoit pas entierement la doctrine de ce S. Docteur, ni par conséquent celle que contient l'ouvrage qu'on voudroit lui attribuer. On ne peut pas soûtenir non plus qu'il est d'Hilaire Collegue de S. Prosper, tant pour les raisons sur lesquelles nous ferons voir qu'on ne peut le donner à ce Saint, et qui prouvent la même chose à l'égard d'Hilaire, que parce qu'on n'y trouve nullement le style des letres de ce dernier à S. Augustin.

par

JEAN CASSIEN,

PRÊTRE ET ABBÉ A MARSEille.

SI.

HISTOIRE DE SA VIE.

V SIECLE.

TEAN surnommé Cassien, selon l'opinion la plus com- Pros. chr.p. 745.

J'mune, appuyée sur l'autorité de Gennade, étoit de la pe- df

a

ill. c.

[ocr errors]

40.

cod. reg. pr. c. 3.

tite Scythie, l'une des provinces de la Thrace. Cependant 44. p. 157. 729. le Cardinal Noris, et M Holstenius, sur des preuves qui ne Nor. hist. Pel. 1. sont pas à mépriser, le font Gaulois, et natif de Provence. 2. c. 1. p. 159 | Il faut avouer que la description que Cassien fait lui-même des beautés et de la fertilité de son païs, ne convient nullement aux deserts de la Scythie; et que le voyant parler aussi purement latin qu'il fait dans ses ouvrages, on se sent une répugnance invincible à le croire étranger, c'est-à-dire né dans un païs où l'on ne parloit pas cette langue. Tout cela joint au desir qu'il témoigne de revoir ses parents, et à son établissement ensuite à Marseille, devroit, ce semble, faire donner la préférence au sentiment de ces deux Ecrivains sur l'opinion commune. Ainsi il faudroit dire, ou que Gennade s'est trompé, et a trompé ceux qui l'ont suivi, ou que quelqu'un de ses copistes aura écrit un mot pour un autre.

b

Till. ibid.
Cass. coll. 24
inst. pr. p. 2.

c. 1. p. 835.

Cassien nâquit vers l'an 350 ou 360 au plus tard. Ses parens paroissent avoir été recommandables pour leur vertu et leur pieté. Dès sa premiere jeunesse il fut élevé parmi les Moines de Palestine et d'Egypte : l'on ne sçauroit dire par quelle occasion. Sa premiere retraite fut dans le Monastere coll. 11. c. 1. 5. de Bethleem en Syrie, où il reçut les premiers élements de la P. 556. 559. Religion Chrétienne. ' Il y fit une étroite liaison avec un Abbé coll. 1. nommé Germain, qui étoit de son païs, et ce semble même 300; de ses parents. Il paroît par bien des endroits que ce Mo- 855. nastere étoit différent de celui de S. Jérôme, qui ne fut bâti ill. ibid. p. qu'en 389.

C.

1. P.

c coll. 24. c. 1. p.

158.

On prétend que Cassien, soit dans ce Monastere de Beth- p. 158. 159. léem, soit avant que d'y entrer, avoit étudié les letres humaines,

V SIECLE.

Cass. coll. 14. c. 12. p. 642.

Phot. c. 197. p. 516.

766.

758.

a coll. 11. c. 1. p. 556.

et qu'il avoit une grande lecture des Poëtes, et des autres Auteurs profanes. Mais l'endroit sur lequel on s'appuye pour l'avancer, regarde Germain son compagnon, qui y parle de lui-même, et non de Cassien. Il est au moins certain, et ses ouvrages en sont une bonne preuve, que Cassien lui-même possédoit fort bien l'Ecriture, que s'il n'étoit pas Gaulois, ou né en Occident, il avoit étudié à fond la langue latine : ce qui étoit bien rare dans les païs où il passa toute sa jeunesse, et la plus grande partie de sa vie. C'est sans doute pourquoi 'Photius le fait Romain, c'est-à-dire Latin de naissance.

Comme l'amour de la vertu étoit le lien de l'amitié qui uniscoll. 20. c. 2. p. soit Cassien et Germain, 'ils formerent le dessein de passer en Egypte. Le but qu'ils se proposoient dans ce voïage, étoit de faire de nouveaux progrès dans la pieté en visitant les saints coll. 19. c. 11. p. deserts de ce païs, et d'y pratiquer eux-mêmes la vie des Anachoretes ou au moins pour avoir la consolation de connoître des hommes si célebres par leur sainteté, s'ils ne pouvoient pas les imiter. Ils partirent donc de Syrie, et se rencoll. 20. c. 2. p. dire par mer en Egypte, 'où ils furent reçus avec honneur et beaucoup de charité. Ils parloient ordinairement aux Solitaires par des interpretes, parcequ'ils ne sçavoient pas l'égyptien; et ce leur fut une grande consolation d'en rencontrer un qui possédoit parfaitement le grec, et avec lequel ils puTill. ibid. p. 160. rent s'entretenir sans truchement. Ce voïage se fit au plus tard vers 390; et Cassien étoit encore dans une assez grande jeunesse, cui.... ætas adhuc adolescentior suffragatur.

