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C'est-là tout ce que nous sçavons de bien certain touchant ce Pallade. Il y auroit cependant quelque lieu de croire que la qualité de fils d'un Préfet des Gaules, jointe à son mérite personnel, lui auroit procuré quelque dignité, ou quelque charge dans l'Empire; mais nous n'en avons point de connoissance positive. Car on ne peut pas dire qu'il soit ce Pallade Proconsul d'Afrique sous Honoré en l'année 410. Quelques Ecrivains modernes en ont voulu faire le célebre Orateur de même nom que lui, dont parle Symmaque dans plusieurs de ses letres. 'Mais celui-ci fleurissoit dès avant la fin du IV siecle, du temps du Consul Syagre, et par conséquent avant que naquît celui dont nous faisons l'éloge. Il y eut au même siecle et dans le suivant parmi les Grecs, divers autres Pallades illustres par leur sçavoir, avec lesquels on ne doit pas non plus le confondre. Rien n'empêche cependant qu'on ne croïe, et Barthius l'a ainsi pensé, que c'est le même dont nous avons un ouvrage sur l'agriculture. Cet Auteur s'y nomme, à la tête dans un ancien manuscrit, et selon la remarque du P. Sirmond, Palladius Rutilius Taurus Æmilianus; où l'on voit deux noms qui conviennent à nôtre Poëte celui de Pallade sous lequel nous le représentons, et celui de Rutilius, qui étoit dans sa famille, et qu'il pouvoit porter aussi à cause de son adoption, si elle est aussi vraïe qu'on la suppose. De sorte que son véritable nom devroit être Emilien, comme le nomment Cassiodore et S. Isidore de Séville. L'usage de ce temps-là vouloit en effet que le dernier nom fût le nom propre des personnes qui en avoient plusieurs.

:

Une autre raison qui ne permet gueres de douter que l'Auteur des livres sur l'agriculture, ne soit Pallade dont nous Rut. ibid. p. 219. parlons ici,' c'est que l'on convient assez communément que cet ouvrage est du temps où la barbarie avoit commencé à prendre la place des Belles Letres, c'est-à-dire, de ce V siecle. Il n'y a que Louis Vivès qui le rapporte au temps de l'Empereur Adrien. Mais outre qu'il avance cette opinion sans fondement et sans autorité, Augustin Dathus l'avoit mis avant lui au nombre des Auteurs des siecles suivants. C'est ce Fab. bib. lat. p. que prouvent la nature de son style, et la mention qu'il fait d'Apulée, qui n'écrivoit que sous les successeurs de Tite Antonin, vers la fin du II siecle.

135. 145.

Nous ne voïons rien qui puisse légitimement combatre le Pall. de re rust. sentiment que nous établissons, sinon ' l'endroit où l'Auteur

1. 4. p. 281.

V SIECLE.

de l'ouvrage dont il est ici question, parle des domaines qu'il possédoit au territoire de Naples : ce qui pourroit insinuer qu'il étoit de ce païs-là. Mais cette difficulté ne doit point arrêter. Pallade n'est point le premier Gaulois qui ait eu des terres dans des païs étrangers. Nous avons vû dans ce siecle-ci même, que Protade qui étoit de Tréves, avoit une terre en Ombrie, où il s'étoit retiré avant l'an 417. Il est aisé que Pallade l'ait imité en cela, et qu'aïant perdu son pere Lab. nov. bib. t. en 424 de la maniere tragique que nous l'avons rapporté, et sa mere long-temps auparavant, l'état déplorable auquel Hier. ep. 99. p. les Barbares avoient alors réduit les Gaules, lui ait fait prendre le parti de s'établir du côté de Naples. Il est qualifié Pall. ibid. 1. 1. p. illustre à la tête de ses écrits selon les imprimés: titre qu'on 310. lui donne soit pour sa naissance, soit à cause des dignités ou des charges qu'il aura exercées. Au reste quoiqu'il fût proche parent d'un Païen, on ne doit pas croire qu'il le fût lui-même. Il paroît au contraire qu'Exupérance son pere étoit Chré

1. p. 50.

799.

249. de ins. p.

tien :
et Quintilien son oncle paternel avoit la réputation Hier. ibid.
d'un fidele serviteur de J. C. comme nous l'avons montré
ailleurs.

S II.
SES ECRITS.

'OUVRAGE de Pallade sur l'agriculture est compris en Pall. de re rust. p. L14 livres, dont les treize premiers sont écrits en prose,

249-312.

et le quatorziéme en vers élégiaques. 'Il les adresse à un nom- 1. 14. p. 310. mé Pasiphile, qu'il qualifie homme très-docte, et dont le nom ne se trouve qu'à la tête du dernier livre. Ce fut à la priere et à ses sollicitations, que Pallade entreprit cet ouvrage, qu'il ne lui envoïa qu'un peu tard par la négligence et sa paresse de ses copistes. Il ne lui parle de son travail, que comme d'un amusement, qu'il se flate néanmoins d'être reçu favorablement de Pasiphile.

