Imágenes de páginas
PDF
EPUB

peu

& qu'il travailla utilement à des préli minaires d'éclairciffemens. En 1703, il acheta une charge de Médecin ordinaire de Madame la Ducheffe de Bourgogne. On affure qu'un de fes principaux motifs fut l'envie de donner au Public des foins entièrement défintéreffés, & de fe dérober à des reconnoiffances incommodes qu'il ne pouvoit pas tout-à-fait éviter à Paris. Nous n'avancerions pas un fait fi vraisemblable, s'il ne l'avoit prouvé par toute fa conduite. Avant que de fe tranfporter à Verfailles, il fut quatre ou cinq mois à fe rafraîchir la Botanique avec M. Marchant, fon ami & fon Confrère. Il prévoyoit bien qu'il n'herboriseroit pas beaucoup dans fon nouveau féjour, & il y vouloit arriver bien muni de toutes les connoiffances qu'il n'y pourroit plus fortifier. Quand il partit, ce fut une affliction & une défolation générale dans tout le petit peuple de fon quartier. La plus grande qualité des hommes eft celle dont ce petit peuple eft le juge.

[ocr errors]

Il vécut à Verfailles comme il avoit fait à Paris; auffi appliqué fans aucun intérêt, auffi infatigable, ou du moins auffi prodigue de fes peines, que le Médecin du monde qui auroit eu le plus de befoin & d'impatience d'amaffer du bien. Son goût

pour les Pauvres le dominoit toujours. Aut retour de fes vifites, où il en avoit vu plufieurs dans leurs miférables lits, il en trouvoit encore une troupe chez lui qui l'attendoit. On dit qu'un jour, comme il paffoit dans une rue de Verfailles, quelques gens du peuple dirent entr'eux: Ce n'eft pas un Médecin, c'est le Meffie; exagéra tion insensée en elle-même, mais pardonnable en quelque forte à une vive reconnoiffance, & à beaucoup de groffiéreté.

Il est affez fingulier que dans un l'ays où toutes les profeffions, quelles qu'elles foient, fe changent en celle de Courtifan, il n'ait été que Médecin, & qu'il n'ait fait que fon métier au hafard de ne pas faire fa. cour. Il la fit cependant à force de bonne réputation. M. Bourdelot, premier Médecin de Madame la Ducheffe de Bourgogne, étant mort en 1708, cette Prin-t ceffe propofa elle-même M. Bourdelin au' Roi pour une fi importante place, & obtint auffi- tôt fon agrément. Elle cut la gloire & le plaifir de rendre juftice au mérite qui ne follicitoit point. Les Courtifans furent fon élévation avant lui,& il ne l'apprit que par leurs complimens.

Ses mœurs fe trouvèrent affez fermes pour n'être point ébranlées par fa nouvelle dignité. Il fut toujours le même ;

feulement il donna de plus grands fecours aux Pauvres, parce que fa fortune étoit augmentée.

Cependant les fatigues continuelles affoibliffoient fort fa fanté; une toux fâcheufe & menaçante ne lui laiffoit prefque plus de repos. Soit indifférence pour la vie, foit une certaine intempérance de bonnes actions, défaut affez rare, on l'accufe de ne s'être pas conduit comme il conduifoit les autres. Il prenoit du café pour s'empêcher de dormir, & travailler davantage; & puis pour rattraper le fommeil, il prenoit de l'opium. Sur-tout c'est l'usage immodéré du café qu'on lui reproche le plus; il fe flatta long-temps d'être désespéré, afin d'en pouvoir prendre tant qu'il vouloit.

Enfin, après être tombé par degrés dans une grande exténuation, il mourut d'une hydropifie de poitrine le 20 Avril 1711. Ses dernières paroles furent... In te, Domine, fperavi non confundar... Il n'a- : cheva pas les deux mots qui reftoient. Une vie telle que la fienne étoit digne de finir par ce fentiment de confiance.

Il a laiffé quatre enfans d'une femme. pleine de vertu, avec qui il a toujours éré dans une union parfaite. Nous ne nous arrêterons point à dire combien il étoit vif

& officieux pour ses amis, doux & hu→ main à l'égard de fes domeftiques; il vaut mieux laiffer à deviner ces fuites néceffaires du caractère que nous avons repréfenté, que de nous rendre fufpects de le youloir charger de trop de perfections.

ÉLOGE

DE M. BERGER, CLAUDE BERGER naquit le 20 Janvier 1679 de Claude Berger, Docteur en Médecine de la Faculté de Paris. Il fe deftina à fuivre la profeflion de fon pères & pendant qu'il étoit fur les bancs de la Faculté, il foutint fous la préfidence de M. Fagon, premier Médecin, une Thèfe contre l'ufage du tabac, dont le ftyle & l'érudition furent généralement admirés & les préceptes fort peu fuivis.

Quoique M. Berger fût allié de M. Fagon, & d'affez près, ce fut à l'occasion de cette Thèfe que M. Fagon vint à le connoître plus particulièrement qu'il n'avoit fait jufqu'alors; & il lui accorda une amitié & une protection que l'alliance feule n'auroit pas obtenues de lui.

M. Berger travailla long-temps à l'étude des Plantes fous M. de Tournefort, & mérita que ce grand Botaniste le fît entrer, en qualité de fon Elève, dans l'Académie des Sciences, lorfqu'elle fe renouvella en 1699. Depuis, par certains arrangemens qui fe firent dans la Compagnie, il devint Elève de M. Homberg. Il parut également propre à remplir un jour une première place, foit dans la Botanique, foit dans la Chymie.

Mais différentes occupations le détourfèrent des fonctions que l'Académie demande. Ayant été reçu Docteur en Médecine, il fut obligé d'en profeffer un Cours aux Ecolés de Paris pendant deux ans ; ce qu'il fit avec beaucoup de fuccès. D'aileurs fon père, bon Praticien, & des plus employés, les menoit avec lui chez fes malades, & l'inftruifoit par fon exemple, & l'obfervation de la Nature même, Jeçon plus efficace & plus animée que toutes celles qu'on prend dans les Livres; & comme ce père, à caufe de fes indifpofitions, paffa les deux dernières années de fa vie fans fortir de chez lui, il exerçoit -encore la Médecine par fon fils, qu'il envoyoit chargé de fes ordres, & éclairé de fes vues. Auffi après la mort, qui arriva en 1705, le fils fuccéda à la confiance

par

« AnteriorContinuar »