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A N. 1328.

Greg, c. 7.

LI.

réconcilié avec
les évêques.
PS. LVII. 10.

ni d'évêques, ni de prêtres : ce n'étoit que des joueurs de flutes & des danfeurs avec des femmes de même profeffion: une entre autres la plus fameufe de toutes, accoûtumée à fuivre l'armée, marchoit à cheval habil lée en homme & excitoit à rire les affiftans des discours dignes d'elle. C'est ainsi que le patriarche fut ramené en triomphe ; & voilà ce qui fe paffa le mardi de la Pentecôte vingt-quatriéme de Mai.

par

Le foir comme le jeune empereur retournoit au Palais, il rencontra l'ancien patriarche Niphon qui lui demanda comment il vouloit traiter fon aïeul: Humainement & en empereur, répondit le prince; & Niphon ajoûta: Si vous voulés régner fans crainte, ôtés-lui toutes les marques d'empereur, faites le revêtir d'un méchant cilice & l'envoïés en prifon

éxil. C'est que Niphon gardoit du reffentiment contre le vieil Andronic, pour l'avoir laiffé déposer; & se flatoit de pouvoir remonter fur le fiége patriarcal, Quelques-uns de ceux qui aprochoient l'empereur lui tinrent des difcours femblables & le détournérent de garder fon aïeul comme affocié à l'empire. C'est pourquoi aprés plufieurs déliberations, il fut réfolu qu'il conferveroit les ornemens imperiaux & demeureroit dans les apartemens du palais, mais fans en sortir ni fe mêler de rien; aïant toutefois de quoi fubfifter honêtement avec les officiers.

Le patriarche Ifaïe loin de compatir à la disgrace Le patr. Ifaie du vieil empereur, ne pût diffimuler fa joïe & dit ces paroles du pfeaume: Le jufte fe réjouira quand il verra la vengeance. Ensuite il chercha à se venger des évêques & des prêtres qui lui avoient été opofés, & attachés au vieil empereur ; & il fufpendit les uns de leurs

lib. 2. c.

fonctions pour un tems, & interdit les autres pour AN. 1328. toute leur vie. Le jeune empereur étant allé trouver le patriarche pour le remercier & s'entretenir avec lui familiairement, le pria de pardoner aux évêques dont il fe plaignoit amérement comme en aiant été trahi: Cantacuz mais il ne le put fléchir. Enfuite il lui envoïa le grand 12. domestique Jean Cantacuzene, qui d'abord ne put rien gagner fur fon efprit, & le prélat foûtenoit toûjours qu'il faloit commencer par châtier ces évêques. Enfin il convint avec Cantacuzene que pour les juger on tiendroit un concile où il comparoîtroit, non comme juge, mais comme partie.

C.2,

Le jour marqué étant venu tous les évêques s'affem- p. 196. blérent au palais patriarcal. Cantacuzene s'y trouva auffi & recommanda aux évêques accufés de garder le filence, se chargeant de parler pour eux. Le patriarche Ifate fe plaignit qu'ils l'avoient fait chaffer de fon fiége & emprifoner. Ils ne répondirent rien, & aprés un long & profond filence, Cantacuzene dit : N. S. dit dans l'évangile: Si votre justice ne furpaffe celle Matth. v. 25, des fcribes & des pharifiens, vous ne pouvés entrer au roïaume des cieux. Or, c'eft-à-dire, comme je l'aprens de vous, qu'il ne fuffit pas de ne point rendre la pareille à celui qui nous maltraite; mais qu'il faut encore lui faire tout le bien que nous pouvons. Il nous ordone ailleurs de cacher nos bonnes œuvres, & d'un autre côté d'en faire éclater la lumiere, afin que le pere céleste foit glorifié, qui femblent des préceptes contradictoires. Mais je croi que le premier nous regarde nous autres qui fommes imparfaits & qui en montrant nos bonnes œuvres pourions en perdre la récompense: mais vous qui êtes nos maîtres & qui

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VI. I. V. IS

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êtes propofés à tout le monde comme des modéles de vertu, c'est à vous qu'il convient de faire éclater vos bonnes œuvres. Si donc vous êtes durs & implacables à ceux qui vous ont offenfé, quel exemple nous donnés-vous, & quel châtiment ne vous attirés-vous point? Il leur propose ensuite l'exemple du jeune empereur, qui venoit de pardoner généreufement à un particu lier qui lui avoit dit des injures atroces, & ne s'attendoit qu'à une cruelle mort; & finit en adressant la parole au patriarche en particulier.

