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tius Varro, Trogue Pompée, Germanicus, l'Empereur Claude, Petrone, et tant d'autres; peut-on dire sans être soupçonné de vouloir imposer au Public, qui a le moïen de s'en convaincre par lui-même, que nous ne faisons que donner un simple catalogue de ces grands Hommes? Outre les remarques historiques et critiques promises dans le titre de l'Histoire, n'y voit-on pas le soin que nous y avons par-tout d'en marquer la chronologie, le sujet, l'occasion, le sort, les principales avantures, et d'en rapporter des extraits? Nous poussons encore les choses plus loin aux articles de Mamertin, d'Eumene, de Lactance, d'Ausone, des Peres de l'Eglise. Et le grand nombre des différentes éditions de tous ces écrits, qui est censé faire partie de leurs catalogues, doit-il être compté pour rien?

Une Histoire Literaire exécutée de la sorte, peut sans contredit passer pour être en même tems une Histoire critique. Qu'est-ce en effet que la critique parmi le monde sçavant, sinon un goût, un discernement, une science, une certaine sagacité qui fait juger sainement des choses, qui fait démêler le vrai d'avec le faux, le certain d'avec le douteux, l'effectif d'avec le supposé, et qui porte à choisir l'un, à rejetter l'autre, à préferer un sentiment mieux fondé à celui qui l'est moins? Or il est constant, et le Public, au tribunal duquel nôtre cause est pendante, en jugera, s'il n'en a déja jugé, que la maniere don 'Histoire Literaire de la France est exécutée, montre partout qu'on y a suivi ces régles. Oui, nous osons l'avancer, soit qu'on l'examine en elle-même, soit qu'on ne fasse que lire les extraits qu'en a donnés une habile plume dans les Journaux des Sçavans de Paris, on n'en prendra point d'autre idée.

L'autre Critique auquel nous avons à répondre, est encore un Anonyme, mais qui n'avoit point d'intérêt, comme le premier, à faire sa cour aux Anglois par des comparaisons qui tournent presque toujours à l'avantage de l'Angleterre. Celui-ci a pris la peine de lire l'Ouvrage, et de l'examiner en lui-même, tant par rapport au dessein, qu'à l'exécution du dessein. Le jugement qu'il en porte, tient du génie de Nom. xxI., pag. 136l'écrit où il s'en explique. Il y a du Pour, il y a du Contre, du bien et du mal, des choses avantageuses, et d'autres qui ne le sont pas. Les premieres peuvent être au-dessus du mérite de l'Ouvrage, et sont certainement au-dessus de celui

Pag. 135. 136.

des Auteurs; mais elles ne seront jamais au-dessus de leur juste reconnoissance. Pour les autres, elles exigent de nous, que nous entrions dans quelques explications; et nôtre nouveau Censeur a trop d'équité et de politesse pour le trouver mauvais.

Deux objets principaux, auxquels se rapportent tout le reste font la matiere de sa Critique: la vaste étendue de nôtre entreprise, et les sujets qui doivent entrer dans son exécution. 'L'ouvrage, donne-t'on à entendre, est d'un travail si immense qu'il paroît au-dessus des forces de l'humanité, et peu convenable à la courte durée de la vie. Sa seule idée fait fremir la paresse humaine. Il exige des connoissances d'une prodigieuse étendue; et l'on a d'abord de la peine à se persuader que les Auteurs viendront à bout de leur dessein. Voilà le Contre. Mais il est certain, ajoute-t'on aussi-tôt, qu'il y a des hommes laborieux à l'excès, et d'un courage surprenant, que ces grandes entreprises literaires n'effraient point; et ce qui nous confond, c'est qu'ils en viennent à bout. Voilà le Pour.

A quel dessein après tout nous rappeler ici une difficulté, que nous avons déjà prévenue et fait sentir, sinon avec les mêmes termes, peut-être au moins avec autant d'énergie? Qu'on se donne la peine de jetter les yeux sur la troisième et quatrième page de notre Préface générale; et l'on verra que cette difficulté y est développée et mise dans tout son jour. Et que nous auroit-il servi de vouloir la dissimuler? Le seul titre de nôtre Ouvrage n'auroit-il pas trahi toutes nos précautions? Mais sans prétendre nous autoriser des exemples des Baronius, des de Thou, des Codwetts, des Bayles, qu'on produit ici, et nous confiant à la seule protection de celui qui est la force des foibles, et qui sçait se servir des plus vils instrumens pour opérer les plus grandes choses, nous espérons, quoi qu'on en puisse dire, pousser fort loin, si même nous ne le portons pas à son dernier terme, l'Ouvrage dont on releve si fort la vaste étendue. Un travail assidu de dix-neuf ans, joint aux secours étrangers que nous avons déjà reçus, et que nous pourrons encore recevoir, nous a procuré des provisions assez considérables, pour que nôtre espérance, soutenue par le benefice du temps, ne puisse pas passer pour témeraire, autant toutefois qu'il est permis de compter sur le lende

main.

