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M. le Maréchal de Vauban fut envoyé pour commander à Dunkerque & fur la Côte de Flandre. Il raffura par fa présence les efprits étonnés; il empêcha la perte d'un Pays qu'on vouloit noyer pour prévenir le Siége de Dunkerque, & le prévint d'ailleurs par un Camp retranché qu'il fit entre cette Ville & Bergues, de forte que les Ennemis euffent été obligés de faire en même temps l'inveftiture de Dunkerque, de Bergues & de ce Camp, ce qui étoit abfolument impraticable.

Dans cette même Campagne, plufieurs de nos Places ne s'étant pas défendues comme il l'auroit fouhaité, il voulut défendre par fes confeils toutes celles qui feroient attaquées à l'avenir; & commença fur cette matière un Ouvrage qu'il deftinoit au Roi, & qu'il n'a pu finir entièrement. Il mourut le 30 Mars 1707, d'une fluxion de poitrine accompagnée d'une groffe fièvre qui l'emporta en huit jours, quoiqu'il fût d'un tempérament très - robufte, & qui fembloit lui promettre encore plufieurs années de vie. Il avoit 74 ans moins un mois.

Il avoit époufé Jeanne d'Aunoy, de la Famille des Barons d'Efpiry en Nivernois, morte avant lui. Il en a laiffé deux filles,

Madame la Comteffe de Villebertin, & Madame la Marquife d'Uffé.

Si l'on veut voir toute fa Vie militaire en abrégé, il a fait travailler à 300 Places anciennes, & en a fait 33 neuves; il a conduit 53 Siéges, dont 30 ont été faits fous les ordres du Roi en perfonne, ou de Monfeigneur, ou de Monfeigneur le Duc de Bourgogne, & les 23 autres fous différens Généraux; il s'eft trouvé à 140 actions de vigueur.

Jamais les traits de la fimple Nature n'ont été mieux marqués qu'en lui, ni plus exempts de tout mélange étranger. Un fens droit & étendu, qui s'attachoit au vrai par une espèce de fympathie, & fentoit le faux fans le difcuter, lui épargnoit les longs circuits par où les autres marchent; & d'ailleurs fa vertu étoit en quelque forte un instinct heureux, fi prompt qu'il prévenoit fa raison. Il méprifoit cette politeffe fuperficielle dont le monde fe contente & qui couvre fouvent tant de barbarie ; mais fa bonté, fon humanité, fa libéralité lui compofoient une autre politeffe plus rare, qui étoit toute dans fon cœur. Il feyoit bien à tant de vertu de négliger des dehors, qui à la vérité lui appartiennent naturellement, mais que le vice emprunte avec trop de facilité. Souvent M. le Ma

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-réchal de Vauban a fecouru de fommes affez considérables des Officiers qui n'étoient pas en état de foutenir le Service; & quand on venoit à le favoir, il disoit qu'il prétendoit leur reftituer ce qu'il recevoit de trop des bienfaits du Roi. Il en a été comblé pendant tout le cours d'une longue vie, & il a eu la gloire de ne laiffer en mourant qu'une fortune médiocre. Il étoit paffionnément attaché au Roi; Sujet plein d'une fidélité ardente & zélée, & nullement Courtifan, il auroit infiniment mieux aimé fervir que plaire. Perfonne n'a été fi fouvent que lui, ni aveċ tant de courage, l'introducteur de la vérité; il avoit pour elle une paffion prefque imprudente, & incapable de ménagement. Ses mœurs ont tenu bon contre les dignités les plus brillantes, & n'ont pas même combattu. En un mot, c'étoit un Romain qu'il fembloit que notre Siècle eût dérobé aux plus heureux temps de la République,

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ÉLOGE

DE M. L'ABBÉ

GALLOIS.

JEAN

EAN GALLOIS naquit à Paris lé 14 Juin 1632 d'Ambroife Gallois, Avocat au Parlement, & de Françoise de Launay.

Son inclination pour les Lettres fe déclara dès qu'il put laiffer paroître quelque inclination, & elle fe fortifia toujours dans la fuite; il s'engagea dans l'état Eccléfiaftique, & reçut l'Ordre de Prêtrife. Son devoir lui fit tourner fes principales études du côté de la Théologie, de l'Hiftoire Eccléfiaftique, des Pères & de l'Ecriture Sainte; il alla même jufqu'aux Langues Orientales, néceffaires du moins à qui veut remonter jufqu'aux premières fources de la Théologie: mais il ne renonça ni à l'Hiftoire profane, ni aux Langues vivantes, telles que l'Italien, l'Efpagnol, l'Anglois & l'Allemand, ni aux Mathématiques, ni à la Phyfique, ni à la Médecine même, car fon ardeur de favoir embraffoit tout; & s'il eft vrai qu'une érudition fi partagée foit moins propre à faire

une

une réputation fingulière, elle l'eft du moins beaucoup plus à étendre l'efprit en tout fens, & à l'éclairer de tous côtés.

Outre la connoiffance des chofes que les Livres contiennent, M. l'Abbé Gallois avoit encore celle des Livres eux-mêmes, Science prefque féparée des autres, quoiqu'elle en réfulte, & produite par une curiofité vive qui ne néglige aucune pa tie de fon objet.

Le premier travail que le Public ait va de M. l'Abbé Gallois, a été la Traduction Latine du Traité de Paix des Pyrénées, imprimée par ordre du Roi; mais bientôt fon nom devint plus illuftre par le Journal des Savans. Ce fut en 1665 que parut pour la première fois cet Ouvrage, dont l'idée étoit fi neuve & fi heureufe, & qui fubfifte encore aujourd'hui avec plus de vigueur que jamais, accompagné d'une nombreuse postérité iffue de lui, répandue par toute l'Europe fous les différens noms de Nouvelles de la République des Lettres, d'Hiftoire des Ouvrages des Savans, de Bibliothèque Univerfelle, de Bibliothèque choifie, d'Acta Eruditorum, de Tranfactions Philofophiques, de Mémoires pour l'Hiftoire des Sciences & des beaux Arts, &c. M. de Sallo, Confeiller Ecclé faftique au Parlement, en avoit conçu Tome Ier. P

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