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truire de fa Phyfique expérimentale; & cet habile homme, quoique fort mystérieux, ou lui révéla fes fecrets en faveur de fon génie, où ne les put dérober à fa pénétration.

Les amis de M. Homberg, qui le voyoient s'eloigner toujours du Barreau de plus en plus, fongèrent à le marier pour le rendre Avocat par la néceffité de fes affaires : mais il ne donna pas dans ce piége; & afin de l'éviter plus sûrement, & d'être plus maître de lui-même, il fe mit à voyager, & alla d'abord en Italie.

Il s'arrêta un an à Padoue, où il s'appliqua uniquement à la Médecine, & particulièrement à l'Anatomie & aux Plantes. A Bologne, il travailla fur la pierre qui porte le nom de cette Ville, & lui rendit toute fa lumière; car le fecret er avoit été prefque perdu. A Rome, il fe lia particulièrement avec Marc-Antoine Celio, Gentilhomme Romain, Mathématicien, Aftronome & Machinifte, qui * réuflisfoit fort bien à faire de grands verres de lunettes. M. Homberg s'y appliqua avec lui, & y trouva à fouhait de quoi exercer les lumières de fon efprit, & fon adreffe à opérer. Il ne négligea pas même ces Arts dont l'Italie s'eft confervé jusqu'ici une espèce de fouveraineté, la

Peinture, la Sculpture, la Mufique; il y devint affez connoiffeur pour s'en pouvoir faire un mérite, s'il n'en avoit pas eu d'autres. Ce n'eft pas la Philofophie qui exclut les chofes de goût & d'agrément; c'est l'injustice des Philofophes, qui, comme le refte des hommes, n'eftiment que ce qui les diftingue.

D'Italie, il vint en France pour la première fois, & il ne manqua pas d'y rechercher la connoiffance & de s'attirer l'eftime des Savans. Enfuite il paffa en Angleterre, où il travailla quelque temps avec le fameux M. Boyle, dont le labo. ratoire étoit une des plus favantes Ecoles de Phyfique.

De-là M. Homberg paffa en Hollande, où il fe perfectionna encore en Anatomie fous l'illuftre Graff, & enfin il revint à Quedlimbourg retrouver fa famille. Quelque temps après, riche d'une infinité de connoiffances, il alla prendre à Wittemberg le degré de Docteur en Médecine, que l'on a d'ordinaire à moins de frais. Ses parens, felon la coutume des parens, vouloient qu'il fongeât à l'utile, & que, puifqu'il étoit Médecin, il en tirât du profit: mais fon goût le portoit davantage à favoir. Il voulut voir encore les Savans de l'Allemagne & du Nord; &

comme

comme il avoit un fonds confidérable de curiofités physiques, il fongea à en faire commerce, & à en acquérir de nouvelles par des échanges. Les phosphores faifoient alors du bruit. Chriftian-Adolphe Baldui❤ nus, & Kunkel, Chymifte de l'Electeur de Saxe, en avoient trouvé un différent & nouveau, chacun de leur côté ; & M. Homberg les alla chercher. Il vit Balduinus le premier; il trouva fon phofphore fort beau, & de la nature de la pierre de Bologne, quoiqu'un peu plus foible en lumière. Il l'acheta par quelque autre expérience mais il falloit avoir celui de Kunkel, qui avoit beaucoup de réputation. Il trouva Kunkel à Berlin ; & par bonheur celui-ci étoit fort touché de

l'envie d'avoir le petit Homme Prophete de Guericke. Le marché fut bientôt conclu entre les deux Curieux; le petit Homme fut donné pour le phofphore. C'étoit le phosphore d'urine, préfentement affez

connu.

Les métaux avoient touché particuliè rement la curiofité de M. Homberg. Il alla voir les mines de Saxe, de Boheme & de Hongrie, plus inftructives, fans compa raifon, que les meilleurs Livres ; & il y apprit combien il eft important d'étudier la Nature chez elle-même. Il paffa même Tome Ier.

Ii

jufqu'en Suède, attiré par les mines de

cuivre.

Le Roi de Suède, alors régnant, venoit d'établir à Stockholm un laboratoire de Chymie. M. Homberg y travailla avec M. Hierna, premier Médecin du Roi d'aujourd'hui; & il eut le plaifir de contribuer beaucoup aux premiers fuccès de ce nouvel établissement. On s'adreffoit fouvent à lui, ou pour lui demander des décisions fur des difficultés qui partageoient les plus habiles, ou pour l'engager à des recherches qu'ils n'ofoient entreprendre; & les Journaux de Hambourg de ce temps-là, imprimés en Allemagne, font pleins de Mémoires qui venoient de lui.

Dans tous fes voyages il s'inftruifoit des fingularités de l'Hiftoire Naturelle des Pays, & obfervoit les induftries particulières des Arts qui s'y pratiquent; car les Arts fourniffent une infinité d'expériences très-dignes d'attention, inventées quelquefois par d'habiles gens inconnus, affez fouvent par des Artifans groffiers, qui ne fongeant qu'à leur utilité ou à leur commodité, & non à découvrir des phénomènes de Physique, en ont découvert de rares & de merveilleux dont ils ne s'appercevoient pas. Aini, il fe compofoit une Physique toute de faits finguliers &

peu connus, à-peu-près comme ceux qui,
pour apprendre l'Hiftoire au vrai, iroient
chercher les pièces originales cachées dans
des Archives. Il y a de même les Anecdo-
tes de la Nature. Quand on en a acquis
une grande connoiffance, on ne fait pas
tant de cas des Systêmes, peut-être parce
qu'ils deviennent d'autant plus difficiles &
plus incertains, qu'il les faut ajuster à un
plus grand nombre de faits; & pareille-
ment ceux qui favent beaucoup d'Anec-
dotes hiftoriques, eftiment
eftiment peu les grands
corps d'Hiftoire, qui font des Syftemes à
leur manière.

Le père de M. Homberg fouhaitoit avec paffion qu'il terminât enfin fes courfes favantes, & revînt fe fixer dans fon Pays, où, pour s'affurer de lui, il l'auroit marié. Mais l'amour des Sciences & de la liberté l'emporta encore du fond du Nord en Hollande pour la troifième fois, & de Hollande il repaffa en France pour la feconde; & il y vit, felon fa manière ordinaire de voir, les Provinces qu'il n'avoit pas vues dans fon premier voyage.

A la fin le père s'impatientoit, & faifoit des inftances plus férieufes & plus preffantes que jamais pour le retour. M. Homberg obéiffoit, & le jour de fon départ étoit arrivé; il étoit prêt à monter en

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