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Prefentes, qui fera imprimée au commence ment ou à la fin defdits Livres, foit tenue pour dûement signifiée, & qu'aux copies collationnées par l'un de nos amés & feaux Confeiller's & Secretaires foi foit ajoûtée comme à l'original: Commandons au premier notte Huiffier ou Sergent de faire pour l'execution d'icelles tous actes requis & neceffaires, fans demander autre permiffion, nonobftant clameur de Haro, Chartre Normande, & Lettres à ce contraires; Car tel eft notre plaifir. Donné à Paris le vingt-deuxième jour de Decembre l'am de grace mil fept cens dix-fept, & de notre regne le troisiéme. Signé par le Roi en fon Confeil, DE SAINT HILAIRE.

Regifré fur le Regiftre IV. de la Communaure des Libraires & Imprimeurs de Paris, page 272. conformément aux Reglemens, & notam ment à l'Arrêt du Confeil du 13. Mout 1713. A Paris ce 20. Janvier 1718.

DE LAULNE, Syndic.

Collationné à l'Original par moi Confeiller du Roi, Maifon, Couronne de France & de fes Finances.

Le fieur Charles Robuftel a cedé à Meffieurs Defprez & Defeffartz le Privilege des œuvres de faint Jean Chryfoftome, de l'Edition du R. P. D. Bernard de Montfaucon, fuivant la la part & portion defdits fieurs. Plus a cedé aufdits fieurs le Privilege entier des Livres fuivans; favoir, Les Effais de Morale par le fieur Nicole, avec les Continuations; Cat de Con. fcience par le fieur de Sainte-Beuve; Penfées Chrétiennes, tirées de l'Ecriture & des faints Peres.

ESSAIS

DE

MORAL E.

PREMIER TRAITE.

De la foibleffe de l'homme. Miferere mei, Domine, quoniam infirmus fum. Pfal. 6. v.3.

Ayez pitié de moi, Seigneur, parce que je fuis foible.

CHAPITRE PREMIER. Idée que l'orgueil nous donne de nous-mêmes. On ne travaille dans le monde que pour embellir cette idee. Que l'orgueil de tous les peuples eft de même nature, des grans, des petits, des nations policées des fauvages.

'ORGUEIL eft une enflure du coeur par laquelle l'homme s'étend & fe groffit en quelque forte en lui-meme & tehaulle for idée celle de force, de gran

par

deur & d'excellence. C'eft pourquoi les richeffes nous élevent, parce qu'elles nous

CHAP.

I.

donnent lieu de nous confiderer nous-mê"mes comme plus forts & plus grans. Nous les regardons, felon l'expreffion du Sage, comme une ville forte qui nous met à couvert des injures de la fortune, & nous donProv. 18. ne moyen de dominer fur les autres: Les richeffes du riche font comme une ville qui le Serm.s.de fortifie. SUBSTANTIA divitis urbs roboris ejus: & c'eft ce qui caufe cette élevation interieure qui eft le ver des richeffes, comme dit faint

II.

verb. Dom.

n. edit. Auguftin.

SI.n. 10.

me,

L'orgueil des Grans eft de inême nature que celui des riches, & il confifte de même dans cette idée qu'ils ont de leur force. Mais comme en fe confiderant feuls, ils ne pourroient pas trouver en eux-mêmes dequoi la former, ils ont accoutumé de joindre à leur être, l'image de tout ce qui leur appartient & qui eft lié à eux. Un Grand dans fon idée n'eft pas un feul homc'eft un homme environné de tous ceux qui font à lui, & qui s'imagine avoir autant de bras qu'ils en ont tous enfemble, parce qu'il en difpofe & qu'il les remue. Un General d'armée fe reprefente toujours à lui-même au milieu de tous les foldats. Ainfi chacun tâche d'occuper le plus do place qu'il peur dans fon imagination, & l'on ne fe pouffe & ne s'agrandit dans le monde que pour augmenter lidée que chacun fe forme de foi-même. Voila le but de tous les defleins ambitieux des hommes. Alexandre & Cefar n'ont point eu d'autre vue dans toutes leurs batailles que celle-là. Et fi l'on demande pourquoi le Grand feigneur a fait depuis peu perir cent mille hom

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mes devant Candie, on peut répondre fù- CHAP tement, que ce n'eft que pour attacher encore à cette image inteticure qu'il a de luimême, le titre de Conquerant.

C'eft ce qui nous a produit tous ces titres faftueux qui fe multiplient à mesure que l'orgueil interieur eft plus grand ou moins déguife. Je m'imagine que celui qui s'est le premier appellé, haut & puffant Seigneur, fe regardoit comme élevé fur la tête de fes vaffaux, & que c'eft ce qu'il a voulu dire par cette épithete de haut, fi peu convenable à la baffeffe des hommes. Les nations orientales furpaffent de beaucoup celles de l'Europe dans cet amas de titres, parce qu'elles font plus fottement vaines.Il faut une page entiere pour expliquer les qualités du plus petit Roi des Indes, parce qu'ils y compren→ nent le dénombrement de leurs revenus, de leurs élephans & de leurs pierreries, & que tout cela fait partie de cet être imaginaire, qui cft l'objet de leur vanité.

Peut-être même que ce qui fait defirer aux hommes avec tant de paffion, l'approbation des autres, eft qu'elle les affermit & les fonifie dans l'idée qu'ils ont de leur excellence propre: : car ce fentiment public les en affiirc,& leurs approbateurs font coinme autant de témoins qui les perfuadent qu'ils ne fe trompent pas dans le jugement qu'ils font d'eux-mêmes.

L'orgueil qui naît des qualités fpirituelles eft de même genre que celui qui eft fondé fur des avantages exterieurs; & il confifte de même dans une idée qui nous reprefente grans à nos yeux, & qui fait que nous nous

CHAP. jugeons dignes d'eftime & de préference. I. foit que cette idée foit formée fur quelque qualité que l'on connoifle diftinctement en foi; foit que ce ne foit qu'une image confufe d'une excellence & d'une grandeur que l'on s'attribue.

C'eft auffi cette idée qui caufe le plaifir ou le dégoût que l'on trouve dans quantité de petites chofes qui nous flattent ou qui nous bleffent, fans que l'on en voie d'abord la raifon. On prend plaifir à gagner à toutes fortes de jeux, même fans avarice, & l'on n'aime point à perdre. C'eft que quand on perd, on fe regarde comme malheureux, ce qui renferme lidée de foibleffe & de mifere; & quand on gagne, on fe regarde comme heureux, ce qui prefente à l'efprit celle de force, parce qu'on fuppofe qu'on eft favori fe de la fortune. On parle de même fort vo lontiers de les maladies, ou des dangers que l'on a courus, parce qu'on le regarde en cela, ou comme étant protegé particulierement de Dieu, ou comme ayant beaucoup de force ou beaucoup d'adreffe pour refifter aux maux de la vie.

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