Outre la petite préface où Pallade parle de la sorte, 'il en 1. 1. pr. p. 249. a mis une autre fort courte à la tête de l'ouvrage, tant pour s'excuser de ce qu'il n'y emploïe pas l'éloquence des Rhéteurs, ce qui ne conviendroit pas au sujet qu'il entreprend de traiter, que pour tracer une idée générale de son dessein. Il promet de parler de toute sorte d'agriculture, des pâturages, des édifices champêtres, selon les maîtres de l'art, de leurs in

SIECLE.

1. 1. p. 230-261.

309.

Fab. bib. lat. p. poë. lat. p. 498.

145 Bail. jug.

Casd. inst. c. 28.

p. 534. 2.

ventions, en un mot de tout ce que l'on peut ou faire ou nourrir à la campagne, soit pour le plaisir, ou pour l'utilité, en marquant les saisons propres à chaque chose. De sorte que l'ouvrage de Pallade peut à juste titre passer pour un de ces livres, qu'on nomme aujourd'hui la maison rustique.

'Dans le premier livre Pallade donne les divers préceptes 1.2-13. p. 261- qui regardent l'agriculture en général. 'Il emploïe les douze suivants à marquer ce que l'on doit ou semer ou planter, et tous les autres travaux qui conviennent à chaque mois de l'année, 1. 14. p. 310. 311. en commençant par le mois de Janvier. Enfin dans le 14° et dernier livre, qui est en vers, Pallade traite de la maniere d'enter et de greffer les arbres. C'est pourquoi il est intitulé De insitione. On remarque que l'ouvrage de Pallade est écrit d'un style simple, mais que néanmoins il ne manque point d'élégance, et que sa versification n'est pas mauvaise. Cassiodore qui avoit enrichi sa Bibliotheque de cet ouvrage, et qui met son Auteur le dernier entre ceux qui ont le mieux écrit de l'agriculture, y reconnoît beaucoup d'éloquence, et une grande netteté. Il n'y compte que douze livres; et l'on ne sçauroit dire pourquoi. Mais il convient que l'Auteur y explique avec une entiere clarté ce qui regarde la culture des jardins, et la maniere d'élever et de nourrir Isid. orig 1. 17. les bestiaux. Cassiodore' non plus que S. Isidore de Séville ne donnent à Pallade que le nom d'Emilien, sans doute pour la raison que nous avons marquée plus haut. Pallade scut profiter des ouvrages de ceux qui avoient écrit avant lui sur la même matiere qu'il traite dans le sien. Car il cite quelquefois Gargilius Martialis, Columelle, et Apulée.

c. 1. p. 112. 2.

Bib. Boll.

t. 2.

p. 30. 1. | Bib. An

...

gel. I S. Flor. Sal.

Bib. FF. Min. Cen.

Il y a eu assez grand nombre d'éditions de son ouvrage, presque toûjours avec les écrits de Caton, de Varron, et de Columelle sur le même sujet. La premiere dont nous aïons connoissance, est celle qui parut à Boulogne en 1504, avec les commentaires de Philippe Béroalde en un volume in-folio, et qui est fort belle. Dès 1515 il y en eut une nouvelle édition en même volume faite à Florence chez Philippe Junta, et chez ses héritiers au même endroit l'an 1521 in4o. Alde Manuce' en donna une autre édition à Venise l'an S. Vin. Cen. 1528 en un volume in-8°. 'A Paris Josse Bade réimprima l'année suivante les mêmes ouvrages en un volume in-folio avec les notes et les commentaires de divers Auteurs.' Ces mêmes anciens Ecrivains furent encore imprimés à Paris

... D. de Lorch. Bib. Bodl. ibid.

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ff. Præd. Cen.

a

chez Antoine Augerelle pour Jean Petit et Galiot du Pré
l'an 1533 en un volume in-folio, qui est parfaitement bien
conditionné. La même année ils parurent aussi à Venise,
puis en 1538 au même endroit ; mais cette derniere édition
n'est qu'une traduction en italien. Jean Hervag imprimeur
à Basle les donna au public en leur langue originale l'an 1535
en un volume in-4°. Sébastien Gryphe les imprima à Lyon
en un volume in-8° la même année 1535. En 1536 ils fu-
rent réimprimés à Cologne en un volume in-8°.' Le même
imprimeur les donna de nouveau au public les années 1541,
'et 1549 avec les notes et les explications de Philippe Bé-
roalde, et de Pierre Victorius en un volume in-8°. Robert
Estienne de son côté les publia à Paris l'an 1543 en même
volume. Cette édition et celle de Josse Bade qui l'avoit pré-
cédée, et dont nous nous sommes servis, sont des plus belles
sans contradiction.' On en trouve encore une édition en un
volume in-8° faite à Heidelberg l'an 1595. (XI.)

