Imágenes de páginas
PDF
EPUB

pour rendre plus complete la connoiffance de la Phyfique. Nous allons commencer par le Raifonnement, en propofant d'abord les principes les plus fimples que la raison nous fait voir d'un premier coup d'œil, concernant la nature & la conftruction de ce monde visible; & déduifant de ces principes plufieurs conclufions par des conféquences fi fimples, que la liaison de ces conclufions avec leurs principes, ne fera pas moins claire que les principes mêmes. Nous ne perdrons pas de vûe l'Expérience, nous en rapporterons de tems en tems quelqu'une pour confirmer la verité de ce que nous avancerons; & fi quelquefois l'Expérience paroît s'oppofer, foit à nos principes, foit aux conféquences que nous en déduirons, nous tâcherons de montrer que tout ce que nous dirons s'accorde parfaitement avec ce que l'Expérience nous montre, & que cette oppofition n'eft qu'aparente fans avoir aucune réalité.

pro

Enfuite nous viendrons au détail de toutes les Expériences que l'on a coutume de pofer; & en expliquant la conftruction des Machines dont on fe fert pour les faire, & les événemens qui arrivent, nous n'abandonnerons pas le raisonnement, mais nous tâcherons de démontrer les caufes des effets qui fe produiront, & de faire voir la liaifon de ces effets avec nos principes. Ainfi le Raifonnement, confirmé par l'Expérience, fera le fujet de la premiére Partie de cet Ouvrage; & l'Expérience, éclaircie par le Raifonnement, celui de la feconde.

PREMIERE PARTIE.

LE

RAISONNEMENT

CONFIRME

PAR L'EXPÉRIENCE.

E n'eft pas ici le lieu de faire voir

que

Cla Métaphylique a droit de traiter des Corps auffi bien que des Efprits, & que réciproquement la Phyfique s'étend fur les Efprits auffi bien que fur les Corps: Je referve cette preuve à un autre Ouvrage. J'examinerai feulement ici en abregé la nature ou l'effence du Corps, fa divifibilité, la nature du lieu où font les Corps, celle de leur mouvement & de leur repos en général, fans avoir égard aux effets qui doivent réfulter des différentes circonftances dans lesquelles ce mouvement & ce repos peuvent le trouver, ce qui eft du reffort de la Métaphyfique. J'examinerai enfuite les principes les plus fimples de la

3

[ocr errors]

Phyfique dans les hypothefes les plus fimples du mouvement, & les effets qui doivent en réfulter, de là. j'irai à d'autres hypothefes plus compofées; je tâcherai en confiderant la feule nature ou effence de ccs fuppofitions, de voir les effets qui doivent en résulter, de voir naître de là la Géoftatique, qui eft la fcience de mouvoir ou d'arrêter les Corps folides par le moyen des machines, & l'Hydroftatique qui eft la fcience de l'équilibre des liqueurs. De toutes les regles que j'aurai tâché d'établir, on verra fortir ce monde vifible qui fe for mera & naîtra pour ainfi dire de ces regles comme du fein de fa mere, reconnoiffant Dieu feul pour fon Pere, ou plûtôt pour fon Créateur.

I.

CHAPITRE PREMIER.

C

De la nature du Corps.

Es mots effence & nature font fort ufitez parmi les Philofophes, il faut en entendre l'origine & la fignification, avant d'aller plus loin.

2. Ce mot effence vient du mot Latin effe qui fignific être, & ce nom chez les Philofophes fignifie ce que chaque chofe at précisément. Ainfi tout ce qu'une chofe a & qui n'eft pas précisément cette chofe là même, mais qui eft le moins du monde diftingué d'elle, qui n'eft qu'une de fes proprietez ou un rapport qu'elle a à autre

chofe qu'elle, n'ett point l'effence de cette chofe-là.

3. D'où il s'enfuit que l'effence d'une chofe eft cette chofe là même, & que chaque chofe eft fon effence. Je croi que tous les Philofophes font bien perfuadez avec moi de cette verité : il feroit à fouhaitter qu'ils l'euffent toujours bien préfente à l'efprit, ils éviteroient beaucoup de ver biage inutile & fouvent bien des erreurs. Je traiterai plus au long cette verité, & j'en montrerai les fuites dans un autre Ouvrage.

(a) Natura

4. Le mot nature vient du mot naître, & il fe prend en deux fens différens. Premierement dans un fens actif pour la chofe dont une autre naît ou tire fon origine, c'est-à-dire pour la chofe qui en produit une autre ; (a) c'eft ainfi que nous attribuons plufieurs effets à la nature, & en natuians. ce fens Dieu eft la premiere nature, parceque c'eft lui qui produit tout. Secondement ce mot fe prend en un fens paffif pour la chofe qui naît d'une autre, ou qui eft. produite par une autre. (6) C'eft ainfi que nous difons que Dieu eft l'Auteur de la

nature.

5. L'effence de chaque chofe eft le principe & la fource d'où naiflent & découlent un grand nombre de proprietez qui conviennent à cette chofe-là, c'est-à-dire qu'elle eft la raison pour laquelle ces proprietez lui conviennent. Ainfi clle eft appellée nature de cette chofe, en prenant ce mot en un fens actif.

6. Chaque chofe peut être confidcrée

(b) Natura

nararara.

en deux façons. Premierement en elle même fimplement, fans avoir égard fi elle eft feule, ou fi elle eft accompagnée d'autres chofes, & environnée de causes étran géres. Secondement on peut la confiderer feule ou bien accompagnée de causes étrangéres.

7. Chaque chofe confiderée de la premiere façon a fes proprietez dont elle eft la fource, & qui lui conviennent en tout état & en toute circonitance; mais quand on la confidere de la feconde façon, on en voit naître de nouvelles fuites, ou propriétez, ou effets, qui ne conviennent qu'à l'affemblage de toutes les circonftances où elle fe trouve.

8. Chaque chofe confiderée de la feconde façon, eft appelléc essence ou nature Phy(c) Duas. fique, du mot Grec Phyfis, (e) qui fignifie aufli nature, comme fi on vouloit dire qu'elle eft doublement nature, parcequ'elle eft fource de deux fortes de propriétez,dont les unes lui conviennent en tout état, & les autres ne lui conviennent que lui où on la confidere.

dans ce

9. Cette même chofe confiderée de la premiere façon, fe nomme nature ou ef•fence Métaphyfique, du mot Grec Meta, (d) MT. (d) qui veut dire après ou au-dessus, foit parceque la connoiffance de chaque chofe confiderée de la premiere façon, n'eft venue qu'après la connoiffance de cette même chofe, revêtue de fes circonftances qui ont frapé nos fens, & qui ont donné occafion de penfer à elle & de la confiderer de cette premiere façon, ou bien parceque l'on a

« AnteriorContinuar »