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326. Je dis, qui ne puiffent pas fe déduire des premiéres, parcequ'il y a des effets particuliers, qui ont befoin de demandes particulieres, lefquelles ne ferviroient de rien pour l'explication de tous les autres, ou qui font évidemment renfermées dans l'effet même, & qu'il ne feroit pas à propos de mettre d'abord à la tête de la Phyfique. Il y en a même quelques-unes qui ont befoin, pour être accordées, de plufieurs propofitions, quoiqu'elles foient générales, comme celles des fyftêmes & de la fphère qui doivent être à leur place. Mais toutes ces demandes font des fuites de celles qui ont été faites d'abord.

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327. Il s'enfuit que depuis le commencement du monde, lorfqu'un corps, qui étoit en repos, commence d'être remué, on ne peut plus en Phyficien attribuer son mouvement qu'à un autre corps. Car le Phyficien a dû d'abord fuppofer le mouve (a) N. 314. ment dans la nature corporelle (n), mais il a dû y fuppofer tout ce qu'il lui falloit pour déduire enfuite les différens effets ; & s'il s'en trouve quelqu'un qui ne puiffe en être déduit, comme la Réfurrction des morts & les autres miracles de Jésus-Christ, ces effets ne peuvent être expliquez en Phyficien. C'eft pourquoi je ne peux approuver ceux qui expliquans dans leur Métaphyfique la puiffance obédientielle, & foutenans que les créatures, qui ont cette puiffance obédientielle, doivent avoir une proportion avec leur effet, fe mettent en peine de trouver cette proportion dans la boue, dont Jesus-Chrift fe fervit pour ren

dre la vûe à un aveugle. Car en cherchant dans la falive dont J. C. fit cette bouc une vertu déterfive, ils effaient de faire d'un vrai miracle un effet tout naturel, & de l'expliquer en Phyficiens : ce qui ne démontreroit plus une puiflance furnaturelle qu'ils entreprennent d'expliquer.

(e) Depuis le n. 302 jufqu'au 314.

328. Toutes ces demandes fuppofées (0), je remarque en premier lieu, qu'il s'enfuit divers effets de la quantité d'étendue ou de mafle & de la viteffe des corps, & que ces effets font plus ou moins grands, felon que cette étendue ou cette viteffe font plus ou moins grandes. La feule idée des chofes nous fait concevoir que cela doit être ainfi, & l'expérience nous apprend Expérience 3. que cela eft. Un boulet produira bien plus d'effet en fortant avec rapidité du canon, que s'il alloit auffi lentement que l'ombre d'un cadran. Que deux corps de même matiere aillent également vîte, que l'un foit bien plus gros que l'autre, tout le reste étant égal, le plus gros produira plus d'effet.

329. Il s'enfuit que l'étendue & la viteffe font des forces. Car nous n'avons pas d'autre idée de force, finon que c'elt unc grandeur qui produit des effets plus ou moins grands felon qu'elle eft plus ou moins grande.

330.

Il s'enfuit que fi le rapport de la viteffe d'un corps que je nommerai A, à celle d'un autre que je nommerai B, eft plus grand que le rapport de la masse de B à la maffe de A, ou fi le rapport de la maffe de A à la maffe de B cft plus

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4. 20.

grand que le rapport de la vitefle de B a la viteffe de A, le corps A fera plus fort que B ; & fi ces rapports font égaux, les forces font égales.

