Imágenes de páginas
PDF
EPUB

verfe

[ocr errors]

anéantit toutes nos forces: Pour juger du préfent, vous n'avez qu'à ouvrir les yeux. Mais que nos pères ayent bien autrement penfé, c'eft ce que je prouve par l'infcription qu'ils gravèrent fur une colonne de bronze, pofée dans notre citadelle, pour faire paffer jufques à nous une leçon fi néceffaire. Je dis, ATHÉNIENS, jufques à nous : car ils n'en avoient pas befoin, eux, pour apprendre leur devoir. Voici cette infcription Qu'Arthmius de Zélie, fils de Pythonax, foit tenu pour infâme, & pour ennemi des Athéniens & de leurs alliés, lui & les fiens. On ajoûte pour quelle raifon Parce qu'il a fait paffer de l'or des Médes dans le Péloponnèfe. On ne dit pas, dans Athènes. Je cite mot

pour mot.

Rentrez donc, au nom de Jupiter & de tous les Dieux, rentrez en vous-mêmes. Voyez avec quelle fageffe, avec quelle dignité vos pères ont penfé. Un efclave du Roi de Perfe, tel que cet Arthmius qui étoit né à Zélie ville d'Afie, ils le déclarent ennemi des Athéniens, & de leurs alliés, ils le notent d'infamie lui & fa race, pour avoir apporté de l'or, par l'ordre de fon maître,

non dans Athènes, mais dans le Pélo ponnèfe.

Qu'importoit à un Zélitain, direz-vous, d'être flêtri dans Athènes ? Auffi n'étoitce pas une fimple fletriffure: car, fuivant nos Lois, c'étoit le juger coupa ble de mort, & mettre (4) fa tête à prix.

Vos pères, par conféquent, fe croyoient dans l'obligation de veiller au falut public. Autrement ils ne fe fuffent, ni em

barraffés que la corruption fe gliffât dans le Péloponnèfe; ni portés à punir les féducteurs, & à graver leur infamie fur le bronze. Par-là ils faifoient que les Grecs imprimoient de la terreur aux Barbares, & non les Barbares aux Grecs. Aujourd'hui c'eft le contraire, parce que vous avez dégénéré. Vous favez en quoi, & comment. Mais faut-il que nos reproches tombent fur vous feuls? Tous les autres Grecs ne font pas moins condamnables que vous.

Je conclus que dans la conjoncture présente vous avez befoin, & d'agir vivement, & d'être bien confeillés. Vous dirai-je mon avis? Me l'ordonnez-vous?

(4) Dans le Texte on cite le commencement de deux lois d'Athènes fur ce fujet.

Ne vous en offenserez-vous point? Prenez (5) ce Mémoire, & lifez.

[Ici Démosthène fait lire fon Mémoire, & enfuite il reprend la parole. ]

Pour diffiper vos alarmes, voici ce qu'on vous infinue: Que les forces de Philippe n'égalent pas encore celles des Lacédémoniens d'autrefois, maîtres de la terre & de la mer, alliés du Roi de Perse, tout-puiffants; & qu'Athènes cependant, loin de fuccomber, arrêta leurs progrès.

::

Or je prétends, moi, qu'il n'y a rien à conclure du paffé au préfent, & que toutes chofes ont bien changé, mais principalement la manière de faire la guerre. Autrefois, à ce que j'entends dire, la campagne duroit quatre ou cinq mois feulement & dès que la faifon devenoit fâcheufe, content d'avoir fouragé le pays ennemi, on licencioit l'armée, & chacun retournoit chez foi. Telle étoit l'innocence, tels étoient les bons procé dés de ce temps-là, que rien ne fe faifoit avec de l'argent. On y alloit de bonne foi, & à force ouverte. Aujour

(5) Ces paroles s'adreffent à un Officier fubalterne, Feauμaler's, qui étoit ce que nous appellerions aujourd'hui un Greffier.

[ocr errors]

d'hui plus de batailles, plus de combats. Tout n'eft que trahifon. Philippe, vous le favez, ne fe chargeant point de lourdes phalanges, mais marchant à la tête d'un camp volant, compofé de Cavalerie légère, & d'étrangers habiles à tirer de l'arc, tombe où il fait que la difcorde règne il trouve une ville agitée, & dont les habitants retenus par leurs défiances réciproques, n'ofent fortir pour le combattre il fait approcher fes batteries, & il affiège. Je n'ajoute pas que toutes les faifons, été, hiver, lui font égales. Vous le favez. Prenez donc vos mefures, & prenez-les de loin pour empêcher qu'il ne fonde fur l'Attique. Vous vous perdriez fans reffource, fi vous comptiez avec lui fur cette fimplicité de nos guerres contre Lacédémone. Occupez-le fi-bien chez lui, qu'il ne puiffe en fortir. Heureusement vous avez pour cela toute forte de facilités, & fon pays eft fitué de manière qu'il vous offre, prefque de toutes parts, cent & cent moyens de le piller, de le défoler. Voilà ce qu'il faut : & ne point nous expofer fur notre terrein à une bataille rangée, où l'expérience lui donneroit trop d'avantage fur nous.

Mais en vain lui ferez-vous la guerre, fi vous ne la faites aux Orateurs qu'il tient ici à fes gages ; & vous ne détruirez pas l'ennemi qui eft au dehors, fi vous ne commencez par détruire ceux qui font au dedans. Vous ne le pouvez. cependant, ni ne le voulez. O Dieux ! eft-ce aveuglement ? eft-ce folie ? Pour moi, fouvent je fuis tenté de croire que c'eft l'ouvrage de quelque Démon, qui veut notre perte. Quoi qu'il en foit, nous voyons que par malignité, par envie, par goût pour la fatire, & que faisje par quel autre motif, vous commandez à des mercenaires, dont quelquesuns fe reconnoîtroient eux-mêmes pour tels, de prendre ici la parole ; & quand ils ont déchiré quelqu'un, vous en riez. Mais quelque grand que foit ce défordre j'en fais encore un plus grand : & c'est qu'il y a moins de rifque à courir avec vous pour ces gens-là, que pour l'Orateur le mieux intentionné. Or apprenez ce qu'il en coûte de leur prêter l'oreille. Je ne rapporterai que des faits connus.

Olynthe étoit divifée. Quelques-uns de fes Magiftrats, foumis & vendus à Philippe d'autres, qui penfoient dignement, ennemis de la fervitude. Au

« AnteriorContinuar »