Le Pere Mabillon Benedictin a fait un gros Traité in - folio pour la connoissance du tems & de l'âge des Titres anciens, dans lequel il se propose par occasion ou autrement de parler des Manufcrits. La premiere partie, au sentiment de tout le mon⚫de, ne devoit être qu'une suite de l'autre ; & on a eu lieu de s'étonner qu'il lui aie attribué une prérogative fiétenduë dans la République des Lettres : "De crainte, dit-il, que cette „ partie qui doit avoir la principale ,, & la meilleure autorité dans les Lettres ne soit attaquée impunément ,, par des censures ou détruite par de vaines exceptions:" Ne rei litteraria illa pars qua potiorem fibi authoritatem vindicat, vanis exceрtionibus atque cenfuris impunè violetur. Je ne sçai si les Sujets de cetre République souscriront à cette décision, & s'ils ne croiront pas cette connoillance dont le Pere Mabillon traite si amplement, l'occupation d'un païs qui leur est étranger, que la moindre experience peut apprendre, ignaris etiam fervilium literarur. SeneIls laifleront volontiers ces soins à que. ceux qu'Apollon néglige, & qui n'étant entêtez que de genealogies, دو د Siulias Not. Stultas questiones & genealogias. n'admirent que ce qui a du rapport, ou, comme dit un bel efprit de ce tems, * Qui par des soins obfcurs pour des tombeaux vulgaires Fatiguent le public. Quoique dans cet Ouvrage il y ait des Differtations assez recherchées pour notre Histoire, & qui meritent bien d'être loiées ailleurs; puisque Monfieur de Valois reconnoît qu'on Gal. en a pris une partie dans sa Notice Deff. des Gaules; on ne trouve pas cepenP.13dant, à ce qu'on m'a mandé d'Angleterre, que les Auteurs ayent executé leur dessein, ni que ce Traité réponde à l'attente des Curieux. En effet, après avoir donné quelques modeles des Caracteres Romains seylement, qui sont constamment ou des Inscriptions du premier tems de la République, ou des derniers de l'Empire, tout le reste se réduit à quelques donations ou privileges de Rois & de Princes faites ou aux Monafte res * Viliaque obscuro busta labore colunt. P. Pet. in Calen. p. 89. 1 res de leur Ordre ou à d'autres Eglifes. Je vous laisse à juger d'ailleurs quelle foi le public ajoûte à ces forres de Titres & quelle reputation le Moine Cajetan leur a donnez. On n'a pas pris garde encore que pour l'écriture courante principalement, comme est celle des Titres, chaque païs, chaque Province a presque un caractere particulier que forme le climat ou la figure des lettres, ou le langage topique, comme je le puis justifier par deux Titres très-curieux que j'ai. L'un est une Patente de Blanche Comtesle de Troyes de 1221. & l'autre une Donation au Monastere de S. Martin * de Gangalanda de 1254. dont le caractere est absolument different : c'est aussi ce qui a été remarqué par Allatius contre Inguiramio§, & ce qu'on peut voir encore tous les jours pour peu qu'on ait d'experience dans le monde. Le Latin dans la France, dans l'Allemagne, dans l'Italie, dans l'Orient & dans le Midi, prend l'air du climat, & s'habille , pour ainsi dire, à la mode du païs : témoin ce Manuscrit de l'Empereur qu'on ne pût déchiffrer à Vienne quoiqu'il soit latin, parce qu'il a été écrit dans quelque païs barbare. L'Empereur & Monfieur Lambecius crurent longtems qu'il étoit Ethiopien; tant les caracteres en sont bizarres. Mais Monfieur Ludolf à qui on l'avoit communiqué, après un-peu d'application se douta qu'il pouvoit être latin, & ce soupçon lui en fit découvrir la verité. C'est ce que m'en a écrit Monsieur Arnold le fils. Ce Manufcrit, ajoûte-t-il ensuite, ne contient que des passages de l'Ecriture, & fi ce n'étoit le caractere, il feroit de peu de consequence. Mais, Monsieur, afin que vous ajoûtiez plus de foi à ce que je dis, voici un morceau figuré de ce Manufcrit que Monsieur Ludolf a eu la bonté de m'envoyer. [Voyez la premiere Figure de la 11. Planche.] Les preuves que l'on a de fon merite & de son sçavoir dans les langues, & principalement dans l'Ethiopienne, engagerent l'Empereur à lui envoyer ce MSS. pour l'examiner. On s'imagina que Monsieur Ludolf qui avoit interpreté dans mat, * Je ne sçai ce que c'est que ce lieu; il paroit pourtant que c'est en France. § Ex modo quodam cuilibet nationi proprio quæ in notandi hanc potius formam quam aliam, optimam tamen ab ipfis judicatam inclinant. com dans ce tems-là un MSS. Ethiopien, 85 pourroit aufli aifément déchiffrer celui-ci dont l'écriture étoit inconnuë. Ce sçavant homme neanmoins n'y fut point trompé comme les autres : il découvrit ce que c'étoit & en envoya l'alphabet à Vienne, à ce qu'il m'a mandé lui-même. Il n'a pas crû ajoute-t-il, dans sa Lettre qu'il fût necessaire de l'expliquer; s'imaginant bien que Paris ne manque pas d'habiles gens qui le peuvent faire en le considérant avec attention. Et en effet, pour confirmer cette opinion avantageuse de nôtre Patrie me je l'eus communiqué à un Auditeur des Comptes de mes intimes reau de amis, homme d'un esprit délicat & Mauné dans le goût des bonnes chofes, tour, sans lui dire dans quelle Langue ce fragment étoit écrit, ni sans lui fuggerer mes conjectures, je fus furpris que dès le lendemain il m'en apporta l'interpretation. Ce MSS. qui me semble avoir quelque chose du caractere Copte, fait voir par confequent que chaque païs a sa maniere d'écrire, & non pas chaque fiécle seulement. C'est aussi ce que je viens de remarquer dans le P. Simon au sujet des MSS. Juifs, dont il distinTom. 11. E gue Mr. Moa |