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nat. lib. 35.

1694.

ræ nobilis, fol.

Nous ne pouvons donc juger des anciennes peintures des Grecs, que par les excellentes fculptures du même fiècle qui font parvenuës jusqu'à nous; elles nous font préfumer que la peinture ne leur étoit pas inferieure, puifqu'au rapport de tous les anciens écrivains, elle trompoit également les hommes & les animaux. Ces anciens connoisseurs qu'on nous dépeint fi difficiles fur l'expreffion & fur l'excellence des statuës, l'auroient-ils été moins fur le coloris, fur le deffein, & fur la compofition poë tique des Tableaux?

On n'a point eu deffein dans cet ouvrage de parler des peintres Grecs, ni même des anciens qui (a) Plin. bif. ont précedé Raphaël. Plusieurs (4) auteurs ont déJunius de pic- ja couru cette carriere; ja couru cette carriere; ainfi l'on ne s'eft attaché tura veterum, qu'aux peintres les plus connus depuis cet homme fol. Roterdami illustre; & dans les bornes étroites que l'on s'est Sandrat. part. prefcrites pour chaque vie, on a tâché de ne rien 2. Acad. pictu- omettre de ce qu'il étoit effentiel de fçavoir. On Felibien.entr. trouvera le vrai nom d'un maître, le lieu de fa fur les peintres, naissance, de qui il eft difciple, les peintres qu'il Carlo-Dati, a fuivis, fes talens particuliers, les éleves qu'il a des peintres formés, de courtes réflexions fur fon caractere, fes De Piles dans principaux ouvrages, les défauts qu'on lui reprol'abregé de la che, enfin le temps de fa mort. En faut-il davanvie des peintres parles dentex tage dans un abregé ? Quelques anecdotes en petit peintres Grecs. nombre pourront répandre dans cet ouvrage l'utile & l'amufant.

Tom. I.

Grecs.

fix

Quelques perfonnes auroient fouhaité, qu'au lieu d'écrire l'éloge hiftorique de chaque peintre, on fe fût borné à de fimples réflexions fur leurs ouvrages: mais on auroit cru fervir mal le public en

fubftituant à des faits certains & intéreffans, les idées capricieuses que chacun peut se former sur fe former fur (4) Vasari n'a

cette matiere.

prefque parlé que

cans Ridolfi

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Si l'on vouloit écrire la vie des peintres avec au- des peintres Toftant de prolixité & de partialité que l'ont fait juf des Venitiens, qu'ici la plûpart des auteurs, ce feroit fatiguer de Soprani des Génouveau le public d'une lecture peu intéreffante.

nois Vidriani des Modenois,

Bolonois, Ba.

Les (a) Italiens trop prévenus en faveur de leur Malvazia des pays, ont outré les louanges qu'ils ont données à glioni & Baldileurs peintres ; les exagerations de Vafari, & les di- nuci ont parlé en géneral de digreffions de Malvazia font connues de tout le mon- vers peintres. de. Bellori (b) même, tout Italien qu'il eft, fe plaint (b) Giorgio de la longueur du premier, & du peu de difcerne- Vafari per hament de Baglioni, de Ridolfi, & des autres auteurs to è con eccefde fon pays, qui ont parlé fans choix de tous les five lodi inalpeintres d'Italie.

vere accumula

zato i Fiorentini e Toscani,

riofità de' Fo

ricerche, con

se humili, con

le più degne.

Les Allemans, les Flamans, & les Hollan- Et plus bas, afdois, ont auffi écrit fur la peinture: Charles Van faticano la cumander, poëte & peintre, à fait en vers Flamans reftiericon lunla vie des anciens peintres Italiens & Flamans; ghe e inutile Corneille de Bie, qui a travaillé avec lui, a donné fondendo le coen vers Flamans la vie des peintres de fon pays; Sandrat, dans son academie de peinture, a parlé Bellori. prologo. des peintres de toutes les Nations; il a écrit en Rome, 1672. Allemand, & enfuite en Latin. Houbraken pein- ti lauda etiantre Hollandois a compofé en fa langue la vie des dio i minimi peintres Hollandois, & M. Weyermans, autre écri- quanto i più fuvain Hollandois, vient de nous donner plufieurs part. 4. p. 249. volumes fur la même matiere.

Quelques-uns de nos (c) François, à l'exemple des Italiens, ont cru qu'en faifant de gros volumes remplis de dialogues & de digreffions, ils s'acque.

Vafari che tut

blimi, Malvaz.

(c) Felibien,

reroient plus de réputation, fouvent ils se font contentés de nommer les artistes fans défigner le lieu de leur naissance, leur mérite particulier, les défauts qu'on remarque dans leurs ouvrages, & les villes qui poffedent leurs meilleurs tableaux; auffi peu attentifs à faire un bon choix de tous les peintres, qui ont vécu jufqu'à prefent, ils ont confondu les fameux avec les médiocres. Quel dégoût pour un lecteur qui ne doit s'attacher qu'à la connoiffance des peintres les plus dignes de fes recherches! N'eft-il pas inutile & même déraisonnable de parler d'un peintre médiocre dont on ne voit ni tableaux ni deffeins?

