foient compofez & fujets au changement, Dieu n'en eft ni moins fimple ni moins immuable; de même qu'un Roi qui auroit réfolu de foutenir une guerre pendant dix ans & de mettre dix Généraux chacun fon année, ne changeroit pas de volonté chaque année, quoique les Généraux fuffent changez. 20. Parcequ'il faut chercher les régles du mouvement dans la nature même du mouvement & non hors de là, fans quoi ce ne feroit plus les régles de la na

ture.

380. J'ai dit (t) confidéré feul, par où il faut entendre que l'on ne doit confidérer que le corps & fon mouvement avec la caufe mouvante qu'il faut néceffairement fuppofer, puifque l'on fuppofe le mouvement: car le corps feul fans caufe mouvante eft en repos, comme on l'a prouvé ci-deffus (u).

381. Ce mot (feul) eft donc ici pour exclure. 1. Tous les empêchemens & causes étrangères hors celle qui produit le mouvement. 2°. Tout ce que l'on pourroit suppofer dans cette caufe mouvante outre ce qu'il faut ponr produire le mouvement & fes fuites néceffaires.

382. Il s'enfuit encore que fi un corps.

en mouvement a été contraint pas des caufes étrangères à décrire une ligne qui ne foit pas droite, ces caufes venant à ceffer il décrira de nouveau une ligne droite, parcequ'il le trouvera feul au fens qui vient d'être expliqué (x).

383. D'où il s'enfuit que le corps en mouvement tend de lui-même à décrire

[+] N. 37

[u] N. 263 jufqu'au 167.

[x] N. 38K

& 253.

une ligne droite, & fait tout ce qu'il peut pour en venir à bout.

384. Je remarque feizièmement que le moindre de tous les changemens qui puiffent arriver dans la direction d'un corps en mouvement, eft de décrire toujours une ⚫ même ligne droite, allant vers un même côté, fans retourner fur fes pas. Cette propofition eft affez claire, car en ce cas le corps ne change point du tout de direction: or il ne peut arriver moins de changement dans la direction du mouvement, que de n'y en arriver point du tout.

385. Par conféquent décrire une ligne droite en allant toujours vers le même côté, elt au mouvement ce que le repos cft au corps. C'eft-à-dire que :

385. Premierement comme le repos est le moindre de tous les changemens de lieu N. 252 qui puiffent arriver à un corps (y), de même décrire une ligne droite en allant toujours vers le même côté, est le moindre changement de direction qui puiffe arriver

[a] N. 384. au mouvement (z)..

[a] N. 263.

[6] Depuis le n. 259, juf qu'au 262.

[] N. 378.

387. Secondement comme le corps étant feul eft en repos (a) & ne reçoit le mouvement que d'une caufe étrangère (b), de même le mouvement étant feul, décrit une ligne droite (c) toujours vers le même côté, & ne change cette direction que par l'action des caufes étrangères.

388. Troifiémement comme les caufes étrangères qui changent un corps de place, c'eft-à-dire qui mettent un corps en mouvement, venant à ceffer, ce corps ceffe de IN 296. changer de place & demeure en repos (d),

de même les caufes étrangères qui faifoient changer de direction au mouvement & qui l'obligeoient de décrire une autre ligne que la droite, venant à ceffer, ce mouvement ceffe de décrire une autre ligne que la droite (e).

389. Quatrièmement comme le corps, qui avoit été mis en mouvement, venant à ceffer d'être mê, demeure au lieu où les caufes mouvantes l'ont laiffé fans retourner à la place où elles l'ont pris (f), de même le mouveinent ceffant de changer de direction garde la dernière où il fe trouve au moment que les caufes de fon changement de direction viennent à ceffer, fans tendre en aucune façon de lui-même à reprendre fa première direction.

390. On voit par là premierément que le mouvement eft de fa nature indifférent à toute forte de direction, comme le corps à toute forte de lieu & à toute forte de figure, c'est-à-dire qu'une direction particulière n'eft pas plus que l'autre une fuite de la nature du mouvement, comme un lieu particulier ou une figure particuliére, n'eft pas plus qu'une autre une suite de la nature du corps.

391. On voit fecondement que le mouvement garde la direction qu'il a une fois fans en changer jamais de lui-même, c'està-dire à moins qu'il ne trouve un obftacle invincible, comme un corps demeure au lieu où il eft & garde la figure qu'il a fans en changer, à moins qu 'une caufe étrangère ne l'y oblige.

392. Par conféquent décrire toujours une

[e] N. 3820

[f] N. 297.

même ligne droite en allant toujours vers un même côté, eft comme le repos du mouvement dans une même direction.

393. Il s'enfuit du n. 390 que le changement de direction n'eft oppofé ni au mouvement ni à sa viteffe, & la direction d'un mouvement ayant été changée à la rencontre d'un obftacle, ni la vitesse ni le mouvement ne doivent être changez précifément en conféquence de ce changement de direction.

394. Par conféquent loifqu'un mouvement a changé de direction à la rencontre d'un obftacle, la vitefle de ce mouvement ne peut être augmentée en vertu de cet obstacle, à moins que cet obstacle ne foit auffi en mouvement, ne continue à fuivre la direction qu'il a fait prendre au mouvement, & à pouffer le corps dont il a changé la direction.

a

395. Je remarque en dix-feptiéme lieu que quand un corps change de direction à la rencontre d'un obftacle, il ne peut fuivre, après cette rencontre, que la direction qu'il a reçûe de l'obstacle, c'est-à-dire la direction qui eft une fuite de la difpofition de l'obftacle par rapport Ice corps. & à fa premiére direction.

à

396. Je remarque dix-huitiémement qu'un corps en mouvement ne doit point changer de direction, tant qu'il ne rencontre point d'obftacle invincible, & qu'un obftacle n'est point invincible tant qu'il eft moins fort que le corps à qui il fert

d'obstacle.

397. Tant qu'un corps ne rencontre

point d'obstacle invincible, il peut continuer fon chemin; tant qu'il peut continuer fon chemin, ce n'eft pas une néceffité qu'il change de direction; tant que ce n'eft pas une néceffité qu'il change de direction, le changement de direction n'est pas une propriété qui fuive neceffairement de la nature ou de l'effence des circonftances où ce corps fe trouve; & par conféquent fi ce corps changeoit de direction, ce changement ne viendroit pas des régles de la nature.

qu'il

398. Je remarque dix-neuviémement peut fe faire ici un parallele entre l'étendue à l'égard du mouvement & de la figure, & le mouvement à l'égard de la direction & de la viteffe. Je tâcherai de comprendre ce parallele en huit articles.

399. Premiérement comme l'étendue eft le fujet du movement & de la figure, de même le mouvement eft le fujet de la direction & de la viteffe.

400. Secondement comme on peut concevoir l'étenduc fans y concevoir aucune figure particulière, ni aucun mouvement, de même on peut concevoir le mouvement fans y concevoir aucun degré de vi- teffe en particulier, ni aucune direction particuliére.

401. Troifiémement comme on ne peut concevoir de figure ni de mouvement fans concevoir l'étendue, de même on ne peut concevoir aucune viteffe ni aucune diretion fans concevoir du mouvement.

402. Quatrièmement comme le mouvement peut, ceffer & une figure particu