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Le tonnerre fait tourner le vin & les liqueurs qui ont fermenté: il eft très-probable que ce n'est qu'en détruifant l'élafticité de l'air qui eft contenu dans ces liqueurs, qu'il leur ôte leur qualité; car on a vu qu'il n'eft pas néceffaire, pour arrêter la fermentation, de mettre des mélanges fulfureux dans les liqueurs, & qu'il fuffit d'environner les vaiffeaux qui les contiennent, de ces vapeurs fulfureuses; elles pénétreront dans ces vaiffeaux par les pores du bois: ainfi il n'eft pas furprenant qu'elles agiffent fur les liqueurs qui y font contenues. Je ne puis pas affirmer que l'usage où l'on eft de mettre une barre de fer fur les tonneaux, foit un bon préservatif contre les effets de la foudre; mais je pense qu'on les garantiroit bien plus sûrement, en les couvrant de grands draps de laine trempés dans une forte faumure; car l'on fait affez que les fels attirent très-puiffamment le foufre.

Il femble qu'on doit encore attribuer à la même caufe, la mort qui accompagne toujours l'explofion des mines: il eft vrai que d'abord l'air fe raréfie beaucoup, ce qui doit faire dilater les poumons à proportion; mais cet air se trouve dans le moment chargé d'une infinité de vapeurs fuligineufes qui lui font perdre une grande partie de fon élasticité. Nous en avons vu la preuve dans l'Expérience CVI, fur les mèches enflammées : la chaleur de la flamme raréfia d'abord l'air; mais, malgré la continuation de cette flamme & de cette chaleur, l'air ne laiffa pas que de fe condenser dans le moment, & de perdre une bonne partie de fon élasticité.

Ces vapeurs ont fans doute le même effet fur les poumons des animaux dans la Grotte du Chien, en Italie.

C'eft auffi en faifant perdre à l'air fon élafticité , que les vapeurs fouterraines fuffoquent les animaux & éteignent la flamme des chandelles. Nous voyons par l'Expérience CVI, que plus la chandelle s'éteint promptement, plus tôt auffi l'élafticité de l'air fe détruit.

EXPÉRIENCE CX V.

CES réflexions m'engagèrent à chercher des moyens pour ôter à ces vapeurs leur mauvaise & dangereuse qualité, ou tout au moins pour la diminuer.

Pour en venir à bout, je fis paffer par le trou pratiqué au fommet du récipient de la machine. pneumatique (Pl. XIV. fig. 32.), qui contenoit deux pintes de Paris, l'une des jambes d'un fiphon fait d'un canon de moufquet; elle touchoit presque au fond du récipient, bien maftiqué en ; j'attachai fur l'ouverture du fiphon qui étoit dans le récipient, trois enveloppes de drap de laine: la chandelle s'éteignit en moins de deux minutes, quoique je continuaffe de pomper pendant tout ce temps, & que l'air paffât fi librement à travers les enveloppes de drap, que mercure ne s'éleva pas au deffus d'un pouce dans la jauge.

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En mettant l'autre extrémité du fiphon dans un pot de fer rougi au feu, & qui contenoit du foufre enflammé, la chandelle s'éteignoit en pompant, au bout de quinze fecondes ; & en ôtant les trois enveloppes de drap de deffus l'ouverture du fiphon, , pour laiffer mieux paffer les vapeurs du foufre, la chandelle s'éteignit dans l'inftant: les trois enveloppes de drap confervoient donc la flamme pendant quinze fecondes. Ainfi, dans les

mines où les vapeurs ne font pas fi mauvaises que celles-ci, on peut prolonger fa vie en refpirant à travers plufieurs draps de laine ; & cela plus ou moins long-temps, felon la qualité plus ou moins nuifible des vapeurs.

Lorfque, au lieu de couvrir l'ouverture du fiphon de trois enveloppes de laine, je mettois le bout du fiphon à 3 pouces de profondeur dans l'eau x, (Pl. XIV. fig. 32.) la chandelle ne s'éteignoit qu'après une demi-minute, quoique les fumées fulfureufes paruffent clairement monter à travers l'eau pendant que je pompois : ainfi l'eau conferva la flamme le double du temps de ce que l'avoient confervée les trois enveloppes de drap.

EXPÉRIENCE CXVI.

