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CHAPITRE XIV.

Talleys de l'herome dans fès voces, O dins Jis defauts. Nimic force qu'en Drem. S1 les veruks purement humaines ne font que foibleftes, que doit-on inger des vices? Quelle plus grande foibleite que celle d'un ambiticux: Il néglige tous les biens récks & folides de la vie, il s'engage à mille dangers & à mille traverses, parce qu'il ne peut fouffrir qu'un autre ait für lui quelque vaine preeminence.

Quelle foibleffe que de regarder, comme nous faifons avec complaifance, mille chofes ridicules, lors même que nous fommes

que

48 CHAP

De la foiblefe de l'homme. perfuadés qu'elles le font? Qui eft-ce qui n'eft pas convaincu, c'eft une baffelle de fe croire digne d'eftime, parce qu'on eft bien vêtu, qu'on eft bien à cheval, qu'ọn cft jufte à placer une balle, qu'on marche de bonne grace? Cependant combien y en a-t-il peu qui foient au-deffus de ces chofes-là, & qui ne foient pas flattés quand on les en loue?

Peut-on s'imaginer une plus grande foibleffe que celle qui fait trouver tant de goût dans les divertiffeinens du monde? Car eftil poffible de réduire une ame à un état plus bas, & plus indigne d'elle, que de lui interdire toute autre penfée pour ne l'occuper que du foin de conduire le corps qu'elle anime felon la cadence d'un inftrument de mufique, ou de fuivre des bêtes qui courent après d'autres bêtes? Cependant c'eft prefque là tout ce qui fait le divertif fement des Princes & des Grans. Cette privation de toutes penfees raisonnables, & cette application totale de l'ame à un objet groffier, vain & inutile, eft ce qui fait le plaifir de tous les jeux. Moins l'homme agit en homme, plus il eft content. Les actions, où la raifon a beaucoup de part, le laffent & l'incommodent, & fa pente eft de fe réduire, autant qu'il peut, à la condition des bêtes.

L'homme fait ce qu'il peut pour fe diffi muler fa propre foibleffe; mais quoi qu'il faffe, il ne laille pas de la fentir, toute fon application eft à y chercher des remedes; mais il fe conduit avec fi peu de lumiere.

XIV.

Chryf.

hom. 79.

in Foan.

CHAP. minuer, il l'augmente. Le but des ambitieu XIV. & des voluptueux n'eft en effet que de foutenir leur propre foiblefle, par des appuis étrangers. Les ambitieux tâchent de le faire par l'eclat & par l'autorité; les voluptueux par les plaifirs. Les uns & les autres cherchent à fatisfaire à leur indigence; mais ils y réuffiffent également mal, parce qu'ils ne font qu'augmenter leurs befoins & leurs néceffités, & leur foibleffe par confequent. foftome, les Anges de nous, Qu'est-ce qui diftingue, dit faint Chryfion qu'ils P.413. Ainfi ceux qui en ont moins, approchent ne font pas preffes de befoins comme nous ? plus de leur état, & ceux qui en ont plus en font les plus éloignés: Celui qui a besoin de beaucoup de chofes, dit encore ce même Pere, eft efclave de beaucoup de chofes, il eft lui-même ferviteur de fes ferviteurs, & il dépend plus qu'ils ne dépendent de lui. De forte que l'augmentation des biens & des honneurs de ce monde ne faifant qu'augmenter les fervitudes & les dépendances, nous réduit ainfi à une mifere plus effective.

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Ne cherchons donc point de force dans la nature de l'homme. De quelque côté que nous la regardions, nous n'y trouverons que foiblefie & qu'impuiffance. C'est en Dieu feul & dans fa grace qu'il la faut chercher. C'eft lui feul qui peut éclairer les tenebres, affermir fa volonté, foutenir la vie temporelle autant de tems qu'il veut & changer enfin les infirmités de fon ame & de fon corps en un état éternel de gloire & de force. Tout ce que nous avons die

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de la foibleffe de l'homme ne fert qu'à rele- CHAP ver le pouvoir de cette grace qui le foutient. XIV. Car quelle force ne faut-il point qu'elle ait, pour rendre victorieufe d'elle-même & du démon, une créature fi corrompue fi foible & fi miferable; pour l'élever audeffus de toutes chofes, & pour lui faire furmonter le monde avec tout ce qu'il a de trompeur,

d'attirant & de terrible: Ma- Aug. de gnâ gratiâ opus eft, ut cum omnibus amori- corrept. bus terroribus erroribus fuis vincatur hic & grat. mundus.

,

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cap. 12. 13.35.

CHAPITRE XV.

La foibleße de l'homme paroît encore davan-
tage en quelque forte, dans ceux
qui font à Diew.

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Mieux voir la puifance de la grace
Ars, s'il eft vrai que rien ne fait

que la foibleffe de l'homme, on peut dire
auffi, que rien ne découvre tant la foibleffe
de l'hoinme que la grace même; & que les
infirmités de la nature font en quelque for-
tes plus vifibles dans ceux que Dieu a le
plus favorifes de fes graces. Il n'eft pas fi
trange que des gens environnés de tene-
bres, qui ne favent ce qu'ils font, ni ce
les im-
qu'ils font, & qui ne fuivent que
preffions de leurs fens, ou les caprices de
leur imagination, paroiffent legers in-
conftans & foibles dans leurs actions. Mais
qui ne croiroit que ceux que Dicu a éclai-

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CHAP. qu'il eft comme fufpendu par une infinité XII. de fils foibles & déliés, à un grand nombre de chofes vaines, & qui ne dépendent pas de lui: de forte que comme il ya toujours quelqu'un de ces fils qui fe rompt, il tombe auffi en partie & reçoit une lecouffe qui le trouble. On cft porté par le petit cercle d'amis & d'approbateurs, dont on eft environné ; car chacun tâche de s'en faire un, & l'on y réuffit ordinairement. On eft porté par l'obéiflance & l'af fection de fes domestiques, par la protec tion des Grans, par de petits fuccès, par des louanges, par des divertiffemens, par des plaifirs. On eft porté par les occupations qui amufent, par les efperances que l'on nourrit, par fes deffeins que l'on forme, par les ouvrages que l'on entreprend On eft porté par les curiofités d'un cabi ner, par un jardin, par une maison des champs. Enfin il eft étrange à combien de chofes l'ame s'attache,& combien il lui faut de petits appuis pour la retenir en re

pos.

On ne s'apperçoit pas pendant que l'on poflede toutes ces chofes combien on en cft dépendant. Mais comme elles viennent fouvent à manquer, l'on reconnoît par le trouble

que l'on en reffent, que l'on y avoit une attache effective. Un verre caffe nous impatiente; notre repos en dépendoit donc. Un jugement faux & ridicule qu'un impertinent aura fait de nous, nous penetre jufqu'au vif; l'eftime de cet impertinent, ou au moins l'ignorance de ce jugement faux, qu'il fait de nous, contribuoit donc à nɔ

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