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(a) J'ai con

nu particuliére

premiers prin

deffeins.

(b) Abrégé

Mr. de (a) Piles, auteur de ces inftructions, avoit ment cet excel- regardé comme une chose (b) impossible de donlent auteur, & ner des régles certaines fur cette matiere; il fouje lui dois les haitoit que le peu qu'il en a dit, pût encourager cipes de la con- quelque perfonne à l'augmenter dans la suite : noiffance des nous nous fommes propofés de fuivre fon plan. Les deffeins infiniment fuperieurs aux eftampes, de la vie des tiennent un jufte milieu entr'elles & les tableaux ; font les premieres idées d'un peintre, le premier feu de fon imagination, fon ftyle, fon esprit, sa maniere de penfer : ils font les premiers originaux qui fervent fouvent aux éléves du maître, à peindre les tableaux qui n'en font que les copies. Les desseins prouvent encore la fécondité, la vivacité du génie de l'artiste, la noblesse, l'élevation de fes fentimens, & la facilité avec laquelle il les a exprimés.

Peintres, pag.

65. Ed. 1699.

ce

Un peintre en peignant un tableau, fe corrige, & réprime la fougue de fon génie; en faisant un def. fein, il jette le premier feu de fa pensée, il s'abandonne à lui-même, il fe montre tel qu'il eft.

Les differentes manieres de deffiner se réduisent à trois; fçavoir, à la plume, au crayon, & au lavis.

La plume fe manie légérement, & est soûtenuë de hachures du côté des ombres; fouvent on ne fait à la plume que le trait des contours, & on lave du côté des ombres.

Le crayon eft plus ufité & se peut hacher du côté des ombres. On fe fert de pierre rouge appellée fanguine, de pierre noire, de mine de plomb, & d'une craie blanche pour piquer les plus vives lumiéres ; cette craie fujette à s'effacer oblige souvent de la délayer avec de la gomme, & on l'employe avec le pinceau; alors on dit du blanc de craie ou du blanc au pinceau.

Le

Le lavis fe fait avec un pinceau, que l'on trempe dans de la couleur de fuie de cheminée, appellée biftre, de la fanguine, du bleu d'Inde ou de l'encre de la Chine délayée, & que l'on applique du côté des ombres, en l'adouciffant fur les parties

éclairées.

Il y a des deffeins qui participent de ces trois manieres, d'autres que l'on dit faits aux trois crayons.

On appelle un dessein eftompé celui qui eft fait avec un crayon mis en poudre, qu'on applique du côté des ombres avec de petits rouleaux de papier ou de cuir, fans qu'on y découvre aucunes lignes.

Tous les deffeins fe divifent en cinq efpéces ; il y a des pensées, des deffeins arrêtés, des études, des Académies, & des cartons.

(a) Terme

Les pensées font les premieres idées que le peintre jette fur le papier pour l'exécution de l'ouvrage qu'il fe propofe; on les nomme auffi Efquiffes, ou Croquis, parce que la main n'a fait que mettre en maffe, & pour ainfi dire, que croquer les figures, les grouppes, les ordonnances & les autres parties qui les compofent. Ces deffeins (a) heurtés & faits avec beaucoup de viteffe, ne font fouvent de peinture extrêmement corrects & peuvent manquer pour la pour fignifier perspective, & les autres parties de l'art; mais ce n'eft touche ne font point des défauts dans une efquiffe, dont tout le but eft de représenter une penfée exécutée avec beaucoup d'efprit, ou bien des figures détachées & imparfaites qui doivent entrer dans quelque compofition dont elles font partie.

pas

Les deffeins finis font les mêmes pensées plus digérées & plus arrêtées, que l'on appelle par

C

un deffein qui

de hardis & peu

que coup prononcés.

excellence des deffeins rendus, finis, arrêtés, terminés, capitaux: ils donnent une jufte idée de l'ou. vrage, & c'eft ordinairement fuivant ces morceaux, qui font les derniers faits, que l'on en détermine l'exécution.

Les Etudes font des parties de figures deffinées d'après nature, telles que des têtes, des mains, des pieds, des bras, quelquefois même des figu res entiéres, lefquelles entrent dans la composition totale d'un tableau; les draperies, les animaux, les arbres, les plantes, les fleurs, les fruits & les païfages font auffi des études qui y fervent infiniment.