JE fis un trou dans un grand robinet de bois a b, (Pl. XVII. fig. 39.) dans lequel j'infixai & je collai le gros bout d'un autre robinet de bois ii, dont je couvris l'ouverture d'une foupape de veffie r; j'adaptai une autre foupape à l'ouver ture du fiphon de fer ss, en fixant bien cette extrémité au robinet ab; puis, par le moyen de quatre petits cerceaux, j'ajuftai au dedans d'un crible qui avoit 7 pouces de diamètre, quatre diaphragmes de flanelle, éloignés les uns des autres d'un demi-pouce; & enfin j'attachai fur le crible deux grandes veffies i in o, par où il communiquoit avec les deux ouvertures du fiphon.

J'aurois mieux fait de me fervir de linge que de flanelle, pour faire les diaphragmes, parce qu'on fe fert d'huile & de graiffe pour faire la flanelle, & qu'on la blanchit par les fumées du

foufre; mais j'ignorois ces faits dans le temps que je fis cette expérience.

Quand l'inftrument fut ainfi préparé, je serrai mes narines avec les doigts, & j'appliquai la bouche en a; je tirai alors ma respiration, ce qui faifant élever la foupape ib, l'air paffoit avec liberté des veffies dans le fiphon; auffi les veffies baissèrent & ridèrent confidérablement : j'expirai enfuite, & je rendis cet air, qui, ne pou vant rentrer dans le fiphon par la foupape i b, se fit paffage par la foupape r dans les veffies; par ce moyen, l'air que je rendois après l'avoir refpiré, paffoit néceffairement à travers tous les diaphragmes avant que de pouvoir me revenir, & être refpiré une feconde fois. Je mefurai la capacité des veffies & du fiphon; le tout contenoit quatre ou cinq pintes de Paris.

Comme le fel marin & le fel de tartre attirent très - puiffamment les vapeurs fulfureuses, je trempai les quatre diaphragmes dans de fortes folutions de ces fels, & auffi dans du vinaigre de vin blanc, que l'on regarde comme un bon préfervatif contre la pefte, ayant grand foin de nettoyer avec de l'eau le fiphon & les veffies, afin de les bien purger, de tout l'air infecté qui auroit pu y refter après chaque expérience.

Il ne m'étoit pas poffible de refpirer pendant plus d'une minute & demie l'air renfermé dans cet inftrument, lorfque j'en ôtois les diaphragmes; mais en remettant les diaphragmes trempés auparavant dans du vinaigre, je pouvois refpirer pendant trois minutes & demie lorfque je les avois trempés dans une forte folution de fel marin, & pendant trois minutes lorfque c'étoit une leffive de fel de tartre; mais pendant cinq minutes lorf

que je les faifois bien fécher, après les avoir trempés dans cette même leffive de fel de tartre ; & une fois pendant huit minutes & demie, en me fervant de fel de tartre extrêmement calciné. Mais je ne fais fi cela venoit de ce plus grand degré de calcination du tartre, qui pouvoit lui faire attirer plus fortement les vapeurs groffières & fulfureufes; ou bien fi cela ne doit pas être attribué à la féchereffe des veffies & du fiphon, ou même à quelque paffage infenfible que l'air avoit pu fe faire à travers les ligatures. Je ne me fouciai pas même de répéter l'expérience pour m'en affurer, crainte de m'altérer la poitrine en refpirant fi fouvent ces vapeurs nuifibles.

Le fel de. tartre eft donc le meilleur préservatif contre les mauvais effets de ces vapeurs, & enfuite le fel marin: ils abforbent tous deux les

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vapeurs fulfureufes acides & aqueuses; car, ayant pesé avec exactitude les quatre diaphragmes avant que de les avoir placés dans l'inftrument, je trouvai qu'ils avoient augmenté de 30 grains en cinq minutes, ce que j'éprouvai deux fois pour m'en bien affurer; & les diaphragmes libres, expofés à l'air libre, n'augmentèrent en cinq minutes que de 5 grains, qui étant déduits des 30 ci-deffus, nous donneront 15 onces deux tiers pour le poids de l'humidité de la refpiration pendant vingt-quatre heures : ce qui cependant eft un peu trop, parce que les diaphragmes peuvent attirer en cinq minutes plus de 5 grains, à cause de l'humidité des veffies & du fiphon.

J'ai trouvé que lorfque les diaphragmes étoient peu humides, ils augmentoient de 6 grains en trois minutes, & que dans le même temps ils n'augmentoient point du tout en les expofant à

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