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inutiles dès que le tuyau à pris fon accroiffement; tout de même auffi la moëlle, qui dans les arbres eft toujours pleine de fucs & d'humidité tant que le jeune rejeton croît, & qui, par fon humidité, conferve la foupleffe des fibres, & par fa force de fuccion & de dilatation, en augmente l'accroiffement & l'extenfion; cette moëlle, dis-je, auffitôt que le rejeton de chaque année ceffe de croître, fe sèche par degrés, & demeure toujours sèche, avec fes véhicules toujours vides. Mais la nature prévoyante conferve, pour la crue de l'année fuivante, dans l'intérieur du bouton, une petite portion tendre & ductile de moëlle fucculente.

Les os des animaux croiffent par la même mécanique chaque partie qui n'eft pas durcie & offifiée, augmente par degrés; mais, comme les mouvemens des articulations ne permettoient pas que les extrémités des os fuffent molles & ductiles comme dans les parties des végétaux, la nature a fourni les extrémités des os d'une matière glutineufe, qui, tant qu'elle eft ductile, laiffe croître l'animal, mais qui, dès qu'elle s'offifie, l'empêche de croître, comme je m'en fuis affuré par l'expérience fuivante.

Je pris un poulet qui n'avoit encore pris que la moitié de fon accroiffement; je lui piquai l'os de la jambe, qui n'avoit que deux pouces de longueur, avec une petite pointe de fer très-aiguë, en deux endroits, à un demi-pouce de diftance, en perçant la membrane écailleufe qui recouvre la jambe. Deux mois après je tuai le poulet, & ayant découvert l'os, j'y remarquai les reftes obfcurs des deux piqûures, à la même distance d'un demi-pouce l'une de l'autre; de forte que cette partie de l'os ne s'étoit point du tout étendue en

longueur depuis le temps que je l'avois marquée, quoique, dans ce même intervalle de temps, l'os tout entier eût augmenté de plus d'un pouce en longueur: l'accroiffement fe fit principalement à l'extrémité fupérieure de l'os, où la matière ductile & glutineuse fe trouve abondamment, à l'endroit de la jointure ou fymphife de la tête avec le corps de l'os.

Il eft à croire que les autres fibres du corps animal, foit membraneufes, mufculeufes, nerveuses, cartilagineuses ou vasculeuses, fe dilatent & s'étendent comme les fibres offeufes, par la nourriture ductile que la nature fournit à chaque partie : l'on peut donc dire que l'animal végète à cet égard comme la plante; ainfi il eft d'une extrême importance que la nourriture du jeune animal foit propre à cet ouvrage de végétation & d'accroiffement, fur-tout pour former une bonne & forte conftitution; car fi, pendant fa jeuneffe, la nature fe trouve dépourvue des matériaux propres & néceffaires à cet ouvrage, elle ne peut tirer que de petits fils de vie : cela ne fe remarque que trop fouvent dans les jeunes gens qui croiffent, lorfque, par des excès & des débauches de liqueurs fpiritueufes, ils altèrent & corrompent la matière nutritive qui doit étendre toutes les fibres.

Les expériences précédentes nous démontrent que les fibres longitudinales & les vaiffeaux féveux du bois, croiffent en longueur la première année, par l'extenfion de chaque partie; & comme la nature, dans les mêmes productions, fe fert de moyens femblables ou très-peu différens, l'on doit penfer que les couches ligneufes de la feconde, troifième, &c. année, ne font pas formées par la feule dilatation horizontale des vaif

feaux, mais bien plutôt par une extenfion de fibres longitudinales, & de tuyaux qui fortent du bois de l'année précédente, avec les vaiffeaux duquel ils confervent une libre communication. L'obfervation que j'ai faite fur l'accroiffement des couches ligneufes, Expérience XLVI, (Pl. XVIII. fig. 40.) confirme ceci; outre qu'il n'est pas aisé de concevoir comment les fibres longitudinales & les vaiffeaux féveux de la feconde année, peuvent être formés par la feule dilatation horizontale des vaiffeaux de l'année précédente.

Quoi qu'il en foit, nous pouvons toujours obferver que la nature a eu grand foin de conferver la foupleffe & la ductilité des parties qui font entre l'écorce & le bois, en y entretenant une humidité vifqueufe, qui fert à former la matière ductile, les fibres ligneufes, les vélicules & les boutons.

