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déceffeur mais il répondit, qu'il faloit laiffer 'ces Ermites dans leur obfervance ; & qu'il étoit bien informé qu'ils gardoient mieux la regle que ceux qui les perfecutoient. Alors ceux-ci lui dirent: Les Ermites ont toûjours été attachés à Celestin & ne vous reconoiffent point pour vrai pape. C'étoit fraper Boniface à l'endroit le plus fenfible, principalement dans le fort de fes différends avec Philipe le Bel, & il craignoit que ce parti ne fe fortifiât en Ġrece. Il écrivit donc à Pierre patriarche Latin de CP. qui étoit alors à Venife & aux archevêques d'Athenes & de Patras, de s'informer exactement de cette affaire. L'archevêque d'Athenes ordona à Thomas de Sole de chaffer les Ermites de fon ifle; & ils pafferent fous la domination des Grecs, où ils demeurerent deux ans. Mais le patriarche Pierre étant venu à Negrepont & follicité par les freres de Romanie, publia deux fois excomunication contre les Ermites s'ils ne revenoient à l'obediance de l'Ordre.

n.

Pendant ces troubles frere Liberat fuperieur des Ermites, crut que le plus fûr étoit de retourner en Italie, & de fe juftifier devant le pape lui & fes confreres. Ils aborderent à un port de la Pouille en 1303.. dans le temps de la capture de Boniface VIII. Un feigneur du pays nomé André de Segna leur dona une pauvre habitation dans un defert où ils s'arrêterent. Mais le quinziéme général de l'Ordre, Gonfalve de Balboa Portugais élû en 1304. follicita le roi de Naples Charles le Boiteux, de chaffer de fon royaume n. 1304. n. ces fchifmatiques qu'il accufoit même d'hérée. Le roi écrivit à Thomas d'Averfe inquifiteur de l'ordre des freres Prêcheurs, de s'en informer exactement &

13. 1307. n. 2.

1. 3.

2.4.

de punir les coupables. L'inquifiteur les ayant fait venir dans un château du comté de Moliffe, les examina & ne trouva point d'erreur contre la foi: toutefois en s'en allant il leur confeilla de le fuivre, pour éviter d'être inquietés par leurs ennemis. Ceux-ci ne laifferent pas de les infulter par le chemin & de redemander frere Liberat, comme ayant quitté la comunauté fans permiffion des fuperieurs. L'inquifiteur l'avertit de fe mettre en fûreté pour ne pas tomber entre leurs mains, & lui confeilla d'aller droit au pape : il fe mit donc en chemin avec un compagnon pour venir en France trouver Clement V. mais il tomba malade à Viterbe & mourut en 1307.

Ses compagnons vouloient fortir du royaume de Naples, ne s'y trouvant pas en fûreté: mais l'inquifiteur le leur défendit & leur ordona de comparoître encore devant lui. Il joignit avec eux d'autres religieux de mauvaise réputation només de S. Onufre & des hérétiques de la fecte des apoftoliques. Il les condamna tous indiftinctement par une même sentence comme hérétiques & fchifmatiques : notant même comme fauteurs ceux qui les protegeoient. André de Segna, qui avoit logé les Ermites, s'en plaignit à l'inquifiteur, qui n'en fut que plus irrité contre eux, & les fit conduire à Trivento ville épifcopale du comté de Moliffe. Aprés les avoir mis à la queftion pour leur faire confeffer leur héréfie prétendue & les avoir tenus cinq mois en prison : il les condamna à être fustigés publiquement à Naples, puis chaffés du royaume. Mais. il mourut peu de temps aprés, déclarant qu'il les avoit condamnés injuftement.

Quelques-uns fuccomberent aux tourmens, & les

autres

autres vinrent en France pour fe juftifier devant le pape: puis ils fe joignirent à d'autres freres Mineurs qu'ils trouverent en Provence, qui s'étoient auffi feparés de l'Ordre par zele pour l'observance, comme il étoit arrivé en d'autres provinces, particulierement en Tofcane, ce qui produifit deux partis dans l'Ordre: dont l'un fe nommoit les Spirituels, l'autre les freres de la Communauté.Celui-ci étoitle plus nombreux an. 1310. 7. I, & le plus puiffant, mais l'autre ne laissoit pas de fe foutenir, principalement en Provence. Raimond de Villeneuve natif de cette province & medecin du roi Charles le Boiteux, l'excita peu avant fa mort à interpofer fon autorité pour garantir d'opreffion les freres Spirituels &écrire au général de l'Ordre de leur être favorable. Le roi écrivit, non-feulement au général, mais au pape Clement, le priant de faire ceffer ce fcandale. Suivant la priere & le confeil du roi le pape fit venir en la préfence par des ordres fecrets le géneral de l'Ordre Gonfalve & ceux qu'il crut les plus capables de l'inftruire de cette affaire, favoir Raimond Goffredi qui avoit été le treizième général de l'ordre, Guillaume de Cornillon, Ubertin de Cafal & quelques autres. Illes fit venir à Malause au diocese de Vaifon, & interrogea fecrettement le général Gonfalve & les autres enfuite pour favoir la verité mais voyant que la multitude des autres affaires ne luy permettoit pas de vaquer à celle-ci en perfonne, il en dona la comiffion à trois cardinaux, Berenger de Fredole évêque de Tufculum, Guillaume Arrufat prêtre du titre de fainte Potentiene & Thomas Jorzi du titre de fainte Sabine.

