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Etant donc aflistés des vénérables peres Pierre évê- A N. 1320. que de Carcaffone, Raimond de Mirepoix & Barthelemi d'Alet, parce que nous n'avons pû commodement avoir un plus grand nombre d'évêques:nous portons contre ledit frere Bernard fentence de dépofition & de dégradation : aprés quoi il fera mis en prifon & p. 354 aux fers pour y faire pénitence perpetuelle au pain & à l'eau : nous en réfervant la mitigation. Quant à la machination contre la vie du pape Benoît, n'en aïant pû trouver de preuve, nous l'en déclarons abfous. Auffi tôt aprés la fentence prononcée, les évêques procédérent à la dégradation du condamné, qui fut le jour même enfermé dans la prifon de l'inquifiteur, qui étoit de l'ordre des freres Prêcheurs.

Mais le lendemain neuviéme de Décembre 1319. p. 35 Raimond Foucault procureur du roi en la fénéchaufée de Carcaffone apella à minima de la fentence des évêques comme trop douce à proportion des crimes de frere Bernard: foûtenant qu'ils devoient le livrer au bras féculier, & ne pas l'abfoudre de l'accufation concernant le pape Benoît : l'apel étoit dirigé au S. fiége. Enfuite le pape Jean ordonna que frere Bernard feroit dépouillé de l'habit de S. François qu'on lui 36si avoit laiffé dans la prifon, & défendit de mitiger fa pénitence. La bulle eft du vingt-fixiéme de Février 1320. & frere Bernard mourut dans cette prifon.

to. I. p 117. LIV.

Question fur

privilegiés.

Jean de Poilli docteur en théologie de l'univerfité de Paris foûtenoit alors dans fes leçons & fes fer- les confelicurs mons plufieurs propofitions contre les priviléges ac- Vas est. excordés aux religieux Mandians touchant l'adminiftra- trav.comm. tion du facrement de pénitence. Le pape Jean en étant informé fit venir ce docteur à Avignon en fa

Tome XIX.

Rr

AN. 1320.

n. 20.

préfence, où les erreurs dont on l'accufoit furent réduites à trois articles. 1. Ceux qui fe font confeffés aux religieux font obligés à confeffer encore les mêmes pechés à leur curé. 2.Le canon Omnis utriufque fexus, demeurant en vigueur, le pape ne peut empêcher que les paroiffiens ne foient obligés de confeffer tous leurs pechés une fois l'an à leur propre prêtre qui eft le curé. Dieu même ne le pouroit faire parce qu'il y a contradiction. 3. Ni le pape ni Dieu même ne peut donner un pouvoir général d'entendre les confeffions, en forte que le pénitent ne foit pas obligé de confeffer encore les mêmes pechés à fon curé.

Le pape fit donner copie de ces articles à Jean de Poilli & lui donna pleine audiance même devant les sp. Rain. 1311, cardinaux en confiftoire, & en particulier devant quelques-uns d'entre eux députés à cet effet, Or voici les raifons alleguées de part & d'autre. Jean de Poilli difoit: Le pape ne peut donner de privilége au préjudice du droit d'autrui, encore moins contre le droit divin: or le curé n'a point tranfmis fon droit au religieux privilégié ; & l'inftitution des curés eft de droit divin; puifque fuivant la glose ordinaire les prêtres répréfentent les foixante & douze difciples, comme les évêques répréfentent les apôtres. De plus, le pape n'a pas de droit divin plus de pouvoir que les autres évêques. Ce que l'auteur prétend prouver par un chapitre de Gratien, mais tiré d'une fauffe décrétale. Enfin il foûtient que ces priviléges renverfent l'ordre de la hiérarchie, puifqu'il n'y a pas plus d'obligation de fe confeffer à l'évêque qu'au curé.

Luc. . 1.

Dist. 21. c. zi

In Love,

Rain-n. 230

On difoit au contraire pour les confeffeurs privilégiés: La jurisdiction du pape n'eft pas renfermée dans

un diocése comme celle d'un évêque, ni dans une AN. 1320. province comme celle d'un archevêque : elle s'étend par tout le monde. La raifon eft que la dignité d'archevêque n'eft pas de droit divin, mais de droit humain pofitif, qui a reglé les limites des diocéfes : au lieu que celle du pape eft de droit divin établie par J.C. quand il dit à S. Pierre : Paiffés mes brebis, fans aucune exception ni reftriction. Sa puiffance s'étend Jo. 1. 174 donc par tout & il ne la tient point des autres hommes, mais tous tiennent la leur de lui, & il conferve par tout une jurifdiction immédiate. A l'égard du curé, il est bien autrement foûmis à l'évêque que l'évêque ne l'eft au pape : le curé n'eft point juge ordinaire dans fa paroiffe comme l'évêque dans fon diocéfe, non plus que l'archidiacre & les autres qui font établis par provifion de l'évêque. L'évêque confiant au curé le foin d'une paroiffe ne s'en décharge pas, il en demeure toûjours refponfable comme auparavant, & y garde toûjours la principale autorité : d'où s'enfuit que l'abfolution donnée par le pape ou par l'évêque, décharge le paroiffien de l'obligation de la deman

der à fon curé.

