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DU R. P. DE JOUVANCY,

Sur la Traduction de la premiere Philippique par M. DE TOURREIL.

Page 4. ligne 11. Edition de Paris, 1691. Par de fages confeils, fur de femblables conjonctures.] Il femble que ces Anciens, dont il eft parlé en cet endroit, duffent parler fur quelque autre affaire pareille à celle dont il s'agit. Ce n'eft pas la penfée de Démosthène : comme on peut le voir dans l'original. Pourquoi ne pas dire ce que l'Auteur & la matiere vouloient qui fût dit?

Pag. 4. 1. 15. Loin d'ici ces ames foibles. Į Cela n'a pas l'air d'une propofition. Il faut toujours que la propofition foit exprimée d'une maniere claire, fimple, & naturelle : comme elle l'eft ici dans le Grec.

P. 4. 1. 17. L'avenir au contraire vous promet une longue fuite de profpérités garanties, par qui? par vos difgrâces paffées. Les difgrâces paffées ne peuvent pas garantir une longue fuite de profpérités, ni tirer infailliblement les Athéniens de leur léthargie. Le tour de Démofthène est bien plus fin, & cette figure toute crue, comme elle eft dans le françois, n'a pas l'agrément, ni le fond de vérité, qu'elle doit avoit.

P. 4. 1. 24. J'en accuferois le defin.] Le
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texte Grec ne parle point du deftin. Auffi le deftin n'a-t-il que faire ici.

P. 5. 1. 26. Pourquoi, réduit alors, &c.] C'est une raifon différente de la premiere, & il falloit par conféquent la diftinguer. Il y a dans le Grec des tranfitions fort délicates. Le devoir du Traducteur eft de les faire fentir à propos.

P. 6. 1. 4. Il n'auroit jamais entrepris de les conquérir (nos places) & fa crainte eût mieux pourvu que nous à leur fûreté. ] Eft-ce donc là ce qui s'appelle traduire ? Cette page françoife eft obfcure d'un bout à l'autre, & le Traducteur paroît n'avoir pas compris la raifon de Démosthène. On peut la voir dans l'abrégé que j'ai mis à la tête de la Traduc

tion latine..

P. 7. 1. 11. Trève à la prévention qui le déifie, & qui le fixe dans un rang d'où il fe joue de nos deffeins. ] Il faut relire plus d'une fois cette phrafe, pour la bien concevoir. Ce n'eft pas là certainement, ni l'efprit de Démosthène, ni fon style. Ceux qui l'entendent, peuvent en juger.

P. 8. 1. 7. Si l'on en croit vos mouvements votre ame s'aguerrit contre l'infamie.] Cette phrafe s'aguerrit. contre l'infamie, déplairoit fort à Démosthène, s'il pouvoit entendre comment on le fait parler. Outre cela le terme de mouvements ne fe met ordinairement tout feul, fur-tout au pluriel, qu'en matiere de guerre, & ainfi la métaphore ne convenoit pas ici.

P. 8. l. 14. Un homme de Macédoine affervit les Athéniens. ] De fort bons Auteurs ont appelé Philippe vir Macedo: mais eft ce bien

traduire que de rendre mot à mot, un homme de Macédoine ? n'est-ce pas comme fi l'on' difoit pour marquer que le Roi dispose du fort de tous les Princes de l'Europe, un homme de France fait la loi à toute l'Europe?

P. 9. 1. 2. Les diffenfions d'un interregne tumultueux mettront à votre difpofition la couronne de Macédoine, fi elles vous retrouvent maîtres des places, &c.] Affurément ce n'eft pas là le fens de cette phrafe, & ce ne peut l'être. Je crois l'avoir rendu affez fidélement.

P. 9. 1. 7. La conjoncture vous eût-elle ouvert les portes de la Macédoine. Il est rare de perfonnifier ce mot de conjoncture. On diroit bien ; la fortune, l'occafion ou, quelque heureufe conjoncture, &c. ouvre les portes d'une ville; mais non pas fimplement, la conjoncture.

