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d'eux ; car j'ai été attrapé comme les autres: quoique cela ne me fois pas arrivé tant de fois qu'à de certaines perfonnes que je connois, je n'ai pas laiffé que de l'être. Ils difent qu'ils ont été volés: s'ils fortent de l'Hôpital comme j'en ai connu quantité qui y avoient été enfermés quelques années, ils difent qu'ils viennent de la Baftille, qu'on leur a ôté le peu de poudre qui leur reftoit, ou qu'ils l'ont jettée adroitement dans le tems qu'on les a pris qu'ils n'en font fortis que par les follicitations d'un gros Seigneur, qui leur a fait promettre de lui donner leur fecret, ce qui les chagrine fort, fouhaitant qu'il n'y ait que vous qui l'ayez: & mille autres contes auffi faux qu'ils font, fi on eft affez fimple pour leur prêter fon attention. Et outre la nourriture éviter de leur

que l'on ne peut

donner, puifqu'ils font entendré qu'on ne doit que très-peu quitter l'opération, à caufe du feu qui doit être gradué; ils augmentent le prix des drogues qu'ils vont acheter:& quand ils s'aperçoivent que l'on eft un peu inftruit des prix, comme en ayant déja acheté, ils difent que celles qu'ils ont achetées font bien dif férentes de celles dont vous vous ferviez,& qu'ils ne font pas étonnés fi l'on manque fouvent dans de certaines opérations ; que cela ne provient que du ménage que l'on fait fur l'achat de ces drogues. Je me fuis beaucoup étendu fur ce fujet, y étant excité par l'exemple d'un très-grand nombre de personnes que j'ai vû réduites dans une extrême mifere, ayant été auparavant dans l'opulence; & cela, pour s'être laiffé obféder par ces malheureux. Revenons à notre Philofo

phe. On peut juger qu'après cette premiere confidence, il me fit efperer de plus belles choses; & que je lui marquai toute l'eftime que je faifois de fon rare fçavoir, & combien fon amitié me feroit préticufe. Il avoit auffi de fon côté des raisons affez fortes pour fouhaiter la mienne: car dans les divers accidens qui lui étoient arrivés, il avoit quafi tout perdu; de forte qu'il avoit besoin d'un ami fidel,& d'un lieu fecret & fûr pour pouvoir faire de nouvelle poudre, de laquelle il n'avoit fauvé qu'une très-pétite quantité. il lui étoit donc néceffaire de rencontrer dans cet ami une perfonne qui chériffant cet Art, fçût eftimer ce qu'il fçavoit faire. Comme il crut avoir trouvé en ma perfonne tout ce qu'il cherchoit, il se détermina à faire une étroite liaifon avec moi; & pour me donner des mar

ques

ques de fa confiance, il s'ouvrit encore davantage..& prit plaifir à me faire voir les prodiges de fon art, & à me faire connoître qu'il poffedoit non feulement la fcience de tous les Philofophes qui en ont écrit, mais qu'il en fçavoit encore beaucoup plus qu'eux car dans le grand nombre de Livres tant imprimés que manufcrits que j'ai lûs, je n'ai rien trouvé de femblable, ni même qui en approchât; de forte que l'on peut dire que c'est un homme merveilleux & un phénix dans le monde. J'oferois mê me dire que c'eft l'Elie Artifte que Paracelfe dit devoir venir revéler les plus grands fecrets de cette Science occulte, fi je ne l'avois toujours trouvé trop réfervé à mon égard, n'ayant jamais pû obtenir qu'il m'enfeignât à opérer quelqu'une des. merveilles dont il m'a fait feuleB

ment voir les effets. Je me flatoisqu'à force de le voir travailler, j'en pourrois tirer quelque lumiere; les curieux, comme j'ai toujours été, fouhaitant ardamment d'apprendre de nouvelles chofes, & encore des choses auffi prodigieufes que celles

que cet habile homme faifoit: mais dans le tems qu'il paroiffoit un peu difpofé à fatisfaire à mes defirs, il m'arriva un accident des plus terribles, qui me mit à l'extrê-. mité, & me retint environ fix mois au lit; & comme un malheur ne va pas ordinairement: feul, celui ci fut fuivi de plufieurs autres des plus fenfibles; ce qui rompit tous nos projets, & m'ôta l'efperance de voir des chofes encore beaucoup au-deffus de celles qu'il m'avoit déja montrées, comme il me l'a voit promis, & telles que je les ai toujours regardées comme

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