rieur très-fimple, & qu'on ne pouvoit jamais foupçonner d'être compofé, annonçoit les vertus du dedans, & trahiffoit l'envie qu'il avoit de les cacher. On voyoit aifément que fon humilité étoit, non pas un difcours, mais un fentiment fondé fur fa science même; & fa charité agiffoit trop fouvent pour n'avoir pas quelquefois malgré toutes fes précautions, le déplaisir d'être découverte. Le defir général d'être utile aux autres étoit fi connu en lui, que les témoignages favorables qu'il rendoit en perdoient une partie du poids qu'ils devoient avoir par eux-mêmes.

Le Cardinal Antoine Barberin, Grand Aumônier de France, le fit Aumônier du Roi en 1656; car nous avions oublié de le dire, & c'eft un point qui n'auroit pas été négligé dans un autre Eloge. Il fat pendant toute fa vie dans une extrême confidération auprès de nos plus grands Prélats. Cependant il n'a jamais poffédé que de très-petits Bénéfices, ce qui fert encore à peindre fon caractère; & pour dernier trait, il n'en a point poffédé dont il ne fe foit dépouillé en faveur de quel qu'un.

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ÉLOGE

DE MONSIEUR

REGIS. PIERRE-SYLVAIN REGIS naquit en 1632 à la Salvetat de Blanquefort dans le Comté d'Agenois. Son père vivoit noblement, & étoit affez riche; mais il eut beaucoup d'enfans, & M. Regis, qui étoit un des cadets, fe trouva avec peu de bien.

Après avoir fait avec éclat fes Humanités & fa Philofophie chez les Jéfuites à Cahors, il étudia en Théologie dans PUniverfité de cette Ville, parce qu'il étoit destiné à l'Etat Eccléfiaftique; & il se rendit fi habile en quatre ans, que le Corps de l'Univerfité le follicitant de prendre le Bonnet de Docteur, lui offrit d'en faire tous les frais. Mais il ne s'en crut pas digne, qu'il n'eût étudié en Sorbonne à Paris. Il y vint; mais s'étant dégoûté de la longueur exceffive de ce que dictoit un célèbre Profeffeur fur la feule queftion de l'heure de l'Inftitution

de

de l'Euchariftie, & ayant été frappé de, la Philofophie Cartéfienne, qu'il commença à connoître par les Conférences de M. Rohaut, il s'attacha entièrement à cette Philofophie, dont le charme, indépendamment même de la nouveauté ne pouvoit manquer de fe faire fentir a un efprit tel que le fien. Il n'avoit plus que quatre ou cinq mois à demeurer à Paris, & il fe hâta de s'inftruire fous, M. Rohaut, qui de fon côté zélé pour fa doctrine, donna tous fes foins à un Difciple qu'il croyoit propre à la répandre.

M. Regis étant parti de Paris avec une efpèce de miffion de fon Maître, alla établir la nouvelle Philofophie à Touloufe, par des Conférences publiques qu'il commença d'y tenir en 1665. Il avoit une facilité agréable de parler, & le don d'amener les matières abftraites à la portée de fes Auditeurs. Bientôt toute la Ville fut remuée par le nouveau Philofophe; Savans, Magiftrats, Eccléfiaftiques, tout accourut pour l'entendre; les Dames même faifoient de la foule; & fi quelqu'un pouvoit partager avec lui la gloire de ce grand fuccès, ce n'étoit du moins l'illuftre Defcartes, dont il annonçoit les découvertes. On foutint une Thefe de pur Cartéfianifme en François Tome Ier.

que

M

dédiée à une des premières Dames de Toulouse , que M. Regis avoit rendue fort habile Cartéfienne, & il préfida à cette Thèfe. On n'y difputa qu'en François; la Dame elle-même y réfolur plufreurs difficultés confidérables, & il femble qu'on affectât par toutes ces circonftánces de faire une abjuration plus parfaite de l'ancienne Philofophie. Meffieurs de Toulouse touchés des inftructions & des lumières que M. Regis leur avoit apportées, lui firent une penfion fur leur Hôtel-de-Ville; événement prefque incroyable dans nos mœurs, & qui femble appartenir à l'ancienne Grèce.

M. le Marquis de Vardes, alors exilé en Languedoc, étant venu à Touloufe y connut auffi-tôt M. Regis, & l'obtint de la Ville avec quelque peine, pour l'emmener avec lui dans fon Gouvernement d'Aigues-Mortes. Là il fe l'attacha entièrement par l'eftime, par l'amitié, & par le mérite qu'il lui fit voir; & ce qui eft à la gloire de l'un & de l'autre, il n'eut pas befoin de fe l'attacher par d'autres moyens, qui paffent ordinairement pour plus efficaces. Il tâcha de s'occuper avec lui, ou plutôt de s'amufer de la Philofophie Cartéfienne; & comme il avoit brillé par l'efprit dans une Cour très dé

licate, peut-être le Philofophe ne profitat-il pas moins du commerce du Courtifan, que le Courtifan de celui du Philofophe. L'un de ces deux différens caractères eft ordinairement compofé de tout ce qui manque à l'autre.

M. de Vardes alla à Montpellier en 1671, & M. Regis qui l'y accompagna, y fit des Conférences avec le même applaudiffement qu'à Touloufe. Mais enfin tous les grands talens doivent fe rendre dans la Capitale. M. Regis y vint en 1680, & commença à tenir de femblables Conférences chez M. Lémery, Membre aujourd'hui de cette Académie. Le concours du monde y fut fi grand, qu'une maifon de particulier en étoit incommodée on venoit s'y affurer d'une place long-temps avant l'heure marquée pour l'ouverture; & peut-être la févérité de cette Hiftoire ne me défend - elle pas de remarquer qu'on y voyoit tous les jours le plus agréable Acteur du Théâtre Italien, qui hors de là cachoit fous un maf que & fous un badinage inimitable, l'ef prit férieux d'un Philofophe.

Il ne faut pas réuffir trop; les Conférences avoient un éclat qui leur devint funefte. Feu M. l'Archevêque de Paris, par déférence pour l'ancienne Philofo