De cette difficulté l'on passe à une autre, qui demande une

a

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Le Pour et Cont.

b. p. 143.

plus grande discussion. L'on désaprouve que nous fassions indifféremment entrer dans nôtre Histoire tous les Ecrivains qu'ont produit les Gaules, et que nous y donnions place à quelques Hommes de Letres qui n'ont rien écrit ; quoique nous Hist. Lit., ib.,p. vi. nous soïons déja expliqués sur ce dernier point, de maniere à écarter toute critique. On voudroit que nous ne parlassions que de ceux qui ont laissé des ouvrages à la postérité, et que nous ne fissions pas même cet honneur à ceux dont il ne reste aucun monument; si ce n'est à quelques Auteurs célebres dans l'antiquité, dont les ouvrages ont été malheureusement perdus. On voudroit encore que nous missions à l'écart les Pe- Pag. 144. res, les Auteurs Ecclésiastiques, les Hérétiques, les Controversistes,' et tout ce qui regarde l'Histoire des hérésies et les Pag. 143. Conciles, parce que ce sont des matieres si souvent traitées, et maintenant épuisées. On voudroit enfin que nous fissions un Pag. 144. choix des choses qui concernent les Ecrivains dont on parleroit, sans nous embarrasser d'une infinité de citations.

Tel est en peu de mots le nouveau plan qu'on nous trace ici, plan au reste qui favoriseroit beaucoup la paresse trop naturelle à l'homme, et qui nous épargneroit infiniment de travail, s'il nous étoit permis de le suivre. Mais en nous y attachant, dans quel embarras nous jetterions-nous, tant par rapport à faire choix des Auteurs, qu'à contenter le Public sur ce choix? Si quelques-uns approuvoient que nous missions à l'écart tels et tels Ecrivains, combien s'en trouveroitil d'autres qui le blâmeroient, prétendant qu'ils mériteroient moins d'être rejettés, que ceux que nous aurions choisis? Cet inconvénient se fait encore mieux sentir qu'on ne le peut exprimer.

D'ailleurs pourrions-nous véritablement passer pour donner une Histoire Literaire de la France, comme nous nous le sommes proposé? Ne seroit-ce pas plûtôt une simple Bibliothèque choisie des Auteurs seulement profanes de la France? Que penseroit-on d'un Géographe qui, aïant entrepris de faire une carte ancienne et moderne de toute l'étendue des Gaules, n'y feroit entrer ni Paris, ni Roüen, ni Lyon, ni Toulouse, ni Bourdeaux, ni la Seine, ni la Loire, ni le Rhône, parce qu'ils sont assez connus; et qui des autres Villes et Rivieres n'y marqueroit que les principales ? Que penseroit-on d'un Historien qui, aïant formé le projet d'une Histoire ecclésiastique et séculiere de la France, n'y

parleroit ni de nos premiers Evêques, ni des personnages les plus illustres en sainteté, ni des mœurs, ni du gouvernement de la Nation, etc., sous prétexte que toutes ces matieres ont été si souvent traitées, et se trouvent épuisées ? Ce que l'on penseroit de ces deux entreprises ainsi executées, on le penseroit de nôtre Histoire, si nous la mesurions sur le nouveau plan qu'on nous en trace. Quel affreux vuide y paroîtroit depuis le IV siecle jusqu'au xv! Et dans les siecles suivans, comme dans les autres, que d'Ecrivains François ou anéantis, ou renvoïés peupler un autre monde! De plus de trois mille Auteurs qu'ont recueillis la Croix du Maine et du Verdier, il faudroit en retrancher plus des trois quarts. Que deviendroit par-là la peine que nous avons déjà prise d'en faire une compilation, et d'y en joindre plus de mille autres ?