331. Il faut entendre ceci de la quantité réelle, & non pas de la quantité apparente de l'étendue : car ce qui nous paroît contenir plus de matiére, n'en contient pas toujours plus en effet. Par exemple, un morceau de liége peut paroître plus gros qu'un morceau de plomb, & cependant faire moins d'effet; quand même il iroit plus vîte, parcequ'il contient moins de liége que le morceau de plomb ne contient de plomb, à caufe des grands pores du liége qui font remplis d'air ou de quelqu'autre matiére encore plus fubtile, laquelle n'aide pas, mais empêche plutôt le liége de fraper.

l'on recon

332. Je remarque en fecond lieu, que nous ne concevons dans les corps par une Voyez le idée intuitive (p), que l'étendue & la viteffe qui foient des grandeurs capables de produire des effets. D'où il s'enfuit que nous ne connoiffons point d'autres forces dans les corps, que leur masse & leur vitesse. 333. Si quelqu'un veut que noiffe autre chofe dans les corps, en quoi il prétende que leurs forces confiftent, qu'il explique ce que c'eft, & qu'il le faffe entendre clairement, finon qu'il n'attende. pas de nous, que nous lui expliquions la machine du monde, ni les phénoménes qu'elle contient, dans le systême de ces forces. Car une explication doit rendre les chofes plus claires qu'elles n'étoient.

Ce

Ce que l'on apporte pour expliquer une chofe, doit donc être plus clair que ce que l'on veut expliquer. On ne conçoit point clairement ces forces prétendues, qui ne confiftent ni dans la maffe ni dans la viteffe des corps. On ne les repréfente que par des idées abstractives (q), par une ref- [q] Voyez te femblance éloignée avec les forces con- n. 20. nues les chofes connues aufquelles elles fe rapportent, c'est-à-dire › par les fujets dans lesquels on dit qu'elles font, & par les effets que l'on prétend qu'elles produifent. Pour ce qui les regarde ellesmêmes, on ne peut en dire autre chofe, finon que ce font des forces, fans pouvoir dire comment elles font faites. Or les forces des corps ne font pas faites comme les forces de l'efprit.

› par

334. On ne fait ce que c'eft, ni comment eft fait ce que je ne fai quoi, que certains Philofophes (r) reconnoiffent [r] Les Da dans les corps pour les remuer, & qu'ils gouméristes. nomment en latin impetus, c'est-à-dire, impetuofité. Ils nous difent que c'est une application de la force Divine au corps pour le mouvoir. Mais comment se fait cette application? Nous ne concevons ni cette application ni la force Divine par une idée intuitive [9], nous ne connoiffons autre chofe en Dieu, pour remuer les corps, que fon Decret éternel. La force Divine n'eft pas une force créée, ce n'eft point la force du corps même. Donc fi la force du corps ne consiste ni dans fa maffe ni dans fa vitefle, & que toute fa force pour remuer les autres

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corps, foit cette impétuofité, il s'enfuit que les corps n'ont point de force, & que nous avons toûjours raifon de dire qu'il n'y a autre chofe dans les corps mêmes en quoi leurs forces puiffent confifter, que leur maffe & leur viteffe.

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335. Mais quoique la maffe & la vitesse des corps ne puiffent paffer pour les forces de la caufe premiére, parcequ'elles ont befoin d'une caufe étrangère qui les produife, elles font cependant de vrayes forces de caufes fecondes & inftrumentales; & les effets qui fuivent d'elles, font véritablement produits par elles. Cela eft fi vrai qu'il fuffit, dans la Physique, de fuppofer une étendue exiftante, & du mouvement dans cette étendue avec certaines directions, fans fe mettre en peine fi ces chofes font produites par une caufe étrangére, ou fi elles exiftent d'elles-mêmes, pour en déduire les différens effets, que la recherche de l'origine de ces chofes appartient à la Métaphyfique ou à la Théologie naturelle; de même que quoique le mouvement d'un pinceau ne soit qu'une force d'inftrument, parcequ'il faut une caufe pour le produire: fi cependant on fuppofe ce mouvement dans le pinceau avec toutes les directions différentes par lefquelles le tableau eft produit, ce tableau fe trouvera fait, & s'enfuivra véritablement de ce mouvement, foit que l'on fuppofe que le pinceau fe remue par lui-même, ou qu'un Peintre lui donne le mouvement, & il ne faut point s'imaginer qu'à l'occafion du mouvement & des rencontres du

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