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PARIS. Imprimerie PAUL DUPONT, rue de Grenelle-Saint-Honoré, 45

AVERTISSEMENT

S. I.

Eclaircissement de quelques difficultés qu'on fait naitre sur nôtre Ouvrage.

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UELQUES sages mesures que nous aïons prises, pour ne former le plan de nôtre Ouvrage que sur les idées des personnes habiles et de bon goût, nous ne nous sommes pas néanmoins flatés qu'il fût si géneralement approuvé, qu'aucun Critique n'y trouvât à redire. Un siecle aussi fécond qu'est le nôtre en beaux esprits et en gens sçavans, peut bien les avoir rendus plus éclairés que ceux des siecles passés, mais non pas leur avoir inspiré l'uniformité de pensées et de jugemens. De même, quelques soins que nous aïons apportés pour exécuter nôtre dessein de la maniere la plus parfaite qu'il nous a été possible, nous n'avons point eu la témeraire présomtion de croire que nous n'y ferions point de fautes. Au contrai

re' en annonçant l'Ouvrage au Public, nous avons été at- Hist. Lit., t. 1., pr. tentifs à le prévenir sur ce sujet, et à prier avec instance les P. XXVII. XXVIII. Sçavans, de vouloir bien nous les faire connoître.

Quelques-uns, sensibles à nos prieres, ont eu la bonté de le faire, non-seulement avec cette équité naturelle, qui porte à rendre aux autres ce qu'on est en droit d'attendre d'eux, mais encore avec une politesse ingénieuse qui sied si bien aux gens de Letres, et leur donne un nouveau relief. D'au

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tres, qui apparemment n'avoient pas lû cet endroit de nôtre Préface, ont pris une route opposée, et au lieu de nous communiquer à nous-mêmes ce qui leur a paru de défectueux dans nôtre dessein et son execution, ils ont crû devoir en avertir directement le Public.

Le Pour et Contre, « nom. xv, p. 345.

346.

Du nombre de ces Critiques sont deux Ecrivains qui, bien qu'ils parlent dans le même écrit sans se faire connoître par leur nom, ne laissent pas d'être connus avantageusement dans la république des Letres. (1.) Le premier, qui écrivoit à Londres, où il faisoit alors son séjour, s'explique de la sorte: 'On a porté ici (à Londres) un jugement tout contraire (à <«< celui qu'on y a porté du Dictionnaire de Bayle) d'un Livre qui vient de passer la mer: je parle de l'Histoire literaire « de la France. Sans m'arrêter à la Préface, je vois que les << Anglois, fiers peut-être de leur M. Cave, mettent cet essai au<< dessous de lui, et même de M. Du Pin. La critique, disent-ils, << ne consiste point dans quelques réflexions hasardées sur le << mérite d'un Auteur, dans le récit de quelques traits de sa vie, <«<et dans le catalogue de ses ouvrages. Cependant une Histoire << Literaire qui n'est point en même temps une Histoire criti« que, ne sçauroit être un ouvrage fort utile. »

Ici le Public n'a point pris le change. Il a sçû discerner sans peine la voix du particulier de celle de la Nation, à qui il prête de lui-même son organe. Mais sans vouloir approfondir les motifs qui ont porté le Critique anonyme à se parer ainsi du suffrage supposé d'une Nation entiere, que ses lumieres et son équité pourroient bien engager un jour à le desavouer; voïons s'il y a dans sa censure autant de justesse et de vérité, qu'il fait paroître de confiance à la produire au grand jour.

Elle se réduit cette censure à deux points capitaux. On prétend d'une part, que l'Histoire Literaire de la France est au-dessous du Dictionnaire de Bayle; et l'on fait entendre de l'autre, que c'est un Ouvrage dénué de toute critique. Car enfin c'est-là que tendent les principes que pose nôtre Censeur principes au reste dont l'application à nôtre Histoire est aussi fausse, qu'ils sont vrais en eux-mêmes.

Qu'il nous soit permis de demander d'abord, depuis quand le mérite d'un Livre est devenu un titre suffisant pour passer condamnation d'un autre Livre, dont l'objet n'est pas toutà-fait le même. Il faut cependant que cela soit, sans quoi le

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raisonnement de l'Anonyme ne seroit rien moins que concluant. Mais la bonne critique, et encore moins l'équité naturelle, ont-elles jamais permis d'établir un tel parallele, pour favoriser l'envie qu'on auroit de décrier un Ouvrage? Pour en juger sainement il faut l'examiner en lui-même, et non relativement à d'autres qui lui sont étrangers. Il faut voir si le plan en est juste, puis entrer dans le détail, et observer s'il est bien exécuté. Il en est des écrits comme des personnes, au sujet desquelles on sçait qu'en ce sens toutes comparaisons sont odieuses. Qu'on nous rende donc la justice que nous nous rendons nous-mêmes.' Nous n'avons gar- 2. Cor. 10. 11. de de nous comparer à personne, mais nous nous mesurons sur ce que nous sommes véritablement en nous, et nous ne nous comparons qu'avec nous-mêmes.

