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peine de périr pour l'éternité, comme ces anciens Juifs prévaricateurs ; & quiconque ne fera pas devenu faint pendant la vie, fera rejetté de Jefus-Chrift en fon dernier avénement. En un mot, il n'y a point de milieu entre un faint & un réprouvé ; quiconque n'eft pas l'un, fera l'autre. Au refte, il ne s'agit point ici d'être un Saint à miracles, comme on dit, un de ces Saints du premier ordre, dont le nom est inscrit dans les faftes de l'Eglife, & la fête marquee dans les calendriers. Il eft queftion de vivre dans l'observation fidelle des Commandemens de Dieu, dans la pratique des maximes Evangéliques; de mener une vie exempte non pas de tout péché, même véniel, mais de tout ce qu'on appelle crime, péché mortel; péché qui fait perdre la vie de la grace; une vie qui ne foit pas une alternative de chûte & de pénitence, de péché & de confeffion, de violement de la Loi de Dieu, & de retour à Dieu.

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contracté

fur

Si telle eft la volonté de Dieu für tout Obligation Chrétien, tel eft auffi l'engagement que le fondée Chrétien a contracté lui-même dans fon Bap- l'engagement tême; nous fommes tous liés par notre pa- dans le Bap role; nous n'avons pas moins promis que la tême. fainteté. C'eft ce que portent ces vœux folemnels que nous avons faits pour obtenir de Dieu notre délivrance de l'efclavage du péché & des peines de l'Enfer, & qui en ont été la condition préalable, fans laquelle le péché de notre origine ne nous auroit point été remis. Nous avons renoncé au demon, abrenuntio tibi, fatana, & par une fuite néceflaire, au péché. Car quiconque commet un

Toan. 3. péché, dit faint Jean, appartient au démon. Nous avons renoncé à fes pompes : & fes pompes font les honneurs, les plaifirs, les biens terreftres dont la recherche eft condamnée par l'Evangile, comme étant le lien par lequel le démon tient les hommes captifs. Nous avons renoncé à fes œuvres : or la fainteté & les œuvres de juftice font l'oppofé des œuvres du démon, des œuvres de ténébres. Ce renoncement a été fuivi du ferment de fidélité que nous avons prêté à JesusChrift, adhæreo tibi, Chrifte; nous l'avons pris pour notre maître & notre Roi; nous nous fommes foumis à fon Empire & à fon regne Pf. 114. qui eft le regne de la fainteté, regna propter juftitiam & veritatem. » Nous fommes entrés » dans l'édifice fpirituel dont il eft la pierre » angulaire, pierre choife, pierre précieuse, » fur laquelle nous devons nous placer com»me des pierres vivantes, pour former le » temple faint du Seigneur «. Si le Temple eft faint, tout ce qui entre dans fa compofition le doit être. Nous avons juré de vivre fous la Loi du Seigneur, qui eft une Loi fainte & fanctifiante; fous la Loi de Jefus-Chrift & les maximes de fon Evangile, qui ne prêche que fainteté. Nous avons foufcrit pour la conquête du Royaume des Cieux, dans lequel rien de fouillé ne peut entrer.

3. Pet. 2.

C'est en conféquence de ces promeffes de notre part, que l'Eglife, fous l'autorité & au nom de Dieu, a procédé à l'adminiftration du Saint Baptême. Administration mystérieuse, dont toutes les cérémonies annoncent hautement la fainteté. Dès la porte de l'Eglife où l'on nous a arrêtés d'abord, le Ministre après quelques interrogations, a commencé à