La partialité de la plupart des auteurs n'est pas moins condamnable; Vafari n'a vanté que les peintres Toscans, Malvazia, que les Bolonois, Baglioni jaloux du merite du Guide, de l'Albane & de Lanfranc, n'a pas feulement daigné nommer ces grands hommes. Que dirons-nous de la paffion d'un de nos (a) De Piles (a) modernes pour les ouvrages de Rubens ? Elle qui eft un de nos lui a fait oublier d'habiles peintres François qui teurs, parle très- meritoient affurément des éloges.

meilleurs au

Pouffin & de le

même

ment oublié ce

premiere édition de fon Livre en 1699.

foiblement du Il fera difficile de pénétrer quel eft le peintre & Sueur; il avoit le pays le plus cheri de l'auteur de cet ouvrage; on totale le trouvera toujours (b) impartial; ami du vrai & dernier dans la du beau il tâche de le faifir par-tout où il le trouve, fans fe mettre en peine foit du nom, soit du pays de l'artifte. Toutes les nations, depuis qu'il s'eft attaché aux arts, lui ont toujours paru égales; (b) Tros Tyriufque mihi un Flamand, un François dans certaines parties nullo difcrimi- de la peinture l'emportera fouvent fur un Italien. Virg. En, l. 1. Ceux qui fe diftinguent dans les fciences & dans les arts, font, pour ainfi dire, de la même nation,

ne agetur.

ข. 57 8.

de

mie de peinture.

de la même famille, c'eft celle des hommes illuftres. Apprenons donc à rendre aux excellens ouvrages de tout pays, la juftice qui leur est dûë; accordons à nos compatriotes, lorfqu'ils le meritent, les éloges que nous prodiguons fi facilement aux étrangers. On eft fort éloigné du fentiment de quelques auteurs qui n'estimant que les peintres d'histoire, regardent comme fort inferieurs ceux qui peignent (a) le portrait, le païfage, les batailles, les mari- (4) On les apnes, les animaux, les fruits, les fleurs, les noces pelle à l'Acadede village, les tabagies & les cuisines: on prétend des peintres à au contraire qu'un peintre qui a parfaitement imité talent. la nature, n'eût-il peint qu'une vache, ou comme le peintre Grec Zeuxis, qu'une grappe de raifin, eft auffi parfait dans fon genre que Raphaël l'eft dans le fien. Chacun a tâché d'exceller dans la partie vers laquelle le génie, une infpiration, une inclination naturelle l'a porté. L'Hiftoire, il est vrai, eft le plus noble objet de la peinture, le plus inftruatif, & celui qui demande le plus de connoiffances; le païfage, les animaux, les fruits & les fleurs n'en font que l'accessoire, ils ne fervent le plus fouvent qu'à orner les fujets d'histoire; tout enfin consiste dans l'imitation de la belle nature, c'est l'unique point de vue où l'on doive aspirer.

On ne distinguera dans cet abregé que trois for tes d'écoles, celle d'Italie, celle de Flandre, & l'école Françoise, tout fe rapporte à ces trois écoles pour le goût & pour les manieres.

L'école d'Italie fe partagera en fix parties ou pays, & fans dire l'école Romaine, l'école Florentine, l'école Vénitienne, la Lombarde, la Napolitaine, & la Génoise, on dira plus fimplement les peintres

b

Romains, les Florentins, les Vénitiens, & les au tres renfermés dans une même école. Le même goût fe fait fentir dans tous les ouvrages des Italiens, ils ne fe font diftingués que par leur differente maniere de peindre. Raphaël fera le chef des peintres Romains; Leonard de Vinci & MichelAnge le feront des Florentins`, en laissant Dominique Guirlandai, & Pietre Perugin, qui n'ont d'autre mérite que d'avoir été les maîtres de Raphaël & de Michel-Ange. Les Lombards auront le Corrége à leur tête, les Vénitiens le Giorgion & le Titien, fans qu'il foit fait mention de Cimabué, de Giotto, des Lippi, des Bellins, de Simon Memmi, André Manteigne, Pietre Cofimo, & autres. Les Espagnols en petit nombre feront mis parmi les Napolitains, & les Génois reconnoîtront pour Lucas Cangiage.

chef

L'école de Flandre renfermera quatre parties ol pays; les Allemans, dont Albert-Durer & Holbein feront les chefs; les Hollandois auront Lucas de Leiden; les Flamans Jean Stradan ; & les Anglois Guillaume Dobfon. Tous ces peintres ont eu en géneral la même maniere, qu'on appelle ordinairement le goût Flamand.

On ne fera aucune mention dans l'école Françoise, de Quenel, de Caron, de Nocroi, de Dubois, Janet, Bunel, Dubreuil, Bobrun, Dorigny, du Moutier, & Vignon, pour commencer par Jean Cou. fin, Freminet, & Vouët, qui certainement ont les premiers établi en France le bon goût de la peinture.

La Chronologie dans chaque école est observée exactement, fuivant la naiffance des peintres ; & fans avoir égard à leur maître, on les a rendu

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