L

EUSEBE,

EVÊQUE DANS LES GAULES.

E recueil des 56 homélies qui ont paru d'abord sous le nom d'Eusebe d'Emese, et en dernier lieu sous celui d'Eusebe des Gaules ou le Gaulois, nous oblige de parler ici de l'Auteur à qui on les attribuë. Il seroit difficile de dire au juste pourquoi l'on s'est avisé de leur faire porter le nom d'Eusebe pris en lui-même ; quoiqu'il soit aisé de faire voir pourquoi l'on a changé sa qualification, en le nommant Eusebe des Gaules au lieu d'Eusebe d'Emese.

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Aug. ser. ap. p.

200 | Du Pin, bib.

4. p. 416 | Ond. scri. t. 1. p. 421.

422.

Quelques Sçavants prétendent qu'on n'a donné à ces homélies le nom d'Eusebe, que pour marquer qu'elles étoient t. d'une personne de pieté en général. De sorte qu'Eusebe seroit ici un nom appellatif, qui selon la force du grec signifieroit une personne de pieté, et non pas le nom propre d'un homme en particulier. Mais, quoique nous aïons en ce même siecle les exemples de Vincent de Lérins, qui s'est caché sous le nom emprunté d'étranger ou de pélerin, et de Salvien qui s'est déguisé sous le nom de Timothée, ces exemples

V SIECLE.

478.

n'autorisent point la prétention que l'on nous donne touchant Eusebe, parce que ce sont Vincent et Salvien qui prennent eux-mêmes ces noms empruntés, au lieu que l'on suppose que ce sont d'autres que le propre Auteur des homélies, qui

leur donne le nom d'Eusebe. Ainsi sans nous arrêter à cette conjecture, il nous paroît plus vrai-semblable que ce nom leur sera venu, de ce que quelques-unes portoient originairement le nom d'Eusebe comme étant réellement l'ouvrage d'un Eusebe, qui aura vêcu dans les Gaules, où il est clair que la plûpart ont été prononcées. Ensuite il sera aisément arrivé que lorsqu'on aura fait le recueil de ces homélies, on ait joint aux premieres qui portoient ce nom, celles qui étoient anonymes, et qui se seront trouvées de la sorte attribuées à un Eusebe.

Nôtre conjecture est d'autant mieux fondée, qu'il est plus certain qu'il y avoit en ce siecle-ci dans nos Gaules diverses personnes illustres, qui portoient le nom d'Eusebe, et qui se trouvant dans les premieres dignités ecclésiastiques, ont pu composer quelques-unes de ces homélies, et leur faire porter leur nom; ce que les Auteurs des autres auront négligé Sul. ad Eus. p. de faire.' A la fin du IV siecle on trouve un Eusebe, à qui S. Sévere Sulpice adresse sa letre contre les envieux de la vertu de S. Martin. Cet Eusebe n'étoit alors que Prêtre; mais en 405 lorsque S. Sulpice écrivoit ses dialogues, il étoit revêtu de l'Episcopat. Le premier Concile de Tours, tenu en 461, nous fournit un autre Eusebe, qui étoit EvêLeo, t. 1. p. 740. que de Nantes dans la Métropole de Tours. La vie de S. Hilaire d'Arles nous fait encore connoître un troisiéme Eusebe, qu'elle joint à Silvius que nous avons vû Evêque d'Octodure, et à Domnule, qui étoient tous trois autant d'admirateurs de l'éloquence de S. Hilaire, et qui assistoient assez souvent à ses prédications avant le milieu de ce siecle.

dia. 2. n. 9. p. 542. 543.

Conc. t. 4. P. 1053.

c. 11.

Si l'on ne croit pas devoir donner quelques-unes de ces homélies, ni à Eusebe dont parle S. Sulpice, parce que plusieurs d'entre elles paroissent faites seulement après les hérésies de Nestorius et d'Eutiches, quoique l'on puisse supposer que cet Evêque ait vêcu jusqu'à ces temps-là; ni à Eusebe de Nantes, parce qu'il est visible que la plupart de ces mêmes homélies ont été prononcées à Lyon, à Arles, et dans les païs où l'Arianisme s'étoit répandu à la faveur de la domination des Gots et des Bourguignons on ne voit point que l'on

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