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nous

nous intimer la fainteté : » Entrez » a-t-il dit, dans le lieu Saint; c'est ici la » porte du Seigneur, les juftes y pafferont «< Tous les exorcifmes qu'il a faits fur nous pour chaffer l'efprit impur de notre ame, nous difent que c'a été pour faire place à l'EspritSaint. Les onctions multipliées des faintes Huiles fur les parties de notre corps, nous ont confacrés à Dieu, & ont fait de nous comme autant de vases destinés à son service, & qu'il n'eft plus permis d'employer à des ufages profanes. L'afperfion de l'eau faite fur notre tête, accompagnée de l'invocation des trois Perfonnes de la très-Sainte Trinité, nous a lavés de toute la fouillure du péché, & nous a laiffés purs, juftes, faints devant Dieu, abluti, justificati, fan&tificati. C'est pour nous en faire porter le fymbole, qu'on nous a revêtus d'une robe blanche, qu'on nous a recommandé très-expreffément de conferver dans toute fa, blancheur jufqu'au jour où nous paroîtrons devant le Tribunal. du fouverain Juge. Enfin, pour terminer l'auguste cérémonie, on nous a mis en main un cierge ardent dont faint Paul nous explique le fens myftique par ces paroles: »Vous Ephef. 5ię » étiez autrefois ténébres; maintenant vous » êtes lumiere dans le Seigneur «. Voilà ce qui s'eft paffé dans notre baptême : c'est par ces cérémonies que nous avons été faits Chrétiens. Or fi on n'eft Chrétien que par-là, qui dit un Chrétien, dit donc un Saint, un homme appellé à la fainteté, obligé indifpenfablement à mener une vie fainte & irréprochable; de telle forte que chacun en parti culier vivant faintement, tous les baptifés réunis ensemble forment cette nation fainte,

ce peuple de Saints dont parle Saint Pierre. Entrons maintenant en matiere; expliquons ce que c'eft que la fainteté, la justice chrétienne, dont nous nous fommes propofés de donner les Principes, c'eft-à-dire, les qualités, les regles & les moyens ; c'est ce qui fera la diftribution de ce Traité.

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CHAPITRE III.

Qualités de la Juftice Chrétienne.

I.

Juftice en- LA juftice chrétienne doit avoir quatre

tiere,exemp

qualités, pour n'être pas la juftice de ces tion des pé- faux Juftes d'entre les Juifs, dont parle l'Evanchés mortels. gile, & pour nous affurer l'entrée dans le royaume des Cieux. Elle doit être 1o. entiere: 2°. véritable, c'est-à-dire, fondée fur Ja vérité: 3°. intérieure : 4o. ferme & stable.

Elle doit être entiere; que ce mot ne nous effraye point. Autre chofe eft une fainteté entiere, autre chose une fainteté parfaite. Celle-ci n'eft néceffaire que in voto, comme on dit, c'est-à-dire, dans le vœu, dans le defir, dans la tendance de l'ame qui y doit afpirer. Mais la premiere eft néceffaire in re, en effet & en réalité. On ne demande donc point une fainteté parfaite dans fes dégrés ; mais on exige de tout chrétien une fainteté entiere dans toutes fes parties. Elle en a d'abord deux, l'exemption du mal & la pratique du bien: declina à malo, & fac bonum. Mais comme il y a deux efpéces de mal moral,. le péché mortel & le péché véniel; comme il

ya auffi deux fortes de bien moral, les devoirs commandés fous peine de la damnation, & d'autres qui ne font pas comman dés fous une auffi grande peine: il faut avoir égard à ces différences. Ainfi nous difons que la juftice, pour être entiere, doit renfermer, d'un côté, l'exemption de tout péché mortel, & l'observation de tous les grands commandemens; & d'un autre côté, la vigilance fur foi-même, pour éviter autant qu'il eft poffible le péché véniel, & pour ne pas négliger les devoirs d'un ordre inférieur.

Je dis que fans l'exemption de tout péché mortel, & l'observation de tous les devoirs importans, la juftice ne feroit pas entiere, & feroit dès-lors une fauffe juftice. Rien cependant n'eft plus commun dans le christianifme que cette demie-justice. On s'abstient de tel & tel péché, mais on en commet d'autres. Combien de gens chaftes & fans reproche à cet égard, qui font dans l'habitude de la médifance, ou de la colere? Combien de gens charitables, bons envers les pauvres, non vindicatifs, officieux; & qui font fenfuels & voluptueux ? On obferve certains préceptes du Décalogue, mais on en viole d'autres. On trouvera beaucoup de Chrétiens qui ne font ni homicides, ni adulteres, ni voleurs; mais ils font violateurs du Sabbat, ils ne fanctifient pas le jour du Seigneur, comme l'ordonne le troifiéme précepte du Décalogue; ils employent ce jour tout entier à des chofes profanes. D'autres ne feront ni parjures, ni jureurs, ni calomniateurs ; mais ils trangreffent les Loix de l'Eglife, qui cependant obligent comme celles de Dieu puifque Dieu l'a revêtue de fon autorité: ils

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