FABLE XXII LE MILAN ET LA COLOM BE. UN N vieux Milan des plus pervers, Et bien connu pour tel chez le Peuple des airs; Dans plus d'un fait patibulaire; Mais enfin blanc ou noir il s'en étoit tiré; Accufa la Colombe au Confeil des Oifeaux Deux orphelins de noble race, Que lui Milan, plein de bonté, Élevoit à plaifir par pure charité. Il produifoit les pieds de ces pauvres victimes Soient confifqués à fon profit. Le fait paroît étrange; on l'explique, on l'embrouille, Et parti pour & contre, & propos vains & fous, On fait ce que fouvent on a fait parmi nous. Au Palais, en Public, on crie, on fe récrie : Pauvre victime! & quelle horreur! Les Juges en fecret font bien de la partie; Eft le plus empêché dans toute cette affaire; Mon malheur eft certain, tout veut que j'y fuccombe! Il faut que l'un des deux périffe!... Vous périr! & pourquoi, lui répondit fa Sœur? Efpérez mieux de la justice. Vous êtes trop connus l'un & l'autre en ces lieux; Eh! ma sœur, vous n'y fongez pas, Le bec trop redouté qui trahit le coupable Si l'on avoit ofé le trouver condamnable, FABLE XXIII. LE RENARD ET LE DRAGON. AVEC une ardeur singulière Un Renard creufant fa tanière Y fit tant & fi bien, que d'encor en encor Où veilloit un Dragon qui gardoit un tréfor. Épargnez votre ferviteur, Qui confeffe à vos pieds, dit-il, fon imprudence; Un trèfor ne m'est bon à rien, Éclairez, s'il fe peut, ma profonde ignorance. Me femble perdre le fommeil Et tous les plaifirs de la vie, Cet or apparemment comble tous vos fouhaits? Je Je le garde, il fuffit.-Sans doute pour vous-même?— Telle eft de Jupiter la volonté fuprême; Je le garde toujours, & n'y touche jamais. Et vous ne permettez d'y toucher. — A perfonne.Je le crois, cependant... Monseigneur me pardonne, Si je ne fais pourquoi. Tel eft l'arrêt du fort. Je ne vous entends pas; mais je vous plains bien fort; Et pour vous avouer, Seigneur, ce qui m'en femble: S'il exifte fous les Cieux Un Être qui vous ressemble, Je le trouve bien né dans le courroux des Dieux! II. Partie. |