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P. 9. 1. 11. Je défavoue ce foupçon à la vue de la noble ardeur qui vous anime. ] Ni ceci, ni le refte de la page n'eft traduit fur le Grec : comme il est évident par la comparaison que l'on peut en faire. Démosthène met ici une transition bien marquée, qui fait voir clairement que c'eft la feconde partie de fon difcours. Voyez l'Analyfe que j'en ai faite.

P. 10. I. 10. Que votre contenance lui annonce votre retour à vous-même. On ne dit pas, ce me femble, retourner à foi, pour dire, rentrer en foi-même, prendre des réfolutions plus vigoureuses: & quand on le diroit, je trouve que le fubftantif, retour à foi, a quelque chofe de dur. Mais enfin la contenance peut-elle annoncer ce retour? quelle maniere de parler!

P. 11. 1. 9. Régler le nombre de vos Troupes.] Le Grec explique ce détail fort au long & avec un air d'autorité, & tout ensemble d'exactitude, qui aide à faciliter le projet que l'Orateur propofe, & à engager les Auditeurs à l'exécution. Le traducteur paffe légèrement fur tout cela ne prenant du texte que ce qu'il lui plaît, & abandonnant tout le refte. C'est affez fon ordinaire.

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P. 12. 1. 17. Je mêle le citoyen avec l'étranger fur la foi de nos peres. ] Il ne s'agit point ici de parole & de foi, mais il s'agit d'exemples & d'actions.

P. 13. 1. 2. Leur Chef marche à leur fuite justement dégradé par l'impuissance de payer la folde. Démosthène est toujours grand, même lorfqu'il s'abaiffe au détail & aux plus petites particularités comme on peut le voir dans cet endroit, qu'il releve par des fentiments & par des figures inférées à propos, mais qui font omifes dans le françois. Qu'est-ce que, dégradé par l'impuiffance de payer la folde ? Démosthène n'eft point guindé, ni outré, comme le Traducteur le fait voir fouvent.

P. 14. 1. 2. N'auriez-vous point confulté vos fculpteurs, &c.] Tout cet endroit n'est point affez naturel. Pourquoi confulter ces Sculpteurs.? en quoi cette décoration imite-t-elle leurs ouvrages? Que veut dire, fe fignaler au milieu des facrificateurs ? s'expofer pour le Spectacle? Je ne fais fi ce mêlange & cette tranfpofition de métaphores fait tout l'effet que l'Auteur prétend. Démosthène affurément en eft fort innocent il n'y a rien de plus fimple & de plus naïf que les termes dont il se

Tert. Pourquoi cette liberté de lui donner plus d'efprit qu'il n'en veut avoir ?

P. 15. I. 19. J'attends de votre décifion d'autres fleches & d'autres dards, que vos lettres & vos décrets. ] N'eft-il pas bien plus naturel de dire avec notre Orateur, qu'il faut faire la guerre, à Philippe par de véritables effets, & non plus par des arrêts & par des lettres? On diroit que le Traducteur auroit envie d'être le Mathon de Martial: Omnia vis belle, Matho, dicere, ou le Triffottin de Moliere, de l'efprit par-tout!

P. 16. 1. 1. Une place d'armes.] Elle ne fe trouve point dans le Grec. C'est une invention du Traducteur, & un préfent qu'il fait à Démosthène, qui s'en pafferoit volontiers.

P. 16. 1. 4. Il gourmande les faifons. ] Je ne fais comment appeler cette expreffion. Rien n'en approche dans l'Original, dont la grandeur & la majefté confifte dans les pensées, & non pas dans les mots.

P. 16. 1. 21. Je le répete.] Démosthène ne l'a point encore dit. Le Traducteur a cru apparemment que ce tour étoit capable de perfuader plus vivement.

P. 17. 1. 3. L'objet importun de vos continuelles de vos infructueufes délibérations. } Quel eft-il cet objet? Il y a dans le Grec, deux ou trois figures fort belles, qui ne paroiffent point dans le François. Cependant il faut qu'en traduifant un Auteur, on se serve, dit Cicéron, fententiis iifdem, & earum formis, tamquam figuris.

P. 17. 1. 18. Tragiques événements.] A force de vouloir être pathétique, on eft froid &

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