Aprés ce difcours Cantacuzene fe leva, ce que firent auffi tous les autres, même le patriarche; & prenant avec lui les évêques accufés & exhortant les autres à faire comme eux, ils fe jetterent tous aux pieds du patriarche & dirent: Pardonés-nous, mon pere, nous avons failli, remettez-nous notre faute, afin que le pere celefte vous remette aufli les vôtres. Alors le patriarche dit parlant à Cantacuzene: Vous m'avés pris dans un filet dont je ne puis me retirer : il n'eft pas poffible de faire autre chofe que ce que vous voulés. Aufli-tôt il pardona aux évêques qui l'avoient offensé, demanda mifericorde pour eux, les embraffa l'un aprés l'autre, & leur dona fa bénédiction en figne de reconciliation fincére: enfin aprés un petit difcours, il congédia l'affemblée, & les évêques accufés allerent au palais remercier l'empereur.

A Rome Pierre de Corbiere continuoit à jouer le perfonage de pape; & le vingt-feptiéme de Mai 1328. il publia deux bulles contre Jean XXII. Par la premiere il confirme fa dépofition prononcée par Loüis de Baviere le dix-huitiéme d'Avril, & déclare tous les clercs féculiers ou réguliers, adhérans au pape

Jean, privés de tous leurs bénéfices, que nous réfervons, ajoûte-t’il, à notre disposition. La feconde bulle regarde les laïques aufquels il défend d'obéïr en aucune maniere à Jacques de Cahors, c'eft-à-dire, au pape Jean, ou le nommer pape, fous peine d'être punis comme hérétiques.

AN. 1328.

6.98.

Cependant les affaires de Louis de Baviere com- Rain, n. 43. mencerent à décliner. Il perdit Piftoïc où fut pris un nommé Donat Auguftin,que l'anti-pape en avoit fait évêque ; & Barenzo Ricardi qui en étoit évêque légi- ghel. to 3, time y fut rétabli. Loüis lui-même aïant pris quelques P-373. places autour de Rome & tenté inutilement d'entrer dans le roïaume de Naples, fut obligé manque de vivres & d'argent de rentrer à Rome le vingtiéme de Juillet. Enfin ne pouvant plus y demeurer en fûreté, J. Vill. c. 73. il en fortit le quatriéme d'Août & s'en alla à Viterbe emmenant avec lui fon anti-pape. Les Romains les traitoient d'hérétiques & d'excomuniés, & crioient contre eux : Qu'ils meurent, qu'ils meurent, & vive la fainte églife. Ils leur jettoient des pierres & tuérent de leurs gens. La nuit même Barthold des Urfins neveu ducardinal légat, entra dans Rome avec les troupes; & le matin vint Etiene Colonne. Le cardinal légat Jean des Urfins y vint le dimanche septiéme d'Août avec fa fuite & fut reçu avec grand honeur & grande joïe. Rome étant ainfi revenue à l'obéïssance du pape, on fit plufieurs actes contre Loüis de Baviere & l'anti-pape: on brûla dans la place du capitole tous leurs priviléges;les enfans mêmes alloient au cimetière déterrer les corps des Allemans & des autres partifans de Louis, & aprés les avoir trainés par la ville, ils les jettoient dans le Tibre.

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Le pap Jean aïant reçu à Avignon cette heureuse nouvelle, en dona part au roi Philipe de Valois par une lettre où il ajoûte, que quand fon légat entra à Rome le peuple crioit: Vive la fainte églife notre mere, notre faint pere le pape Jean & le cardinal légat, & meure Pierre de Corbiere, les hérétiques & les Patarins & les autres traîtres. Et enfuite le faint fuaire de N. S. que quelques Romains gardoient avec grande crainte dans l'eglife de Notre Dame de la Rotonde, fut reporté par le légat à S. Pierre la veille de S. Laurent, c'est-à-dire, le neuviéme d'Août avec grande dévotion du clergé & du peuple, qui fuivoit ; & il fut remis à fa place honorablement. La lettre du pape eft du vingt-huitiéme d'Août.

Michel de Cefene général de l'ordre des freres Mineurs, homme de grande réputation pour la doctrine & la vertu, fe retira alors de l'obéïffance du pape Jean pour s'attacher à Louis de Baviere & à l'antipape. Dés l'année précédente le pape averti qu'il parloit contre la décrétale Cum Inter non nullos, & favorifoit en fecret le parti de l'empereur : lui manda de fe rendre à Avignon dans un mois pour quelques affaires de fon Ordre. La lettre étoit du huitiéme de Juin 1327. Michel étoit alors malade à Tivoli & envoia deux de fes confreres faire fes excuses, puis étant gueri il vint à Avignon où il arriva le premier Decembre. Le pape le reçut honêtement & ne lui parla que du relâchement de l'obfervance en quelques provinces & du mauvais gouvernement de quelques fuperieurs ; & pour y remedier, il lui dona de grands pouvoirs. Mais il ajoûta une défense à Michel de Cefene de fe retirer de fa cour fans permiffion particuliere;

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