766.

b coll. 16. c. 1. p. 668.

| Cass. coll. 14. c. 9. p. 636.

coll. 20. c. 11. p. 778.

346.

Cassien et Germain allerent ensuite visiter les deserts de Sceté, où ils étoient attirés par la réputation du lieu, comme habités par les plus sages de tous les Peres des deserts, et les coll. 2. c. 19. p. plus parfaits de tous les Moines. Ils y vêcurent avec beaucoup d'austérité, ne mangeant par jour pour toute nourriture, que deux petits pains qui à peine pesoient une livre. Mais en dédommagement ils y recurent grand nombre d'excellentes coll. 11. pr. p. instructions, que l'on trouve répandües dans les conférences, que Cassien écrivit dans la suite. De Sceté'ils passerent dans les deserts les plus enfoncés de la Thébaïde, comme coll. 17. c. 31. p. ils l'avoient projetté; et après avoir emploié sept ans à s'édifier et à s'instruire auprès des saints habitants de ces solitudes, Till. ibid. p. 172. ils retournerent à leur Monastere de Bethleem en 397. La même année' ils firent un second voïage au désert de Sceté, où ils demeurerent jusques vers l'an 400. Ce long séjour de Cassien

553.

c. 1. p. 556.

719.

Cass. ibid.

Till. ibid.

c Cass. vit. p. 46.

2.

c

Cassien dans ces déserts lui a fait donner le surnom d'Ermite, qu'il porte à la tête de quelques-unes des éditions de ses ouvrages.

V SIECLE.

De Sceté ils allerent à Constantinople, on ne sçait pour Till. ibid. quel sujet; et ils y étoient en 404. Là Cassien se mit sous la Cass. inc. 1. 7. c. discipline de S. Jean Chrysostome, qui en étoit Evêque, et 31. p. 1130. qui l'éleva au sacré ministere du Diaconat. Cassien se glorifie de l'avoir eu pour maître et pour docteur. Il conserva toûjours dans la suite un attachement inviolable pour les Fideles de Constantinople, qu'il portoit sans cesse dans son cœur, même depuis qu'il les eut quittés pour venir s'établir en Provence.

'If paroît que S. Chrysostôme avoit confié à Cassien et à Pall. Dial. p. 13. Germain la garde du thrésor et des vases sacrés de son Eglise. 14. Car ce thrésor aïant été conservé par une providence particuliere dans l'embrasement qui consuma l'Eglise en 404, ils en firent dresser un inventaire authentique, qu'ils porterent ensuite à Rome.

'Ils firent ce voïage en l'année 405, chargés de letres que Till. ibid. p. 173. tout le Clergé de Constantinople écrivoit au Pape S. Inno

cent, au sujet de S. Chrysostome exilé dès le 20 de Juin de

l'année précédente. 'Ils y solliciterent en faveur de leur saint t. 11. p. 310. 311 Prélat, conjointement avec les Evêques Démetre, Cyriaque, Eulyse et Pallade, qui les y avoient précédés pour la même

cause. Depuis ce temps-là on ne sçait point ce que devint t. 14. p. 174. Cassien jusqu'à sa retraite en Provence. Blondel croit que

c'est le même que le Prêtre de ce nom, qui en 414 ou 415

agissoit comme entremetteur et ami commun pour la réunion Conc. t. 1. p. 760. de l'Eglise d'Antioche avec celle de Rome. Mais il semble que ce Prêtre étoit nouvellement venu d'Antioche, où l'on ne voit point que Cassien dont nous parlons ici, soit allé depuis qu'il eut quitté l'Orient. La ressemblance des noms n'est pas suffisante pour prouver ce fait. 'Raphaël de Volterre, Cass. Vit. p. 46. sans en donner des preuves, suppose que Cassien retourna encore à Jérusalem, et qu'en aïant été chassé par les hérétiques, il vint dans les Gaules.

Quoiqu'il en soit, tout le monde convient qu'il se retira à Marseille, soit peu après l'an 405, ce qui est le plus probable,

2.

p. 253.

ou seulement après 415. ' Selon Gennade il y fut ordonné Prê- Genn. ibid. | Cass. tre, et en quelque sorte malgré lui, comme Cassien le témoi- Inst. 1. 11. c. 17. gne lui-même. Il y fonda deux Monasteres, l'un d'hommes, Genn. ibid. l'autre de filles, qui subsistoient encore tous deux, lorsque

[blocks in formation]
« AnteriorContinuar »