Or comme l'affaire tiroit en longueur les freres

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AN. 1310. Spirituels que le pape avoit apellés craignirent d'être cependant maltraités par les fuperieurs de l'Ordre a c'eft pourquoi le pape dona une bulle provifionelle par laquelle il les exempte au nombre de huit qu'il nomme, de l'obéiffance & de la jurifdiction du général & des fupérieurs pendant le cours de l'affaire. Il défend auffi d'inquiéter ceux qui en diverfes provinces adhérent à ces huit: aufquels il ne veut point que la pourfuite de cette affaire nuife en aucune maniere. La bulle est datée d'Avignon le quatoiziéme d'Avril 1310. & l'affaire demeura en cette état pendant deux ans, jufqu'au concile de Viene. Cependant frere Ubertin de Cafal, le plus ardent de tous les Spirituels, dona aux commiffaires un memoire contenant trentecinq chefs de tranfgreffion, vingt-cinq contre la regle & dix contre la déclaration de Nicolas III. à quoi les freres de la Comunauté répondirent par un grand écrit. Les Spirituels de la province de Tolcane furent les plus emportés : ils fe féparerent du corps de l'Ordre de leur feule autorité & fe donerent un général & des fupérieurs: mais cette révolte fut défaprouvée en cour de Rome, & aliéna des Spirituels ceux qui leur étoient auparavant favorables.

1.4.

2.7.

XLIII.

la memoire de Boniface.

Diff. p. 368.

Rain. 1309. n. 4.

Cependant le roi Philipe le Bel pourfuivoit toûjours Procedures contre la condamnation de la memoire de Boniface VIII. fur quoi dés l'année précédente le pape Clement dona une bulle où il dit: Au commencement de notre pontificat, lorfque nous étions à Lion & enfuite à Poitiers, le roi Philipe, les comtes Louis d'Evreux, Guide S. Paul & Jean de Dreux, avec Guillaume du Pleffis chevalier, nous demanderent inftament de recevoir les preuves qu'ils prétendoient avoir que le pape Boniface VIII.

notre prédécesseur étoit mort dans l'héréfie. Nous AN. 1310. ne pouvions croire que cette accufation fût bien fondée, fachant qu'il étoit né de parens catholiques & dans un païs qui l'étoit : qu'il a été nourri dans la cour de Rome & y a paffé la plus grande partie de fa vie: qu'il a accompagné le pape Martin & le pape Adrien dans leurs légations de France & d'Angleterre, & a tenu fous eux la chancellerie. Il avoit exercé en cour de Rome les fonctions d'avocat : il y a été fait notaire, puis élevé à la dignité de cardinal, & enfin étant papeil a publié plufieurs conftitutions pour la gloire de Dieu, l'affermiffement de la foi & la deftruction des hérétiques. Toutefois parce que le crime d'héréfie est le plus dérestable & le plus dangereux de tous: nous n'avous pas cru devoir diffimuler cette accufation, ni la laiffer fans examen, particulierement dans l'églife Romaine mere & maîtreffe de tous les fidéles qui reçoivent d'elle la doctrine & la regle de la religion.

C'eft pourquoi étant encore à Poitiers, nous avons réfolu, de l'avis de nos freres de doner audiance aux accufateurs de Boniface, & nous leur avons affigné ter me pour comparoître devant nous à Avignon le premier jour plaidoyable aprés la Purification de la Vierge, alors prochaine & maintenant pasfée: mais n'ayant pû nous trouver pour lors au lieu marqué, tant à cause des affaires qui nous font furvenues, que de la mauvaise faifon & de la difficulté des chemins: nous citons par ces préfentes les mêmes perfones qui croiront avoir interêt en cette affaire pour accufer ou pour défendre, au premier jour aprés le fecond dimanche de carême. La bulle eft datée du treiziéme de Sep

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