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quelle la poitrine agit pour élever les poumons. Lorfque je foufflois avec force dans la cavité du thorax, le chien étoit près d'expirer. Je tirai l'air qui étoit contenu dans le thorax, par le moyen d'un court tuyau qui communiquoit au premier, tout près de l'endroit où il étoit joint au corps de l'animal, après avoir rempli d'abord la fiole de mercure au lieu d'efprit de vin : quand j'eus tiré tout l'air de la cavité du thorax, le mercure s'éleva de 9 pouces dans le tuyau; mais il defcendit par degrés, à mesure que l'air rentroit dans le thorax par les poumons.

Je fis alors une ouverture au cou de l'animal, pour découvrir la trachée, que je coupai un peu au deffus du larynx : fur la trachée j'ajuftai & je liai une veffie pleine d'air, & je continuai de tirer l'air du thorax avec affez de force, pour tenir les poumons affez dilatés : le mercure baiffa; je répétai la fuccion plufieurs fois pendant un quartd'heure; enforte qu'une bonne partie de l'air contenu dans la veffie, paffa par les petites ouvertures de la fubftance des poumons dans la cavité du thorax, ou bien perdit fon élasticité. Lorfque je preffois la veffie, le mercure baiffoit fort vite. Le chien vécut pendant toute cette opération; & il auroit, felon toutes les apparences, encore vécu plus long-temps, fi l'on eût continué l'expérience. On en voit un exemple dans celle qui fuit.

EXPÉRIENCE CXIV.

JE pris un autre chien vivant, de moyenne groffeur ; je le couchai fur le dos, & le liai fur une table; je découvris la trachée, & la coupai net justement au deffous du larynx; & j'y fixai dans l'inftant le petit bout d'un robinet, après

avoir attaché à l'autre bout du robinet grande veffie qui contenoit 162 pouces cubiques: de l'autre côté, & à l'autre bout de la veffie, j'avois lié le gros bout d'un autre robinet, dont l'ouverture étoit couverte d'une foupape qui s'ouvroit en dedans pour laiffer paffer l'air qu'on y pouvoit fouffler, & l'empêcher de reffortir; ce que j'empêchai encore mieux en bouchant le paffage avec un robinet.

Dans l'inftant que le premier robinet fut ajusté & bien attaché à la trachée, je foufflai par l'autre, & je remplis d'air la veffie: le chien refpira cet air pendant une minute ou deux; après quoi il refpiroit fi vîte & fi difficilement, qu'il me parut près d'être fuffoqué.

Dans ce moment, je preffai avec ma main la veffie, pour obliger l'air à entrer par force dans les poumons du chien, & pour faire élever fon abdomen par la preffion du diaphragme, comme dans une refpiration ordinaire; enfuite, ôtant ma main de deffus la veffie, & la remettant alternativement, je fis refpirer ainfi le chien pendant une heure; mais je fus obligé de fouffler de l'air frais toutes les cinq minutes dans la veffie, parce que les trois quarts de l'air étoient ou abforbés par les vapeurs des poumons, ou fortis par les ligatures en preffant la veffie. Le chien pendant tout ce temps étoit fouvent près d'expirer, lorsque je ne preffois que foiblement l'air pour le faire entrer dans fes poumons; ce que l'on fentoit parfaitement bien à fon pouls dans la grande artère crurale, fur laquelle une perfonne qui m'aidoit, eut toujours le doigt pendant toute l'opération : car ce pouls étoit languiffant & prefque infenfible, lorfque je ne preffois que foiblement la veffie;

mais il devenoit plus fréquent & plus prompt, toutes les fois que je preffois fortement la veffie fur-tout fi je preffois auffi l'abdomen alternativement avec la veffie, parce que j'augmentois par-là la contraction & la dilatation des poumons.

Je rendois par ce moyen le pouls vif & fréquent, de languiffant qu'il étoit, auffi souvent qu'il me plaifoit; & il le devenoit non-feulement après les cinq minutes lorsqu'on avoit soufflé du nouvel air dans la veffie, mais même avant la fin des cinq minutes lorfque l'air étoit le plus chargé de vapeurs.

