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majeure: n'y aïant point de difference entre dire que Dieu connoit une telle chofe, & qu'une telle chofe eft objectivement en Dieu.

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Seconde maniere de voir les chofes en Dieu : qui eft de les voir dans une Etenduë intelligible infinie, que Dieu renferme. Que ce que l'on dit fur cela, ou est tout à fait indigne de Dieu, ou fe contredit manifeftement.

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Ous venons de voir que l'Auteur de la Recherche de la Verité, demeurant toujours ferme dans la penfée que nous voïons. toutes choses en Dieu, a varié dans l'explication de la maniere dont cela fe fait.Car,aïant cru d'abord que nous voïons chaque chofe par l'idée particuliere qu'elle a en Dieu, il a depuis changé de fentiment, en déclarant (p. 548.) qu'il n'a pas prétendu ( il devoit plutôt dire qu'il ne prétend plus) qu'il y eût en Dieu certaines idées particulieres, qui reprefentaffent chaque corps en particulier: mais que nous voions toutes chofes en Dieu par l'aplication que Dieu fait à notre esprit de l'étenduë intelligible infinie en mille manieres diffe

rentes.

C'est donc ce qui refte à examiner fi cette feconde maniere de voir les chofes en Dieu

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qui eft de les voir dans une étenduë intelligible infinie, que Dieu renferme, eft plus vraifemblable que l'autre.

Mais, pour en pouvoir bien juger, il faut l'écouter lui-même expliquer comment il prétend que cela fe fait. Et il faut remarquer avant toutes chofes que ce qui l'a fait entrer dans cette nouvelle pensée eft une objection, qu'on lui a faite en ces termes.

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OBJECTION. * * Il n'y a rien en Dieu de ,, mobile, il n'y a rien de figuré. S'il y a un So,,leil dans le monde intelligible, ce foleil eft toûjours égal à lui-même : & le foleil visible paroit plus grand, lorfqu'il eft proche de l'orifon, que lorsqu'il en eft fort éloigné: donc ,, ce n'est pas ce foleil intelligible que l'on voit. eft de même des autres créatures: donc ,, on ne voit point en Dieu les ouvrages de ,, Dieu. Et voici comme il y répond.

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Pour répondre à tout ceci, il fuffit de confiderer que Dieu renferme en lui-mê,, me une étendue intelligible infinie ; car Dieu connoit l'étenduë, puifqu'il l'a faite, & il ne la peut connoître qu'en lui même, Ainfi, comme l'efprit peut apercevoir une partie de cette étendue intelligible que Dieu renferme, il eft certain qu'il peut apercevoir en Dieu toutes les figures; car ,, toute étenduë intelligible finie eft néceffai

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P. $47.

,,rement

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corps

,,rement une figure intelligible, puifque la figure n'eft que le terme de l'étenduë. De plus cette figure d'étenduë intelligible & › generale devient fenfible & particuliere par ,, la couleur,ou par quelqu'autre qualité fenfible que l'ame y attache; car l'ame répand prefque toujours la fenfafion fur l'idée qui la frape vivement. Ainfi il n'eft point néceffaire qu'il y ait en Dieu de fenfibles, » ou de figures dans l'étenduë intelligible, », afin que l'on en voïe en Dieu, ou afin que ,, Dieu en voïe, quoiqu'il ne confidere que », lui même. Si l'on conçoit auffi qu'une figure d'étenduë intelligible, renduë fenfible », par la couleur,foit prife fucceffivement des differentes parties de cette étendue infinie; ,, ou fi l'on conçoit qu'une figure d'étenduë ,, intelligible puiffe tourner fur fon centre,ou ,, s'aprocher fucceffivement d'une autre, on », aperçoit le mouvement d'une figure fenfi,, ble ou intelligible, fans qu'il y ait même de ,, mouvement dans l'étenduë intelligible.Car ,, Dieu ne voit point le mouvement des corps dans sa substance, ou dans l'idée qu'il en a » lui-même ; mais feulement par la connoiffance qu'il a de fes volontez à leur égard.Il » ne voit même leur exiftence que par cette ,, voïe, parce qu'il n'y a que fa volonté qui donne l'être à toutes choses. Les volontez », de Dieu ne changent rien dans fa fubftan

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,,ce: elles ne la meuvent pas. Peut-être que ,, l'étenduë intelligible eft immobile en tout ,, fens, même intelligiblement. Mais, quoi», que nous voïons que cette étenduë intelligible,immobile ou non,elle nous paroit mobile, à caufe du fentiment de couleur, ou de „, l'image confuse qui reste après le fentiment, ,, laquelle nous attachons fucceffivement à si diverfes parties de l'étenduë intelligible, qui nous fert d'idée, lorfque nous voïons ou que nous imaginons,le mouvement de quelque corps on peut comprendre par les cho,, fes que je viens de dire, pourquoi on peut voir le foleil intelligible, tantôt grand, & ,, tantôt petit, quoiqu'il foit toujours le mê,, me à l'égard de Dieu. Car il fuffit pour cela ,, que nous voïons, tantôt une plus grande partie de l'étenduë intelligible, & tantôt une plus petite, & que nous aïons un fenti,, ment vif de lumiere pour attacher à cette partie d'étendue. Or, comme les parties de l'étenduë intelligible font toutes de même ,, nature, elles peuvent toutes representer », quelque corps que ce foit.

Je ne fai, Monfieur; que vous dire d'un tel difcours : j'en fuis effraïé. Car je trouve qu'il enferme tant de broüilleries & de contradi&tions, que toute mapeine fera d'en démêler les équivoques, & d'en découvrir les parologifmes.

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I. J'ai

Dieu con

I. J'ai déja ruiné par avance celui qui en eft le principal fondement, en faifant voir en quel fens on peut dire que ce que noit eft en Dieu. Car tout ce difcours roule fur cette étrange hypothefe : que Dieu renferme en lui-même une étendue intelligible infinie. Et toute la preuve qu'il en aporte eft Dieu connoit l'étendue, puisqu'il l'a faite, & qu'il ne peut connoître qu'en lui-même. Il n'y a rien qu'on ne mette en Dieu par un femblable raifonnement; puifque j'aurai autant de fujet de dire: Dieu renferme en luimême des millions de moucherons & de puces intelligibles. Carilles connoit puifqu'il les a faits. Et il ne les peut connoître qu'en lui-mê

que

me.

la

II. Mais tous ces argumens font de purs fophifmes, car de cette majeure: Dieu connoit tout en lui-même, on n'en peut rien conclure qu'en cette maniere :

Or Dieu connoit l'étenduë, les moucherons, les puces, les crapaux & toutes les autres créatures:

Donc il connoit toutes chofes en lui-même, Mais c'est un manifefte paralogifme que d'en conclure abfolument :

Donc toutes chofes font en Dieu étenduës, moucherons, puces, crapaux, & il les renferme en lui-même.

III. Pour en tirer cette.derniere conclu

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