qua pour Meffine où il fut employé à peindre les arcs de POLIDORE. triomphe qui furent dreffés pour le paffage de Charles V. dans cette ville au retour de fon expédition de Tunis. Polidore parmi plufieurs ouvrages qu'il a faits à Meffine fit un portement de croix orné d'une multitude de figures fi bien peintes, qu'il parut bien qu'il étoit capable de repréfenter d'autres fujets que des triomphes, des batailles & des clairs-obfcurs. Les grandes compofitions auroient fait le mérite de ce grand artifte, s'il s'y étoit appliqué. La force du coloris l'auroit difputé au grand caractére des têtes, à la correction des figures, aux grandes pensées, à la beauté du paï, fage & à tout ce qui forme les grands peintres. Quelque confidéré qu'il fût à Meffine, Polidore avoit une envie extrême de retourner à Rome. Une Meffinoife dont il étoit épris combattoit cette idée, enfin il avoit tout furmonté, il avoit retiré fon argent de la banque, lorfque fon valet ébloui par ce métail, l'affaffina dans fon lit en 1543. âgé de quarante-huit ans. Ce malheureux pour déguifer fon action avoit porté fon corps fur la porte de fa maitreffe. La vérité fut découverte & il fut puni rigoureufement. On fit à Polidore des obféques magnifiques, & il fut porté dans la Cathédrale de Meffine. Les deffeins de Polidore font prefque tous lavés au biftre relevés de blanc avec un feul trait de plume qui en arrête les contours; il y en a de lavés à l'encre de la Chine & d'autres au bleu d'Inde. Les uns & les autres doivent caractériser le goût antique; on doit y trouver une fineffe de penfées, une touche fpirituelle, un grand goût de draperies, un style sévére & beaucoup de correction. Ceux de Maturin font dans le même genre, mais moins excellens, toujours arrêtés d'un trait de plume lavés au bif tre & fans blanc. La plume de Maturin eft plus feche & fon contour est moins correct que celui de Polidore. Les principaux ouvrages de Polidore font les Loges de Raphaël, les falles du Vatican où il a peint quantité de frises & d'ornemens. La fontaine du Parnaffe dans le jardin du palais Buffalo à Rome, dans la cour du même palais des facrifices, des armures, des vaiffeaux, des batailles navales avec l'histoire de Niobé en camayeu. A faint Sylveftre à Monte Cavallo les peintures au-deffus de la corniche qui font deux fujets de la vie de la Madeleine avec un païfage admirable. A Naples à fainte Marie delle gracie un faint Pierre au maî- POLIDORE, tre Autel. Plufieurs tableaux à faint Ange in Pefcheria. A Meffine un portement de croix peint à l'huile. A Duffeldorf dans la galerie de l'Electeur Palatin, sept pié. ces en clair-obscur reprefentant une entrée triomphante des Empereurs Romains en bas-reliefs. Le Roy poffède une affemblée des Dieux peinte en détrempe : & l'on voit au palais Royal les trois Graces peintes fur bois, elles font en pied. Les graveurs de Polidore font Chérubin Albert, Saërendam, J. B. de Cavaleriis, Bonafone, Goltius, Sadeler, Marinus, C. Cort, P. Palumbus, J. B. Galeftruzzi & autres: on poffède de ce maître environ cent piéces, Eefj PARMESAN. 'ESPRIT, la légèreté de la main, l'élégance, la belle touche, les graces furent le partage de François Mazzuoli dit le Parmesan parce qu'il étoit né à Parme en 1504. Son pere mourut lorf que François n'étoit encore qu'un enfant & fes oncles qui étoient peintres prirent foin de fon éducation. Une difpofition naturelle le portoit à deffiner de lui-même en apprenant à écrire, à l'âge de feize ans il fit de fon invention plufieurs chofes à frefque, & il peignit à l'huile un baptême de faint Jean placé à Parme dans l'Eglife de l'Annonciade. De fi heureux commencemens ne tenoient rien de l'écolier, mais plûtôt d'un maître très-expérimenté. Le Parmesan vint demeurer avec fon cousin Jérôme Maz zuoli bon peintre, qui dans la fuite devint fon éléve. Ils firent plufieurs ouvrages ensemble; pendant les troubles du PARMESAN. pays ils allérent à Viadana dans les états de Mantouë, où François peignit à détrempe les ftigmates de faint François & le mariage de fainte Catherine. Le calme revenu dans la ville de Parme, François y donna de nouvelles preuves d'une capacité confommée. Enfin l'envie lui prit de voir Rome, & accompagné d'un de fes oncles, il y porta trois tableaux, une Vierge avec l'enfant Jefus, recevant des fruits de la main d'un ange, une tête de vieillard