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pénétrant, ou pefant, ou aimable, felon fon humeur.

On confond fouvent dans le caractere les qualités de l'ame & celles de l'efprit. Un homme eft doux & facile, on le trouve infinuant. Il a l'humeur vive & légere, on dit qu'il a l'efprit vif; il eft diftrait & réveur, on croit qu'il a l'efprit lent & peu d'imagination. Le monde ne juge des chofes que par leur écorce; c'est une chofe qu'on dit tous les jours, mais que l'on ne fent pas affez. Quelques réflexions en paffant fur les caracteres les plus généraux nous y feront faire attention.

DU SERIE U X.

UN des caracteres les plus généraux, c'est le férieux; mais combien de caufes différentes n'a-t-il pas, & combien de caracteres font compris dans celui

ci? On eft férieux par tempéramment, par trop ou trop peu de paffions, trop ou trop peu d'idées, par timidité, par habitude & par mille autres raifons.

L'extérieur diftingue tous ces divers caracteres aux yeux d'un homme attentif.

Le férieux d'un efprit tranquille porte un air doux & serein. Le fériéux des paffions ardentes eft fauvage, fombre, allumé. Le férieux d'une ame abattue donne un extérieur languiffant.

Le férieux d'un homme ftérile paroît froid, lâche & oifif.

Le férieux de la gravité, prend un air concerté comme elle. Le férieux de la diftraction porte des dehors finguliers.

Le férieux d'un homme timide n'a prefque jamais de maintien. Perfonne ne rejette en gros ces vérités, mais faute de principes. bien liés & bien conçûs, la plû

part

des hommes font dans le détail & dans leurs applications particulieres, oppofés les uns aux autres & à eux-mêmes ; ils font voir la néceffité indispensable de bien manier les principes les plus familiers, & de les mettre tous enfemble fous un point de vûe, qui en découvre la fécondité & la liaison.

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DU SANG-FROID.

Nous prenons quelquefois pour le fang-froid une paffion férieufe & concentrée, qui fixe toutes les penfées d'un efprit ardent, & le rend infenfible aux autres choses.

Le véritable fang-froid vient d'un fang doux, tempéré, & peu fertile en efprits. S'il coule avec trop de lenteur, il peut rendre l'efprit pefant; mais lorsqu'il est reçû par des organes faciles & bien conformés, la jufteffe, la

réflexion, & une fingularité aimable fouvent l'accompagnent. Nul efprit n'eft plus défirable. On parle encore d'un autre fang-froid que donne la force d'efprit, foutenue par l'expérien ce & de longues réflexions; fans doute c'eft là le plus rare.

DE LA PRESENCE D'ESPRIT.

LA préfence d'efprit se pourroit définir, une aptitude à profiter des occafions pour parler ou pour agir. C'eft un avantage qui a manqué fouvent aux hommes les plus éclairés, qui demande un efprit facile, un fang-froid modéré, l'ufage des affaires, & felon les différentes occurrences divers avantages; de la mémoire & de la fagacité dans la difpute; de la fécurité dans les périls; & dans le monde, cette liberté de cœur, qui nous rend attentifs à tout ce

qui s'y paffe, & nous tient en état de profiter de tout, &c.

DE LA DISTRACTION.

IL y a une distraction assez semblables aux rêves du fommeil, qui eft lorfque nos pensées flottent & fe fuivent d'elles-mêmes fans force & fans direction. Le mouvement des efprits fe rallentit peu à peu; ils errent à l'avanture fur les traces du cerveau, & réveillent des idées fans fuite & fans vérité; enfin les organes fe ferment, nous ne formons plus que des fonges, & c'est-là proprement réver les yeux ouverts.

Cette forte de diftraction eft bien différente de celle où jette la méditation. L'ame obfédée dans la méditation d'un objet qui fixe fa vûe, & qui la remplit toute entiere, agit beaucoup dans ce repos; c'est un état tout oppofé,

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