Bien davantage, il ne nous seroit pas même permis de faire sortir de l'obscurité, où jusqu'ici ils auroient été ensevelis, des Auteurs Ecclésiastiques, de quelque mérite qu'ils pussent être, et d'en grossir le catalogue de nos Ecrivains François. Encore moins nous seroit-il permis de revendiquer à quelques autres entre ceux-ci, des ouvrages qu'on leur auroit ôtés pour les transporter à des étrangers. Il n'est cependant guéres de siecles où l'occasion ne se présente de faire l'un et l'autre, comme on a vû qu'elle s'est présentée au Journ. des scav. IV, et que nous l'avons saisie avec un succès qui a mérité l'applaudissement du Journal des Sçavans de Paris.

1754. Fév.

Mais nous nous trompons ; celui qui nous prescrit des bornes si étroites, ne le fait apparemment que par rapport à lui, et à ceux qui peuvent penser comme lui. S'étant familiarisé avec le brillant, le nouveau, le magnifique, il voudroit ne voir paroître de Livre que dans le même goût.

Non sans doute, son intention ne peut aller plus loin. L'Histoire Literaire qui nous occupe, est un tout, et ne peut par conséquent subsister sans toutes ses parties. Il est donc nécessaire que la doctrine essentiellement liée avec la Literature, et en conséquence l'histoire des hérésies qui en est une suite, y entrent pour quelque chose. Comment, par exemple, pouvoir donner une juste idée du génie du XVI siecle pour les Letres, sans dire quelque chose des hérésies de Luther et de Calvin, qui y exercerent les plumes de part et d'autre avec tant de chaleur? Et quoi! peut-on trouver

mauvais

mauvais que pot
lions en un corps gloire de nôtre Nation, nous recueil-
re Françoise, ce que poire tout ce qui concerne la Literatu-
Sur ce principe, lesne n'a encore exécuté?

teurs du premier ordre, ulings François, comme les Au-
que chacun suivant son met y trouver leur place, quoi-
de quelle sorte on tomberoit son peut préjuger sans peine
de mettre à l'écart, nous ne disous, si nous nous avisions
mais seulement même les Scholasts les Peres de l'Eglise,
monaires, les Auteurs Ascetiques; les Casuistes, les Ser-
ger' par la sortie qu'on a déja faite suut, dis-je, le préju-
noncé que nous passerions légerement gus, pour avoir an- Jour de Trev. 1833.
vains. Nous sera-t'il cependant permis de des sortes d'Ecri- p. 1984.
qu'on nous fait à cette occasion, l'on pouvoifi, que le procès
en concluant delà, conformément à notre inteìus l'épargner,
ferions encore moins d'honneur aux Auteurs de que nous
pides, d'Ecrits satyriques, de Poësies obscénes, Quvrages
burlesques, de Libelles diffamatoires, etc. Assurém on ne
nous accusera jamais avec justice, de donner à ces su
Scriblings la préference sur les Auteurs Ecclesiastiques.

nans insi

es de

XVII.

A l'égard des Conciles,' ce que nous avons déja dit up Hist. Lit. ib. p. montrer qu'ils ne doivent point être exclus d'une Histo Literaire, est plus que suffisant pour le persuader, quelque inclination que nous eussions d'ailleurs de ne leur y point accorder d'entrée.

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ib. p. 138. 139.

Nous n'entreprendrons pas au reste de suivre nôtre ingénieux Critique, dans tout ce qu'il dit pour prévenir ses Lec- Le Pour et Cont. teurs en faveur de la premiere partie du nouveau plan qu'il nous propose. C'est une plume agréable qui cherche à badiner et à plaisanter. Il faut avouer qu'elle le fait avec grace et avec esprit, quoiqu'aux dépens de plusieurs illustres Gaulois, qu'elle suppose morts peut-être même, dit-elle, de leur vivant. Mais si cela est, comment le Continuateur de César, comment Ovide, Columelle, Seneque pere et fils, Lucain, Martial, les deux Plines, Suetone, Tacite, Galien, ont-ils eu la vertu de les ressusciter? Voilà une partie de ceux qui ont, ou vú, ou entendu parler de M. Antoine Gniphon, de Telon, de Gyarée, d'Agrotas, de Julius Græcinus, etc., et ce n'est que d'après eux que nous les avons fait revivre.

Du plaisant on passe ensuite au serieux; et l'on ne voit pas, dit-on, dit-on, que les Césars à qui nous donnons place dans nôtre Tome II.

b

149. 243.

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