fi terminée, que l'on pouvoit compter les poils de fa barbe, fon portrait êtoit le troifiéme morceau. Il l'avoit fait dans un miroir en obfervant de faire tourner tous les objets qui l'entouroient tels qu'il les avoit vûs, il les peignit fur une planche épaiffe tournée en demiboffe & par une couleur fombre & fuifante qui couvroit le fond du tableau, il imita le transparent d'une glace. Clément VII. à qui il préfenta ces tableaux n'en fut pas moins furpris que toute la Cour. Une circoncifion peinte pour ce Pontife fut regardée comme un chef-d'œuvre. Sur le champ il eut ordre de peindre la falle des Papes dont Jean da Udine avoit déja orné le plafond de peintures & d'ornemens de Stuc. (a) Lo Spirito di Les ouvrages de Raphaël & de Michel-Ange lui donnerent une maniére fi belle, en y joignant quelque chofe de celle du Corrège, qu'elle a été fuivie de tous les peintres. Un auteur (a) Italien rapporte qu'on difoit à Rome que l'efprit de Rafale & diceva Raphaël avoit paffé dans la perfonne du Parmesan. Pendant le fac de Rome en 1527. comme un autre ProtoBen gene, le Parmesan travailloit tranquillement; les foldats qui le trouvérent dans cet exercice en furent furpris, & le laifférent continuer. Il ne lui en couta que quelques deffeins pour un d'entr'eux qui aimoit la peinture. D'autres foldats moins polis furvinrent, le firent prifonnier, & il fut obligé de payer fa rançon. Enfin il partit pour Bologne où on lui donna des tableaux d'Autel à exécuter, & plufieurs de fes deffeins furent gravés en clair-obscur. L'attention avec laquelle il regarda Charles V. pendant qu'il mangeoit lorfqu'il vint à Bologne fe faire couronner par le Pape, lui fit faire de mémoire fon portrait en grand avec une renommée qui le couronne, & un enfant qui fous la figure d'un jeune Hercule lui préfente le globe du monde. Le Pape furpris de cette reffemblance, lui don E e iij poi effer passato nel corpo di Francefco. Vafari parte. 3. P. 239. na un évêque pour l'accompagner chez l'Empereur à qui il PARMESAN. présenta le portrait; ce trait fingulier frappa extrêmement Charles V. Le Parmesan de retour à Parme fut choisi pour peindre à frefque la voûte & la grande arcade de la Madona della steccata. C'étoit un ouvrage confidérable & qui devoit l'occuper pendant plufieurs années. Souvent pour fe délaffer, il se faifoit un plaifir de graver à l'eau forte de petits morceaux. Il avoit même dans la maison un graveur Allemand qui lui vola pendant qu'il dormoit toutes les planches & fes deffeins. Le déplaifir qu'il en eut, fut diminué par le recouvrement des planches. Le Parmesan a fort bien fait le portrait & le païfage, fes (a) Voria chiamar figures font légères & gracieuses, fes têtes font (a) charfio de le gracie quel mantes, fes attitudes bien contrastées ont du mouvement, fes Parmefanin. Svelto e legiadro contours font flexibles & raviffans. La legéreté de fes drapePiu d'un Balarin. ries ne fe peut imiter, il avoit un art particulier de faire valoir Agile (fe puol di- les belles carnations de fes Vierges en les oppofant à des voiles re) del vento al par. Bofchini Rime. jaunes ou verds dont il couvroit leurs bras, les enfans qu'il a parfaitement bien peints, ont un air fi vif qu'ils paroissent Ipirituels. P. 344. Le Parmesan fut malheureux toute fa vie, & peu récompen fé de fes travaux. Pour comble d'infortune, la Chimie fut caufe de fa ruine; il s'y livra avec tant de paffion, qu'il quitta la peinture & abondonna la voûte della feccata. Les confreres de cette Eglife qui lui avoient avancé beaucoup d'argent, le poursuivirent en justice; il s'enfuit à Cazal maggiore où il fẹ remit de nouveau à fouffler; la vapeur du charbon, & le mauvais état de ses affaires le rendirent fort mélancolique. Le peu de foin qu'il prenoit de ses cheveux & de sa barbe en avoit fait une figure de fauvage. Enfin la fiévre l'emporta dans cet état miférable en 1540. à l'âge de trente-fix ans ; lui-même ordon na fa fépulture à un mille de la ville dans l'Eglife della fontana des peres Servites. Ses éléves font Jérôme Mazzoli fon coufin & Vincent Cac tianemici gentil-homme Bolonnois. Ses deffeins font encore plus recherchés que fes tableaux. Le beau maniment de la plume y égale l'efprit, la touche & la légéreté. Ses figures font en mouvement, leur contour eft admirable & il femble que le vent agite fes draperies. Parmi |