Après que le chien eut vécu pendant une heure de cette façon, je voulus effayer s'il vivroit quelque temps en lui faifant, par les mêmes moyens, refpirer de l'air chargé de vapeurs de foufre enflammé; mais, comme je fus obligé de ceffer pendant quelques inftans de preffer la veffie, le chien mourut tout d'un coup: il auroit sûrement vécu bien plus long-temps, fi j'euffe continué de forcer l'air à entrer dans fes poumons. Comme je fus obligé de fouffler de l'air dans la veffie plus de douze fois dans une heure, l'expérience ne fut pas faite bien régulièrement; & comme il mourut en moins de deux minutes que je fus contraint de le quitter, & de le laiffer refpirer de lui-même l'air contenu dans la veffie, il eft certain, par l'Expérience CVI fur les chandelles, qu'il feroit mort auffi en moins de deux minutes lorfqu'il reftoit un quart de vieux air dans la veffie, qui corrompoit dans le moment le nouvel air qu'on y fouffloit. L'on doit donc attribuer la continuation de la vie de l'animal pendant cette heure entière, à la dilatation forcée des poumons par la compreffion de la veffie, & non pas à l'efprit vital de l'air;

car il feroit certainement mort après les cinq minutes, & peut-être en moins d'une minute de temps; car fon pouls étoit fi languiffant & fi foible, qu'il ne fuffifoit pas, pour l'animer un peu, de remplir les trois quarts de la veffie du nouvel air qu'on y fouffloit, mais qu'il falloit encore comprimer la veffie; ce qui conftamment élevoit le pouls, qui devenoit toujours plus fort & plus vigoureux à mesure que je preffois plus fortement la veffie, foit même que ce fût avant ou après avoir foufflé le nouvel air dans la veffie, quoiqu'à la vérité le pouls fût plus aifé à élever au commencement des cinq minutes, que vers leur fin.

Par ces violens & funeftes effets des vapeurs fur la refpiration des animaux, nous pouvons juger combien elle eft incommodée lorsque l'air eft chargé de ces vapeurs, qui détruisent toujours une partie de fon élafticité: il ne la regagne jamais mieux, cette élafticité, que par l'agitation des vents qui le purgent de ces vapeurs nuifibles, & lui donnent la falubrité néceffaire à la fanté: auffi un air renfermé dans une chambre fans communication avec l'air extérieur, fe charge peu à peu de vapeurs, & gêne notre refpiration à proportion des vapeurs dont il eft infecté. C'eft par cette raifon que les fourneaux & poëles d'Allemagne, auffi-bien que les tuyaux nouvellement inventés pour conduire de l'air échauffé dans les chambres, font bien moins favorables à la refpiration, que la façon ordinaire des cheminées, où le feu ne fe conferve que par de nouveaux fupplémens d'air frais, qui chaffent les vapeurs nuiGibles dont le premier s'étoit chargé.

C'eft auffi pour cela que les gens qui ont la poitrine foible & délicate, fe portent bien dans

les campagnes où l'air eft pur, tandis qu'ils ne peuvent habiter les grandes villes, fans être incommodés par les vapeurs fuligineufes qui s'élè vent continuellement des feux de charbon, des immondices, &c.; & même les gens les plus robuftes & les plus vigoureux s'apperçoivent en changeant d'air, au fortir de ces grandes villes, d'une certaine hilarité qui ne leur vient que d'une refpiration plus aifée, & qui donnant un cours. plus libre au fang, & lui communiquant un véhicule plus pur, caufe cette joie que l'on ne reffent jamais en refpirant un air humide & groffier. Il n'eft donc pas étonnant que les infections peftilentielles & les maladies épidémiques fe com muniquent par la refpiration, puifque l'air s'unit intimement au fang en perdant fon élasticité dans les véhicules du poumon.

Pour peu qu'on réfléchiffe fur la grande quantité d'air élastique que détruifent les fumées fulfureuses, l'on verra qu'on peut attribuer à cette cause la mort des animaux frappés de la foudre fans aucune bleffure vifible; car l'élafticité de l'air qui environne l'animal venant à manquer tout d'un coup, les poumons font obligés de s'affaiffer, ce qui fuffit pour caufer une mort fubite: ceci fe trouve confirmé par les obfervations * que l'on a faites fur les animaux tués de la foudre; les ces obfervat. poumons fe font toujours trouvés applatis, & les du Recueil véficules vides & affaiffées.

* Voyer

dans le 1 vol.

des premiers Mémoires de

La foudre caffe fouvent les vitres, & les fait l'Académie r tomber au dehors. Il eft facile de rapporter cet des Sciences. effet à la même caufe; car l'élafticité de l'air étant détruite au dehors, celui du dedans agira violemment par fon reffort, & brifera tout ce qui ne pourra lui réfifter.

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