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les perfectionneroient; mais étant tels qu'ils font, les imparfaits diminuent plutôt ce qu'ont de perfection l'or & l'argent, quand ils font mêlés enfemble. Mais fi les parfaits étoient rendus plus que parfaits au double, au triple, ou au centuple, & encore plus, pour lors ils perfe &tionneroient les imparfaits: mais parce que la nature opere fimplement, leur perfection eft fimple, & ne peut fe communiquer tant qu'ils font dans leur état naturel & dans leur corporéité groffiere; car s'il étoit autrement, la nature n'auroit pas befoin de l'art, lequel pour abréger les met dans la compofition de la Pierre pour lui fervir de ferment, & les réduit dans leur premiere nature, en faisant que le volatil furmonte en quantité le fixe: & parce que l'or eft un corps parfait, formé d'argent

vif rouge & clair, & d'un femblable foufre, nous ne le choifif. fons pas feul, parce qu'il eft feulement parfait,à moins que nous ne l'aidions par une purification ingénieufe; car il eft fi fortement cuit & digéré par fa chaleur naturelle, qu'à peine pouvons-nous agir fur lui avec notre feu artificiel: & quoique la nature l'ait perfectionné, elle n'a pû cependant le purifier & perfectionner intimement; elle n'avoit pas befoin même de lui donner une plus grande perfection. Ainfi fi nous choififfons l'or ou l'argent feuls & tels qu'ils font pour la matiere de la Pierre, à peine trouverions-nous le feu qui eût action fur eux; & quand même nous aurions le feu, nous ne pourrions jamais parvenir à fon intime purification, à cause de fa grande compaction & de la forte union de fes parties. C'eft

pourquoi il ne nous eft pas néceffaire de prendre le premier aur rouge tout feul, & le fecond au blanc, puifque nous avons une chofe & un corps composé d'un foufre & d'un argent-vif auffi pur & auffi net, & fur laquelle matiere la nature a opéré fort peu, & même point du tout ; enforte qu'avec notre feu artificiel & avec l'expérience de notre art, & par une action ingénieuse & continuée, nous pouvons parvenir à fa décoction convenable, à fa purification, coloration & fixation. Il faut donc choisir une matiere dans laquelle il y ait un argent-vif pur, clair, blanc & rouge, qui nefoit pas venu à perfection, mais mélangée égalemen & proportionnellement par des moyens convenables avec un

* Ici Bacon commence à déguifer la vérité, mais dans la fin de ce chapitre il fait assez connoître la matiere

tel foufre, & coagulée en masse folide, afin qu'avec notre art & avec notre feu artificiel nous puiffions parvenir à fa modification & purification intime, & les rendre tels, qu'après la fin de Pouvrage ils foient mille & mille fois plus parfaits que ces corps. fimples qui ont été cuits par la chaleur naturelle. Soyez donc fage; car fi vous êtes un peu habile & ingénieux dans la lecture de mes chapitres, vous trouverez que je vous ai enfeigné affez clairement la maniere d'opérer, & le choix que vous devez faire de la matiere de la Pierre. Bacon a déguifé un peu un peu la vérité, en difant que l'or & l'argent ne font pas la matiere de la Pierre ; & il est certain qu'ils ne le font pas feuls, car il faut un argent-vif pur & net, lequel contient auffi dans fon interieur fon foufre blanc & rouge, pour

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réincruder ces corps parfaits, afin de les rendre enfuite mille & mille fois plus parfaits, par le moyen de leur feu qui eft l'argent-vif: ce qu'il dit dans le chapitre fuivant le déclare affez. Je crois, dit-il, que fi tu n'as pas la tête dure, & que tu ne fois pas. tout-à-fait enveloppé du voile: de l'ignorance, tu as pû conjeAurer par mes paroles quelle eft la matière de la Pierre pour perfectionner les métaux imparfaits, c'est-à-dire qu'il faut la faire avec ceux qui font plus que parfaits. Et d'autant que la nature ne nous a donné uniquement que les imparfaits, il faut que par notre art nous rendions plus que parfaite la matiere connue. & dont nous avons tant parlé dans nos chapitres ; & fi nous ignorons la maniere d'y opérer, nous devons confidérer comment agit la nature.

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