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d'être aperçu par notre ame, toutes les con féquences bizarres, que nous ont enfanté ces étres reprefentatifs, qui doivent fupléer à l'abfence des corps,fauf à difputer entre ceux qui convienent en general de la neceffité de ces êtres chimeriques ce qu'on doit entendre par-là, & quelle eft leur origine. Car il eft affez plaifant qu'ils commencent tous par ne point douter,qu'il ne faille neceffairement qu'une chofe foit,parce qu'ils croïet en avoir befoin, pour expliquer comment notre ame, fans fortir de fon corps, peut voir le foleil,qui en est éloigné de tant de millions de lieuës, fauf à chercher enfuite à loifir ce que ce fera qui leur rendra ce bon office de leur donner le moïen d'expliquer ce qu'ils verroient clai rement n'avoir pas befoin de leurs prétendues explications, s'ils avoient voulu prendre la peine de confulter ce qui fe paffe dans leur efprit, fans y vouloir mêler des chofes qu'ils n'y trouvent point, & qui ne conviennent qu'à leur machine, comme eft la confideration de la prefence ou de l'abfence locale,

C

CHAPITRE IX.

III. DEMONSTRATION..

Elle-ci fera plus courte. Elle confiftera à faire voir qu'une propofition, qu'il joint aux precedentes, & qui ne lui paroit pas

moins

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&

moins confiderable, eft encore une propofition équivoque,qui dans un fens eft veritable, mais entierement inutile à fon deffein dans l'autre eft très-fauffe, & fupofe ce qui eft en question.

Cette propofition eft: Il faut bien remarquer qu'afin que l'efprit aperçoive quelque chofe, il eft abfolument NECESSAIRE que l'idée de cet objet lui foit actuellement prefentes mais il n'eft pas neceffaire qu'il y ait au dehors quelque chofe de femblable à cette idée.

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J'ai fait voir dans les ch. 3. & 4. que dans le commencement de fon ouvrage il prend le mot d'idée pour la perception même ; mais que dans le lieu, où il traite expreffément de la nature des Idées, ille prend pour un certain être reprefentatif, diftingué réellement de la perception & de l'objet. Ainfi on ne peut porter aucun jugement de cette propofition, fi on ne leve auparavant l'ambiguité du mot d'idée ; & pour cela il en faut faire deux propofitions, en mettant dans chacune l'une des deux définitions en la place du défini.

Voici la premiere, où le mot d'idée sera pris pour la perception même. Il faut bien remarquer qu'afin que l'esprit aperçoive quelque objet, il eft abfolument neceßaire que l'idée de tet objet, prife pour fa perception, lui foit actuellement prefente il n'eft pas poffible d'en douter; mais il n'eft pas neceffaire qu'il y ait

คน

au dehors quelque chofe de femblable à cette perception.

Rien n'eft plus vrai que cette proposition, prife en ce fens, dans toutes ces deux parties. Car comment notre efprit pouroit-il apercevoir quelque chofe, s'il n'en avoit l'idée, c'eft-à-dire, la perception. Il eft certain auffi que la perception de plufieurs chofes est actuellement dans notre efprit, quoique ces chofes ne foient pas actuellement hors de

nous.

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Et voici la 2. Propofition, ou le mot d'idée eft pris comme dans le I. ch. de la 2. partie du 3. livre, qui eft l'endroit que nous examinons prefentement, pour un certain être reprefentatif, diftingué de la perception, qui fuplée à l'abfence des objets, & met par là l'efprit en état de les pouvoir connoître.

Il faut bien remarquer qu'afin que l'esprit aperçoive quelque objet, il eft abfolument neceffaire que cet être reprefentatif, à qui je viens de donner le nom d'idée, lui foit actuellement prefent: il n'eft pas possible d'en douter. Mais il n'eft pas neceffaire qu'il y ait au dehors quelque chofe de femblable à cet être reprefentatif.

Mais cette propofition étant conçue en ces termes, non feulement il eft poffible d'en douter, mais je la nie abfolument dans fa premiere partie, ne voïant aucun befoin de ce prétendu étre representatif pour connoitre

aur

aucun objet, ou prefent ou abfent. Et ainsi, fupofer qu'il n'eft pas poffible de douter de la neceffité de cet être reprefentatif, c'eft manifestement fupofer ce qui eft en queftion. Et, pour la 2. partie, s'il n'eft pas neceffaire qu'il y ait au dehors quelque chofe de femblable à l'étre reprefentatif, il n'eft pas plus neceffaire qu'il y ait au dehors quelque chofe d'existant, qui foit femblable à la perception que j'ai du soleil. D'où il fenfuit que ce n'eft pas une raifon, qui m'oblige d'avoir recours à ces étres representatifs diftinguez des perceptions, de ce que je pourois concevoir le foleil, quoiqu'il n'y eut point de soleil au monde. Car comme alors ce feroit le foleil poffible que je concevrois, & non le foleil exiftant, quoique par erreur je puffe croire que ce feroit le foleil exiftant, il en faudroit dire de même de l'étre reprefentatif du foleil, fupofé qu'il n'y cût point de foleil; favoir, qu'il me representeroit un foleil poffible & non le foleil exiftant, & que ce me feroit auffi une occafion d'erreur, fi je jugeois de là que le foleil exifte.

CHAPITRE X.

IV. DEMONSTRATION.

Ien ne doit être plus fufpect à ceux, qui philofophent raisonnablement,

R que

que

ces entitez philofophiques, dont on n'a des notions fort confufes, & qu'on voit affez L 2

n'a

n'avoir été inventées que pour expliquer de certaines chofes, que l'on a cru ne fe pouvoir expliquer fans cela. Mais il n'y a pas lieu de douter qu'on ne les daive rejetter abfolument, quand on peut montrer qu'on n'en a que faire, & qu'on s'en peut fort bien paffer. On eft affuré que l'Auteur de la Recherche de la Verité ne conteftera point cette maxime,

Il n'y a donc qu'à prouver que ces pretendus êtres reprefentatifs, qu'il apelle idées, font de cette nature, & qu'on n'en a nul befoin pour l'ufage qu'il leur attribue, qui eft de donner moïen à notre efprit de voir les chofes materielles. Et cela eft bien facile.

1. Dieu n'a point voulu créer notre ame, & la mettre dans un corps qui devoit être environné d'une infinité d'autres corps, qu'il n'ait voulu auffi qu'elle fut capable de connoitre les corps; & que par conféquent il n'ait voulu auffi que les corps fuffent conçus par

notre ame.

Or toutes les volontez de Dieu font efficaces : il eft donc certain que Dieu a donné à nos efprits la faculté de voir les corps, & aux corps la faculté paffive, pour parler ainfi, d'être vus par notre efprit. Tout cela eft plus clair que le jour. Mais voici la fuite.

Dieu ne fait point par les voies compofées cequi fe peut faire par des voïes plus fimples: c'eft le grand principe de notre ami, dont il

s'eft

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