La nature, en préparant la matière ductile qui doit fervir à la production & à l'accroiffement de toutes les parties des végétaux & des animaux, choifit des particules de degrés très-différens d'attraction mutuelle, & les combine enfuite dans la proportion la plus convenable à fes deffeins, foit pour former les fibres offeufes ou les fibres plus molles dans les animaux, ou bien pour former les fibres ligneufes ou herbacées dans les végétaux. Le grand nombre des différentes fubftances qui fe trouvent dans le même végétal, prouve qu'il y a des vaiffeaux faits exprès & deftinés à conduire différentes fortes de nourriture. Dans plufieurs plantes, on voit ces vaiffeaux pleins d'une liqueur ou laiteufe, ou jaune, ou rouge.

Le docteur Keill, dans fon Traité des Sécrétions animales, page 49, obferve que, quand la nature veut féparer du fang une matière visqueuse,

elle trouve le moyen d'en retarder le mouvement, ce qui permet aux particules du fang de fe mieux unir, & de former ainfi la fécrétion vifqueufe; & le docteur Grew a observé avant lui, un exemple de la même méthode fur les végétaux, quand la nature veut faire une fécrétion pour compofer une fubftance dure, & cela fur les amandes des fruits à noyau, qui n'adhèrent pas immédiatement au noyau, ce qui feroit le moyen le plus court pour en tirer de la nourriture, mais qui font mais qui font pourvus d'un vaiffeau ombilical, qui feul porte & conduit la nourriture, après avoir fait un tour entier en s'ajuftant à la concavité, & en aboutissant à la pointe du noyau. Ce prolongement de vaiffeaux retarde le mouvement de la sève, & rend la nourriture qu'ils contiennent affez vifqueufe pour la faire devenir une substance dure & ligneufe.

L'on peut remarquer un art tout femblable dans les longs vaiffeaux capillaires fibreux, qui font entre l'écorce verte & la coquille de la noix, comme auffi dans le macis fibreux des noix de mufcade; les extrémités de ces fibres ont leurs infertions dans les angles des fillons de la coquille. Ils fervent fans doute à conduire la matière vifqueufe, qui fe change, lorfqu'elle eft sèche, dans une fubftance dure, dont eft faite la coquille; au lieu que fi cette coquille tiroit immédiatement fa nourriture de la pellicule molle & pulpenfe qui l'environne, elle feroit certainement de la même qualité cette pellicule fert feulement à conferver la foupleffe & la ductilité de l'écorce, jufqu'à l'entier accroiffement de la noix.

Dans les arbres qui tranfpirent peu, la sève se meut bien plus lentement que dans les arbres qui tranfpirent davantage : auffi leur sève eft bien plus

vifqueufe; & par cette qualité elle rend, eux & leurs feuilles, plus propres à réfifter aux froids des hivers. L'on a même obfervé que la sève des arbres toujours verts des pays méridionaux, n'est pas fi vifqueufe que la sève des arbres toujours verts des pays feptentrionaux, comme celle du fapin, &c. Et en effet, la sève dans les contrées plus chaudes, tranfpirant en plus grande quantité, doit être en plus grand mouvement.

EXPÉRIENCE CXXIV.

POUR trouver la façon dont les feuilles fe développent, je me fuis fervi d'une petite planche ou fpatule de chêne a b c d, de la même forme & de la même grandeur qu'on la voit représentée dans la figure 43, Pl. XVIII,

J'ai fixé sur cette spatule vingt-cinq pointes d'épingles xx, toutes à égale diftance d'un quart de pouce, & également élevées au deffus de la furface de la fpatule d'un quart de pouce.

J'ai piqué dans la faifon plufieurs jeunes feuilles avec toutes ces pointes à-la-fois, que j'avois auparavant trempées dans une couleur de plomb rouge.

La figure 44 représente la grandeur & la figure d'une jeune feuille de figuier, lorfque je la marquai par des points rouges, éloignés les uns des autres d'un quart de pouce.

La figure 45, Pl. XIX, représente les juftes proportions de cette même feuille, après qu'elle eut pris tout fon accroiffement : j'ai marqué des mêmes nombres les points correfpondans des deux figures; on peut, en les comparant, voir dans quelle proportion ces points fe font éloignés, ce qui va à peu près jufqu'à trois quarts de pouce.

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