Que le Dictionnaire de Bayle soit, si l'on veut, le plus ex

cellent Livre qui ait paru en ce genre; que' l'Auteur y prodi- Le Four et Contre, gue ses propres richesses pour faire honneur à celles d'autrui; ibid., p. 345. qu'il soit aussi vrai qu'on le prétend, qu'en retranchant de ce Dictionnaire tout ce qui est de Bayle, ce ne sera plus qu'un livre ordinaire; que les ouvrages de M. Cave et de M. Du Pin aïent encore plus de perfections qu'on ne leur en suppose, que s'ensuivra-t'il de-là ? S'ensuivra-t'il que l'Histoire Literaire de la France soit un mauvais Livre ? s'ensuivra-t'il que le Plan n'en soit pas juste, ou que l'exécution ne réponde pas au dessein? S'ensuivra-t'il qu'il ne s'y trouve ni érudition, ni recherches, ni découvertes interressantes? S'ensuivra-t'il enfin que ce soit un Ouvrage dénué de toute critique ? C'est là néanmoins le raisonnement qu'établit nôtre Censeur pour le persuader. Nous laissons au Public, qui est un Juge aussi éclairé qu'impartial, à juger lui-même de la justesse de ce raisonnement. Mais ne passons pas avec tant de rapidité sur le dernier point, auquel nôtre Censeur s'arrête davantage.

Nous convenons avec lui, que la Critique ne consiste point dans quelques réflexions hazardées sur le mérite d'un auteur, dans le récit de quelques traits de sa vie, et dans le catalogue de ses Ouvrages. Nous convenons encore avec lui, qu'une Histoire Literaire, qui n'est point en même temps une Histoire Critique, ne sçauroit être un Ouvrage fort utile. Mais nous soutenons contre lui, que tous ces caractères désavantageux ne sont point ceux de l'Histoire Literaire de la France, et qu'elle en a de tout opposés. La preuve que nous en produisons, c'est

le Livre même, et le jugement qu'en ont déjà porté des Ecrivains impartiaux et reconnus pour habiles connoisseurs.

Qu'on se donne donc la peine d'ouvrir le Livre à quel article, ou à quelle page on voudra, et qu'on juge s'il n'y a véritablement que quelques réflexions hazardées sur le mérite des Auteurs, ou si ce n'est pas plutôt un jugement hasardé que de le prétendre. Nous, hazarder des réflexions, après l'attention perpetuelle que nous avons à citer nos garans, et au défaut de garans, à appuïer ce que nous avançons sur des raisonnemens tirés des choses mêmes! Pour nous faire un pareil reproche, il faut ou n'avoir pas lû nôtre Ouvrage, ou vouloir s'exposer à passer soi-même pour un homme qui hasarde ses conjectures.

Que l'on continue à parcourir le Livre; et pour peu qu'on veuille faire usage de ses yeux et de sa bonne foi, y trouverat'on que nous nous y soïons bornés au récit de quelques traits de la vie de nos Ecrivains? M. Cave et M. Du Pin qu'on nous oppose ici, et auxquels nous avons déja déclaré que nous ne prétendions point nous comparer, ont-ils mieux réussi à caractériser la personne des Auteurs dont ils parlent, que nous celle des Hommes de Letres dont nous donnons l'histoire ? S'il est trop embarrassant de conférer les portraits, on peut bien s'en rapporter au sçavant Auteur du Journal de TreJourn. de Trev. Voux, qui rendant compte de nôtre Ouvrage, s'exprime 1733., pag. 1995. ainsi au sujet des premiers Gaulois qui y paroissent: «Nous << pouvons assurer, dit-il, que nos Historiens n'ont rien omis << pour mettre le Public en état de les bien connoître. >>

1896.

p. xv.

Il ne faut non plus que des yeux et de la droiture de cœur pour convenir que nous faisons autre chose que donner un Hist. Lit., t. I., pr. simple catalogue des Ouvrages de nos Sçavans. La Préface génerale de notre Histoire promet à ce sujet, non-seulement des remarques critiques et historiques; mais elle annonce encore que presque toujours nous faisons des extraits et souvent des sommaires, ou même des analyses entieres des écrits les plus considérables. Assurément, nous avons été exacts à remplir les engagemens que nous avons contractés Le Pour et Cont., par cette Préface. Mais comme notre Critique avoue luimême ne s'y être pas arrété, qu'il se donne la peine de recourir aux endroits où nous traitons des écrits de nos Auteurs. A commencer par Pitheas et Euthymenes et à aller de suite d'article en article à Val. Cato, à Corn. Gallus, P. Teren

ibid.

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