Quant au canon du concile de Latran, il ne done 1. 15. aucun nouveau droit au curé : car le propre prêtre qu'il nomme n'est ainsi nommé que par opofition à l'étranger qui n'a aucune jurifdiction fur le pénitent, mais non par opofition au prêtre commun autrement le penitent ne pourroit s'aquiter du devoir de la confeffion qu'en fe confeffant à son curé, non à fon évêque ni au pape. Le propre prêtre eft donc quiconque a la puiffance d'abfoudre, foit ordinaire ou déléguée: c'eft à-dire le pape, l'évêque, le curé óu celui à

AN. 1321,

L V.

qui ils ont doné ce pouvoir. Or le pape & l'évêque peuvent le donner à quiconque a reçu l'ordre de prêtrife; & c'eft la coûtume de l'églife Romaine,que chacun peut obtenir d'un pénitencier du pape de s'adreffer à quelque prêtre que ce foit pour être absous. Enfin il eft expédient que le pape ufe de ce pouvoir de commettre des confeffeurs, à caufe de l'ignorance de plufieurs curés de la multitude du peuple, & de la difficulté particuliere de certains pécheurs pour ne pas confeffer à eux, comme par exemple leurs propres

concubines.

fe

Aprés que les propofitions avancées par le docteur Jean de Poilly curent été examinées, il se rendit aux raifons qu'on lui oposoit ; & fe retracta en consistoire, difant qu'il croïoit le contraire veritable. Sur quoi le pape rendit la sentence par une décrétale fameuse qui commence par Vas electionis : où aprés avoir exposé le fait, il prononce ainfi : Nous condamnons ces articles affûrant que la doctrine contraire eft vraïe & catholique. Savoir que ceux qui le font confeffés aux freres privilégiés ne font pas plus obligés à réïterer la confeflion des mêmes pechés, que s'ils les avoient déja confeffés à leur propre prêtre fuivant le concile de Latran. Et enfuite: Nous ordonnons audit docteur Jean de révoquer de fa propre bouche publiquement à Paris ces articles dans fes leçons & fes fermons : ce qu'il a promis d'exécuter fidélement. La bulle cft adreffée à tous les évêques & datée du vingt-cinquiéme de Juillet 1321.

En même-tems le pape Jean termina un difféTréfor du rend qu'il avoit avec Bertrand de Got vicomte de Lomagne en Gafcogne pour le tréfor de Clement V.

pape Clement

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317

p. 369.

Sup.n. 11,

fon prédeceffeur, dont Bertrand étoit neveu. Le pape AN. 1321. Clement étant au lit de la mort fit tranfporter au Bal, to. 1, p. château de Montil prés de Carpentras une partie de 618. 19. to. 2. fon tréfor, & retint l'autre pour lui. Aprés la mort le vicomte de Lomagne qui étoit seigneur de Montil se - faifit de la partie du tréfor qui y étoit, & même de celle qui étoit demeurée auprés du pape fon oncle & généralement de tous les meubles qu'il avoit laiffés en divers lieux, argent comptant, vaiffelle d'or ou d'argent, livres, étofes, pierreries, ornemens d'églife, titres & papiers, & difpofa de tout comme s'il eût été héritier univerfel du pape Clement. Le pape Jean aprés avoir attendu prés de quatre ans depuis la promotion, publia un monitoire à Avignon le onzième de Mai 1320. par lequel il exhorte le vicomte & tous les autres qui ont détourné quelque chofe des biens de fon prédeceffeur, à les raporter au camerier & aux tréforiers de l'églife Romaine, & ordone à tous ceux qui en ont connoiffance de venir à révelation. Mais d'ailleurs le pape Jean aprit que Clement V. avoit remis de fon vivant au vicomte fon neveu trois cens mille florins d'or pour emploïer au fecours de la terre fainte, & trois cens quatorze mille apli cable à d'autres œuvres pies. Ce qui avec deux autres fommes dues par le roi de France & par le roi d'Angleterre montoit à plus d'un million de florins : le tout deftiné au fecours de la terre fainte..

Le pape fit prier le vicomte par quelques cardinaux de lui remettre une partie de cet argent pour un paffage particulier à la terre fainte, qu'il prétendoit procurer en attendant le paffage général : fur quoi le vicomte lui enyoïa un gentilhomme qui n'aïant point

P. 374.

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