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lui-même, je lui demande qu'il me suive & qu'il examine de bonne foi, fi ce que je dirai m'être clair, ne lui fera pas auffi clair &

certain.

1. Je fuis affuré que je fuis, parce que je penfe ; & qu'ainfi je fuis une fubstance qui penfe.

2. Je fuis plus certain que je fuis, que je ne le fuis que j'ai un corps, ou qu'il y a d'autres corps. Car je pourois douter qu'il y a des corps que je ne pourois pas pour cela douter que je ne fuffe.

3. Je connois l'être parfait, l'être même, l'être univerfel; & ainfi je ne puis douter que je n'en aïe l'idée, en prenant l'idée d'un objet pour la perception d'un objet, felon la 3.

définition.

4. Je fuis affuré que je connois des corps, quand je pourois douter s'il y en a qui exiftent; car il me fuffit que je les connoiffe com me poffibles. Et quand je connoîtrois un corps comme existant qui ne le feroit pas, je me tromperois en cela; mais il ne feroit pas moins vrai que ce corps feroit objectivement dans mon efprit, quoiqu'il n'exiftât pas hors de mon efprit ; & ainfi je le connoîtrois felon

la definition 4.

5. Quand mes fens ne pouroient m'affurer de l'exiltence des chofes materielles, la raifon m'en affureroit, en ajoûtant à mes fenti

mens

mens que Dieu ne fauroit être trompeur. Et fi je n'en étois pas entierement affuré par la raison, je le faurois au moins par la foi ( ce que je dis pour mettre la chofe dans la derniere certitude, à l'égard même de l'Auteur de la Recherche de la Verité.) Et par conféquent à moi, qui ai la foi outre la raison, il m'eft très-certain que quand je voi la terre, le foleil, les étoiles, des hommes qui m'entretiennent, ce ne font point des corps ou des hommes imaginaires que je voi, mais les ouvrages de Dieu, & de veritables hommes que Dieu a créez comme moi. Et il ne m'importe qu'entre mille de ces objets il y en puiffe avoir quelqu'un qui ne feroit que dans mon efprit; il me fuffit, pour ce que je prétens, que je ne puiffe douter de quelque côté que me vienne cette certitude, de la raifon ou de la foi, que pour l'ordinaire les Corps que je croi voir font de veritables corps qui exiftent hors de moi.

6. Il ne m'est pas moins certain que je connois une infinité d'objets en general, & non feulement en particulier: comme le nombre pair en general, ce qui comprend une infinité de nombres, un nombre quarré en general, & ainfi des autres. Qu'il en eft de même des corps, connoiffant certainement un cube en general, un Cylindre, une Pyramide, quoiqu'il y en ait de chacune de ces efpeces

elpeces d'une infinité de grandeurs differen

tes.

7. Je ne puis douter auffi que je ne connoiffe les chofes en deux manieres, ou par une vue directe ou par une vue expreffément refléchie, comme quand je fais reflexion fur l'idée ou la connoiffance que j'ai d'une chofe, & que je l'examine avec plus d'attention, pour reconnoître ce qui eft enfermé dans cette idée, prife au fens que j'ai dit dans la 3. définition.

Si j'avois ici un petit Erafte, je l'interrogerois, comme on a fait fi ingenieusement dans les Converfations Chrétiennes ; & je fuis certain qu'il me répondroit fur toutes ces choses qu'il en eft parfaitement affuré. Au lieu que fi je lui demandois, s'il ne faut pas outre tout cela admettre de ces autres idées, qui font des êtres reprefentatifs, &c. je ne fuis pas moins certain qu'il me diroit, qu'il n'en fait rien, qu'il n'a rien à dire fur cela, & qu'il ne répond que fur les chofes dont il a des no tions claires, & qu'il n'en a point de ces êtres reprefentatifs. Et pour l'Auteur de la Recherche de la Verité, je croirois lui faire tort fi j'avois le moindre doute qu'il ne reconnût de bonne foi qu'il n'y a rien en tout celà qui ne foit très-affuré.

Mais j'ai encore à expliquer quelques au tres termes, & quelques autres façons de

ler,

ler, dont je n'ai rien dit dans les definitions, parce qu'il m'a paru que cela demandoit plus de difcours pour le bien faire entendre, & pour prévenir des difficultez, qui ne font fondées que fur des équivoques, qui ne font point encore affez démêlées par ce que j'ai dit jufques ici. C'eft ce que je traiterai dans le chapitre suivant.

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Explication de ces façons de parler, Nous ne voïons point immediatement les chofes: ce font leurs idées qui font l'objet immediat de notre pensée. Et c'est dans l'ideée de chaque chofe que nous en voïons les proprie

I

tez.

L femble d'abord qu'on ne peut admettre

pour vraies ces façons de parler: Nousne voions point immediatement les chofes: ce font leurs idées qui font l'objet immediat de notre penfée ; &c'eft dans l'idée de chaque chose que nous en voïons les proprietez, qu'on ne foit obligé de recevoir la Philofophie des fauffes Idées. Car on a de la peine à comprendre que ces façons de parler puiffent être vraïes, fi outre les objets que nous connoiffons il n'ya quelque chofe dans notre efprit qui les reprefente.

Je

Je ne rejette point ces façons de parler. Je les croi vraïes étant bien entenduës. Et je puis même demeurer d'accord de cette derniere conféquence. Mais je nie qu'il s'enfui-' ve de là qu'on foit obligé d'admettre d'autres idées que celles que j'ai définies dans le chap. precedent, def. 3.6.&7. qui n'ont rien de commun avec les êtres reprefentatifs diftinguez des perceptions, qui font les feuls que je combats, comme je l'ai marqué particulierement dans la 7. définition.

que notre

Pour bien entendre tout ceci il faut faire deux ou trois remarques. La 1. eft pensée ou perception eft effentiellement reflechiffante fur elle-même: ou, ce qui fe dit plus heureusement en Latin, eft fui confcia. Car je ne penfe point, que je ne fache que je pense. Je ne connois point un quarré que je ne fache que je le connois: je ne vois point le foleil, ou pour mettre la chofe hors de tout doute, je ne m'imagine point voir le foleil, que je ne fois certain que je m'imagine de le voir. Je puis quelque tems après ne me pas fouvenir que j'ai conçu telle & telle chofe; mais dans le tems que je la conçois, je fai que je la conçois. On peut voir ce que S. Auguftin dit fur cela dans le io. livre de la Trinité, ch. 10.

La 2. eft qu'outre cette reflexion qu'on peut apeller virtuelle, qui fe rencontre dans G

toutes

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