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norité, fe déclarerent prefque tous contre Nitard, & foutinrent D. Juan d'Autriche fon ennemi; le Jéfuite témoigna d'abord du courage & de la grandeur d'ame: C'est vous, difoit-il à un Grand, qui me devez du respect, à moi qui ai tous les jours votre Dieu entre les mains, & votre Reine à mes pieds. Mais les obftacles qu'il ne put vaincre lui firent comprendre qu'il eft plus aifé de gouverner une femme dévote & bornée, qu'une Cour orageufe, & des Grands fiers & mutins.

La Cour confentit que l'Ambaffadeur d'Angleterre (Fanshau) s'abouchât à Salvaterra avec le Comte de Caftelmelhor, premier Miniftre de Portugal pour conclure la paix entre les deux Couronnes: la Reine donna d'autant plus volontiers les mains à cette négociation, que l'Espagne étoit menacée d'un ennemi bien plus redoutable que l'imbécille & furieux Alfonfe VI. Je veux parler de Louis XIV. qui vouloit faire valoir les droits de la Reine fon époufe fur certaines Provinces des Pays-Bas que la Coutume & la (a) Jurifprudence du Pays

(a) La Loi de dévolution avoit lieu, fur-tout en Brabant.

transportoient aux filles du premier lit au préjudice des mâles qui étoient venus d'un fecond mariage. Les François établirent les droits de leur Reine dans de longs manifeftes. On y répondit par d'autres écrits, & on oppofa fur-tout la renonciation de Marie-Therefe; mais quand cette renonciation n'eût pas été nulle en elle-même par rapport à la Monarchie, ne l'étoit-elle pas vis-à-vis de ce droit particulier; d'ailleurs, encore une fois la dot, au moyen de laquelle on l'avoit forcé de renoncer, n'ayant pas été payée, la reine rentroit fans difficulté dans fes droits.

L'efpérance de profiter des troubles & du mécontentement que la fureur & les excès du Roi de Portugal ne pouvoient manquer d'exciter dans fon Royaume, firent tirer la négociation en longueur de la part de l'Espagne ; la Régente fe flatta que toute l'Europe fe ligueroit pour arrêter Louis XIV.dans fes projets fur les Pays-Bas : c'étoit mal raifonner; l'Empereur n'avoit ni argent, ni troupes; l'Angleterre & la Hollande fe faifoient une guerre implacable, la moitié de l'Empire étoit dans les intérêts du

Roi de France; Louis étoit feul en Europe heureux, riche & puiffant; l'Efpagne ne prit point de part à une guerre qui s'éleva entre la Hollande & l'Evêque de Munster fur les frontieres des Pays-Bas ; la France & le Dannemarck s'étoient déclarés pour les Etats Généraux contre les Anglois.

à

On ne put réfifter cette campagne Schomberg qui eut plufieurs fois l'avantage fur les Généraux Efpagnols; au

cun d'eux n'ofa en venir aux mains avec lui, & on lui laiffa tranquillement enlever des Villes, & ravager l'Eftramadoure; le Prince de Parme, fur les fins de la campagne tailla en pieces quatre Régiments de cavalerie Portugaife.

Les Maures leverent le fiége de Larache fur la côte d'Afrique, après avoir perdu deux mille hommes devant cette Ville défendue par deux cent cinquante Efpagnols.

La Reine Douairiere de France, Anne d'Autriche étoit morte le vingt-cinq Janvier; fa mémoire eft immortelle en France où elle porta le goût, la politeffe, & ce talent charmant pour la Société qui diftingue les François des autres Peuples

1667.

On croit

que fi cette Princeffe eût vécu plus long-tems, Louis XIV. à fa confidération n'auroit pas attaqué les PaysBas Efpagnols; la paix des Pyrenées qui fut à la vérité l'ouvrage de Mazarin, n'avoit été négociée que par les ordres réïtérés de cette grande Reine.

La Reine de Portugal, Louise de Guzman, dépouillée du Gouvernement par fon fils, mourut dans un Couvent de Lifbonne le vingt-huit Février. La Maison de Bragance lui doit la Couronne qu'elle porte aujourd'hui. La Princeffe dont je viens de parler, fouffrit fa difgrace avec le même courage qu'elle fit paroître à la tête des affaires.

Le Comte de Sandvich, nouvel Ambaffadeur d'Angleterre, fit renouer les conférences pour la paix avec le Portugal; les ennemis furent repouffés de devant Gurumena & Albuquerque ; mais le Roi de France que la cour de Madrid eût pû fatisfaire par la ceffion de quelques Villes dans les Pays-Bas, profitoit habilement de l'état de l'Europe pour faire la conquête prefqu'entiere des Pays-Bas ; fuivi de Turenne & de foixante mille. hommes, il conquit Amentieres, Ber

gues, Furnes, Charleroi, Ath, Tournai, Douai, Courtrai, Oudenarde Aloft, Lille; il vainquit le Général Marfin le trente-un Août : de tels progrès auxquels l'Europe n'étoit plus accoutumée, fufpendirent l'animofité de l'Angleterre & de la Hollande, ces deux Puiffances également effrayées des fuccès brillans de Iouis XIV. fignerent la paix à Breda le trente-un Juillet pour arrêter de concert la fortune de la France. La Régente ne put envoyer le moindre fecours d'hommes & d'argent dans les Pays-Bas ; elle fe contentoit de faire dire par le Roi fon fiis, lorfque les Grands venoient lui faire la cour: défendez moi, je fuis innocent.

y

Sur les frontieres du Rouffillon il eut quelques hoftilités qui n'aboutirent à rien. Le Roi de France ne déclara point la guerre, regardant fon entreprife comme une fimple prife de poffeffion des Etats qui étoient dévolus à fon épouse, mais l'Efpagne la lui déclara avec les formalités ordinaires.

Par une révolution inouie, le Roi de Portugal fe voit enlever en même-tems par fon frere D. Pedro & fon époufe &

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