On donne le nom d'académies à des figures faites d'après nature, dans les attitudes convenables à la compofition d'un tableau, pour en avoir exactement le nu & les contours; on drappe enfuite ces figures, de maniere à careffer toujours ce nu & à le faire deviner. Rien ne fait mieux connoître la correction d'un maître que ces fortes de deffeins; ils prouvent en même temps sa capacité dans l'anatomie.

Les cartons font de grands deffeins faits fur du papier gris de la même grandeur que l'ouvrage pour lefquels ils font deftinés, & on les calque une pointe fur l'enduit frais d'un plafond, pour le peindre ensuite à fresque; l'on fait auffi des cartons pour des tapifferies.

avec

Les deffeins des grands maîtres étant tout efprit, forment une curiofité des plus piquantes; ils font la meilleure instruction pour un amateur, c'est une source féconde, où il peut puifer toutes les lumiéres qui lui font néceffaires; il conversera, pour ainsi

dire, il s'inftruira avec ces grands hommes, en vifitant un recueil de leurs deffeins, il se familiarifera avec eux, leurs différentes manieres fe dévoileront à fes regards. Si même ces deffeins (a) font rangés chronologiquement & par écoles, ils lui rap- lection des defpelleront de fuite l'histoire & la vie de ces fameux

artistes.

(a) L'auteur

a fait une col

feins des grands

maîtres de tous les pays, qui

peut paffer pour

une des meilleures de l'Europe; elle est

En général les desseins font moins difficiles à connoître les tableaux; le coloris, la perfpective, que le clair-obfcur s'y trouvent rarement. Une intelligence des régles du deffein, une pratique de di- rangée chronologiquement ftinguer la touche de chaque maître, fuffit à un homme qui aime la peinture; le goût naturel, l'in- compofée d'enclination jointe à quelque expérience, feront le viron neuf mil

reste.

par écoles, &

le deffeins originaux & choi

morceaux finis,

cademies.

(b) L'Abbé Dubos, p. 384. Tom. 2.

Qu'on ne dise pas que la connoiffance des ta- fis, mêlés de bleaux & des deffeins eft très-incertaine. Un mo- d'études, de derne (b) fe trompe quand il avance que l'art de pensées, & d'adeviner l'auteur d'un tableau en reconnoiffant la main du maître, eft le plus fautif de tous les arts. Il rapporte à ce fujer une vieille hiftoire de Jules Romain, qui prit pour l'original de Raphaël une copie qu'a voit fait André del Sarto, du portrait de Leon X. dont Jules Romain lui-même avoit peint les ha bits.

Si cet auteur avoit eu quelque pratique de la peinture, ou un peu plus de connoiffance de cet art, il auroit fçu qu'un coup de pinceau, qu'une feule touche d'arbres dans un tableau découvre

fon

auteur, & que le copiste ne met toujours que trop du fien pour fe décéler. Les deffeins font de même, la main fe laffe de copier, elle ne peut per

févérer long-temps dans la gêne; elle fe permet des traits qui lui font plus familiers, & ce font ces der niers traits qui trahiffent l'imitateur, & font découvrir la fupercherie.

Enfin la maniere de deffiner d'un peintre fe diftingue comme le caractére de l'écriture, & mieux que le style d'un auteur. On fçait que les gens de lettres qui ont le tact fin & le goût délicat s'y trompent rarement.

Si les peintres n'avoient point de manieres, il seroit impossible de les distinguer les uns des autres; les manieres fe forment de la différente façon dont l'efprit humain eft capable de concevoir une même chofe, qui eft l'imitation de la nature. Les plus habiles peintres ont leur maniere, fans néanmoins être manierés. La maniére s'entend de la façon d'opérer, c'est le faire d'un peintre, c'est son style; au lieu que manieré veut dire ce qui fort de la nature & du vrai, ce qui ne tient que de la pratique, & qui eft un défaut, ainfi avoir une maniere & être manieré font deux choses très-différentes.

On ne devroit imiter que la nature & l'antique, fans s'attacher à la maniere de perfonne; les grands génies s'en font une qu'ils empruntent de tous côtés & qui ne reffemble à rien; ceux dont le génie est moins élevé, choififfent parmi les maîtres celui qui eft le plus de leur goût, ils le copient, ils le suivent pas à pas, sans jamais fortir de sa maniére, ni l'enrichir. Au refte la nature n'a point de maniere, elle n'a point de touche, tout y paroît d'un fondu & d'un accord parfait.

Il ne faut donc imiter aucun peintre parti

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