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Crut voir l'Olympe radieux.
Mais non, la plante dédaigneufe
Songe qu'il eft beaucoup plus beau
De fe trouver bien malheureuse

Et de regretter fon Château:

Suis-je faite

pour vivre au milieu de ces herbes,

A l'ombre de ces troncs auffi durs que fuperbes?
A quoi fongeoit le Jardinier?

A tous ces végétaux peut-il m'associer?
Mais ma délicateffe extrême,

La connoît-il, hélas! s'il végète lui-même?
Senfible & délicate autant que je le fuis,
Avec ces êtres-là je périrai d'ennuis.

Acacia, je vous en prie,

Faites-moi grace au moins de votre compagnie,
Et tâchez de vous départir

De la vanité ridicule

D'être de ma famille & de m'appartenir:
D'en convenir jamais je me ferois fcrupule...
Pâle & beau Citronnier, j'aime fort vos odeurs...
C'est dommage, mes nerfs... je fuis d'une foibleffe...
Mais je n'en fuis pas la maîtreffe,

Et vous me donnez des vapeurs...

Paffez-moi d'être un peu naïve,

Je fuis honteufe affez de tout ce qui m'arrive......

Pour vous, Palmier majestueux,

Ce m'est beaucoup d'honneur que votre voisinage; Mais il me fait un peu d'ombrage.

Cet étalage faftueux,

Ce luxe de rameaux que chez vous on renomme
Eft dur à foutenir... la majesté m'affomme.
Je ne m'en doutois pas, répondit le Palmier;
Tu me l'apprends, ma chère amie,

Le plus grand de mes torts, c'est de t'humilier,
Et de m'en corriger je ne fens nulle envie.
Mais chacun a les fiens; ta fenfibilité,

Dont tu veux tirer vanité

Crois-moi, c'est un défaut plus fâcheux que les nôtres, A charge pour toi-même, infupportable aux autres... Tu crois beau de t'évanouir

A l'approche de l'Homme auteur de ton bien-être... Sous les yeux careffans, fous la main de ton maître Il vaudroit mieux t'épanouir.

Vois ces charmantes fleurs, ces arbustes fertiles,

Ces arbres moins féconds, mais non pas moins utiles; Tout fourit à fon bienfaiteur,

Lui confacre fes fruits, fes parfums, fon branchage:

Moi-même je me fais honneur

De couronner fa tête au moins de mon feuillage...

si
Mais c'est trop m'arrêter à des difcours fi vains,

Et c'est trop repouffer tes injuftes dédains...
Idole des Héros, arbre de la Victoire,
Dont je fuis à la fois le fymbole & le prix,
Que pourroit ton eftime ajouter à ma gloire,
Et que peut m'ôter ton mépris?

FABLE XX.

PHIDIA S.

AUTOUR d'un bloc de marbre, à force de génie,
Phidias opéra fi bien

Qu'il en fit un objet digne d'idolâtrie,
Le Jupiter Olympien.

Ce Dieu-là cependant ce n'étoit qu'une idole;

Mais aux yeux

d'un Peuple payen,

Pour être un Dieu vivant il ne lui manqua rien,

La Fable ajoute ici : Pas même la parole.

Au moment folennel, à ce moment fi beau,
Où l'Artiste faifi d'un fublime délire
Au front de la statue appliqua le cifeau,
Frappa le dernier coup & s'écria: Respire...
Par un prodige tout nouveau,

A ce mot créateur qui réfonnoit encore
Jupiter répondit: Adore...

Non pas moi, reprit Phidias...

En épuifant ma tête, en fatiguant mon bras,

C Monnet Del.

Non pas moi!

HL. Schmitz Sculp

Fable XX. Liv. VIII. T. II.

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